[Défense] La France publie son quatrième « Livre Blanc »

La cure d’amincissement continue. En 2008 Nicolas Sarkozy avait publié le sien, et il fit l’effet d’une bombe médiatique. Cinq ans plus tard François Hollande récidive. Le Livre Blanc de la défense a été rendu publique ce matin (à télécharger ici). Comme on pouvait s’y attendre il prévoit des réductions d’effectif au ministère de la défense, auprès des personnels tant civils que militaires. Ce sont donc 24 000 postes qui seront supprimés entre 2015 et 2019. L’objectif n’étant pas, comme on a pu le lire auprès de certains médias un rien excessif de faire disparaître l’armée française, mais plutôt de la mettre en conformité avec les capacités économiques et politiques réelles de notre pays. Déjà il y a cinq ans le Livre Blanc, pour la période 2009/2015, prévoyait 54 000 suppressions de postes, dont 10 000 qui doivent intervenir cette année.

Extrait, p. 139 :

[…] S’appuyant sur un centre de commandement et de conduite permanent et interopérable avec nos alliés, les forces aériennes comprendront notamment 225 avions de combat (air et marine), ainsi qu’une cinquantaine d’avions de transport tactique, 7 avions de détection et de surveillance aérienne, 12 avions ravitailleurs multirôles, 12 drones de surveillance de théâtre, des avions légers de surveillance et de reconnaissance et 8 systèmes sol-air de moyenne portée. […] Les forces terrestres disposeront notamment d’environ […] 140 hélicoptères de reconnaissance et d’attaque, 115 hélicoptères de manœuvre et d’une trentaine de drones tactiques. […]

Si l’Armée de l’Air n’est pas vraiment la plus touchée, quoi qu’elle risque de perdre certaines bases « administratives », il faut souligner que l’Aviation Navale risque de sentir passer ce Livre Blanc. Néanmoins pas question de toucher au porte-avions et à son aviation embarquée. Les cibles seraient plutôt la Patmar et l’entraînement des pilotes de la Marine. Une mutualisation des moyens de formation pratique et théorique avec les aviateurs semble de plus en plus évidente. Quand à la Patmar elle se rassemblera vraisemblablement autour d’une ou deux flottilles de Dassault Atlantique, et le reste sera réalisé par des jets non armés types Falcon 50M et Gardian. Après tout la France n’est pas souvent menacé du feu nucléaire par des submersibles ennemis.

Justement concernant l’atome le Président de la République a indiqué que le Livre Blanc ne toucherait pas à la dissuasion. En effet la France conservera ses moyens aériens et sous-marins de frappe nucléaire, véritables garants de la souveraineté militaire de notre pays, notamment vis à vis de l’OTAN. Il n’est toujours pas question de ressortir (encore) de l’organisation d’ailleurs, mais le Livre Blanc prévoit une certaine indépendance de la France vis à vis d’elle. Hollande n’ayant jamais caché sa préférence européenne plutôt qu’atlantiste.

Les points qui seront développés concernent les moyens de lutte contre les attaques cybernétiques, la lutte contre le terrorisme, et le renforcement des moyens de renseignement tant humains que technologiques. En outre le Livre Blanc prévoit que les opérations extérieures françaises ne devront plus excéder l’engagement de 20 000 personnels, contre 30 000 actuellement.

Inutile de dire que ce Livre Blanc va faire couler beaucoup d’encre,  dans les prochaines semaines. Certains vont y voir une attaque violente contre notre défense, tandis que d’autres brandiront l’étendard de la réduction des dépenses publiques. Et peut être qu’au milieu de cette cohue certains auront l’intelligence d’analyser ce Livre Blanc avec un peu moins de dogmatisme et d’esprit partisan. En presque quarante ans, le premier remonte à 1974, c’est le quatrième Livre Blanc. Deux ont été réalisés sous des gouvernement de Droite, et deux sous des gouvernements de Gauche, et pourtant le ministère de la défense est toujours debout. Alors comme disent nos amis britanniques : wait and see.

Photo (c) Armée de l’Air

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ARTICLE ÉDITÉ PAR
Arnaud
Arnaud
Passionné d'aviation tant civile que militaire depuis ma plus tendre enfance, j'essaye sans arrêt de me confronter à de nouveaux défis afin d'accroitre mes connaissances dans ce domaine. Grand amateur de coups de gueules, de bonnes bouffes, et de soirées entre amis.
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Commentaires

12 réponses

  1. Ok il nous restera donc 225 avions de combat (Armée de l’air et Marine) mais qu’en est-il exactement ? Combien de Rafale (B, C et M) et de Mirage 2000 (la version D doit être modernisée,mais pour le 2000-5, le 2000-C et le 2000-N ?). Les SEM et Mirage F1 vont eux partir très bientôt à la retraite.

  2. je vous ferait remarqué, que pour un territoire de loin supérieur a la France, le Canada n’a que +/- 60 chasseurs en état de vol, donc encore moins opérationnel. Nous n’avons aucun sous marin digne de ce nom (les notres prenant l’eau et prenant feu) et peu de navire de surface, en fait, le Canada n’a plus vraiment de capacité de dissuasion, a cause de la tièdeur des canadien a acheter des armes, alors compter vous chanceux.

      1. Quantitativement en effet la France a perdu, mais qualitativement elle s’y retrouve, notamment grâce au Rafale. En effet le dernier chasseur français étant un avion réellement multirôle elle peut l’utiliser aussi bien comme chasseur (défense aérienne et attaque au sol) que comme bombardier (frappes nucléaires) voire en avions de reconnaissance lointaine. Les récentes opérations conduites en Libye et au Mali n’auraient sûrement pas pu être réalisé en 1996 avec des avions comme le Jaguar ou le Mirage F1-CT. Cette rationalisation des moyens de combat amène forcément une diminution en nombre, mais pas forcément en intensité d’action. Il reste que l’Armée de l’Air a de véritables carences en matières de transport stratégique et de ravitaillement en vol. L’A400M et l’A330MRTT, tous deux désormais budgétés pour le premier et annoncés pour le second, se font vraiment attendre.

      2. plus d’avions ne veut pas dire plus efficace. Le Canada, avec sont peu d’avion de chasse est quand même capable de planté les pilotes américains a tout coup, et de se déployé sur demande. Comme utilisateur de F-18, le Canada aurait actuellement le meilleur score en bombardement et en chasse. Ok. j’ai rien contre un grand nombre d’avions, mais entre beaucoup de ferraille volante et un peu moins d’armes hautement efficace, mon choix est facile 🙂

      3. @Dany
        Il faut dire que les Américains sont loin d’être les meilleurs soldats du monde qu’ils croient être. Ils se reposent trop sur la technologie et pas assez sur les vraies compétences. Et plus la technologie deviendra « technologique », plus ils s’enfonceront. On le voit déjà avec les F-22 et F-35…

  3. En attendant, c’est pas en supprimant des postes qu’il va faire reculer le chômage… Et puis c’est faux de croire que ça va réduire les dépenses publiques. Ben oui… Si on ne paye plus les gens pour un travail… il faut qu’on leur paye des indemnité de chômage… Quelqu’un pourrait lui expliquer ?

    Le meilleur moyen de faire des économies à long terme, serait d’offrir à nos soldats du matériel neuf, il y a rien de plus ruinant que d’utiliser du vieux matos qui passe le plus clair de son temps au garage ou en atelier de réparation.

    1. Concernant le « matériel neuf » il faut bien comprendre qu’en matière d’amortissement économique, le matériel ne reste pas neuf bien longtemps, et si on le change trop souvent il n’est pas amorti, donc plus onéreux au final qu’un matériel un poil plus vieux mais entretenu. C’est une règle élémentaire dans la gestion de tout matériel par des collectivités, des administrations, ou des institutions comme l’armée.

      Ensuite le concept de dire que si on supprime des postes on ne fait pas reculer le chômage n’est pas applicable dans le domaine militaire français, puisque l’ensemble de nos personnels des armées sont reclassés à l’issu de leur temps sous le drapeau. C’est même devenu depuis une quinzaine d’années, grosso-modo depuis la professionnalisation, un des principaux postes de dépenses militaires. Et pour ceux qui malheureusement se retrouveraient au chômage, il faut savoir que l’assurance chômage n’est pas lié du tout au budget de la défense, et ne fonctionne pas avec les même canaux économiques. De plus dans le principe de suppressions de postes il existe une possibilité pour l’armée : le non remplacement d’une partie des départs en retraite.

      Enfin pour accroitre les économies d’argent l’armée, comme les collectivités et administrations, a désormais recours aux entreprises privées, ce qu’en économie on appelle une délégation de services. Ainsi la flotte des avions d’entraînement Grob-120 et des hélicoptères d’entraînement Eurocopter EC120 Colibri, utilisés respectivement par l’Armée de l’Air et par l’ALAT n’appartiennent pas à la France mais à des sociétés privées. Il en va de même avec deux Dauphin de la Marine affrétés auprès d’un transporteur belge, qui fourni par ailleurs également en hélicoptère les SAMU59 et 62.

      Certes les Livres Blancs passent mal, mais il faut bien reconnaitre qu’ils sont désormais devenus des maux nécessaires.

      1. Par « matériel neuf », j’entendais « matériel qui ne soit pas amorti depuis 20 ans et dont les coûts de maintien en condition opérationnel n’ont pas doublés depuis le début de leur exploitation et dont on trouve encore les pièces pour ne pas avoir à déshabiller Pierre pour habiller Paul… ». Pour moi, un véhicule militaire de 20 ans, reste un « véhicule (relativement) neuf »… mais dont il faut commencer à se pencher sur son remplacement pour ne pas se retrouver dans la situation expliquée plus haut.
        Sans compter que, remplacer régulièrement son matériel donne du travail aux ingénieurs de R&D et fait tourner les chaines d’assemblage, ce qui profite autant aux salariés qu’à l’État pour des raisons expliquées plus bas.
        Concernant le reclassement, il faut qu’on m’explique comment l’État arriverait à reclasser ses militaires quand tant de « civils » pointent à Pole Emploi et que le chômage n’a jamais été aussi important depuis les années 90…
        Quant à l’assurance chômage, elle n’est pas liée aux dépenses de la défense, mais aux dépenses de l’État, or, c’est l’ensemble du budget de l’État qui est en déficit, pas seulement celui de la défense.
        Enfin, un chômeur ne paye pas d’impôt ce qui n’est pas le cas d’un employé qui touche 2000 euro ou plus par mois… or, l’impôt, c’est une rentrée d’argent à ne pas négliger. Pour terminer (bon, là je ne pense pas que ça s’applique aux militaires qui sont payés par l’État), il faut savoir qu’un patron qui paye son salarier, donne à peut prêt la même somme à l’État…

  4. Quand on voit que la France consacre 1.5% de son PIB au budget de la défense, il y a vraiment de quoi s’inquiéter. Perso, je pense que nous baissons trop notre garde, nous produisons de moins en moins de matériel volant, roulant ou flottant, du coup nous perdons beaucoup de marché faute de volumes. Une amie bosse chez Panhard, c’est la misère un véhicule par mois au mieux, c’est intenable. Les US ont raflés presque tous les marchés au moyen-orient, là où nous avions bien réussit il y a pas si longtemps, au rythme actuel on sera dans la situation de 36 avec une armée à bout de souffle. Bref, nous perdons petit à petit notre rang et c’est un miracle de pouvoir intervenir au Mali dans de « bonnes » conditions, heureusement que nos soldats sont rustiques et savent se démerder avec ce qu’ils ont, mais cela va-t-il continuer encore longtemps?

  5. Juste un chiffre 1 euro dépensé dans l’industrie militaire c’est 1,6 euros de rentré dans les caisses de l’Etat…

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