7 août 1919, Charles Godefroy franchit en avion l’Arc de Triomphe

Près d’un siècle plus tard l’exploit est encore époustouflant. Au matin du 7 août 1919 l’aviateur français Charles Godefroy survole Paris et fait traverser l’Arc de Triomphe à un chasseur biplan Nieuport XI, bien sûr sans aucune espèce d’autorisation. Son aventure de quelques minutes aura un retentissement mondial, son nom restera à jamais attaché à ce vol historique.

Et pourtant rien ne prédestinait Charles Godefroy à ainsi faire parler de lui. Démobilisé comme beaucoup au lendemain du 11 novembre 1918 il ne s’agit pas là d’un grand as. En fait Godefroy n’est même plus un pilote de chasse quand la Première Guerre mondiale prend fin, il enseigne l’art du vol aux autres. C’est un instructeur de l’Aéronautique Militaire Française. Durant le conflit il est cependant crédité de six victoires aériennes, assez pour le qualifier d’as. Mais surtout c’est un excellent technicien du vol, un pilote rigoureux et très fin.

Ami intime de René Fonck il est à ses côtés le 14 juillet 1919 lors du défilé de la Victoire sur les Champs-Élysées. Une soixantaine de pilotes français paradent sur la célèbre avenue parisienne. Mais à leur grand désarroi tous sont à pied, le concept de défilé aérien n’a pas encore été inventé et le Haut-État-major français se méfie encore de ces aviateurs. Ils défilent donc comme tels des fantassins, eux qui pendant toute la guerre étaient des héros, redeviennent de simples combattants.
La pilule est trop lourde à avaler pour Charles Godefroy.

Durant une semaine lui et ses amis ruminent leur « réponse » au ministère de la guerre. Elle prendra la forme d’un exploit historique. Dans le plus grand secret Charles Godefroy contacte des journalistes et photographes et leur demande d’être présent en haut des Champs-Élysées le 7 août 1919 à 8 heures du matin très précisément. Il ne leur dit rien de ce qu’il compte faire, l’officier démobilisé craint trop les fuites.

À la date dite il se présente sur le terrain d’aviation de Villacoublay, à une dizaine de kilomètres à l’ouest de Paris. Là il emprunte un chasseur monomoteur Nieuport XI et le fait décoller. Il n’est même pas inquiéter par les militaires présents. Il prend les airs à 7 heures 20 du matin et se dirige vers la capitale.

Lorsque 8 heures sonnent, son biplan se présente au-dessus de la porte Maillot et prend la direction de la porte Dauphine, volant au ras des toitures. À un moment il survole deux policiers à bicyclette qui tombent de leur engin sous la surprise de voir passer l’avion. Puis Godefroy décide de remonter la très chic avenue du Bois de Boulogne (qui ne s’appelle pas encore avenue Foch) pour entamer un tour et demi de l’Arc de Triomphe. Tout en repérant exactement les lieux ils donne à son Nieupot Bébé une légère inclinaison. Au bout d’un tour et demi il redescend l’avenue de la Grande Armée, et à la moitié de cette dernière fait demi-tour et fonce en ligne droite. En quelques secondes Charles Godefroy traverse l’Arc de Triomphe et se retrouve en haut des Champs-Élysées, là où il était quelques jour auparavant avec ses anciens frères d’armes.

Godefroy réalise son vol historique. Remarquez le tramway sous l'avion.
Godefroy réalise son vol historique. Remarquez le tramway sous l’avion.

Hasard ou coïncidence, au moment du survol un tramway passe juste sous l’avion. Ses passagers apeurés se plaquent au sol ou sautent de la cabine en marche. Deux seront légèrement blessés. Il faut dire qu’un chasseur biplan lancé à 160km/h devait alors avoir quelque chose d’assez effrayant.

L’aviateur français ramène son avion au terrain d’aviation d’où il est parti. Les gendarmes l’y attendent, et c’est menottes aux poignets qu’il termine son aventure. Cependant devant une levée de boucliers d’anciens aviateurs les autorités le relâchent rapidement. Ils sera cependant interdits de reprendre les commandes d’un avion militaire à vie. Par la suite il retrouva la vie civile, devenant négociant en vins et spiritueux en banlieue nord.

Charles Godefroy est mort dans un relatif anonymat le 11 décembre 1958 à l’âge de 70 ans.

Photos © SDASM

 

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ARTICLE ÉDITÉ PAR
Arnaud
Arnaud
Passionné d'aviation tant civile que militaire depuis ma plus tendre enfance, j'essaye sans arrêt de me confronter à de nouveaux défis afin d'accroitre mes connaissances dans ce domaine. Grand amateur de coups de gueules, de bonnes bouffes, et de soirées entre amis.
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Commentaires

4 réponses

  1. voila un super pilote!!! passer sous l’arc de triomphe a 160kmh en 1919 !!!!! il fallait avoir des . . . . . . . . je pense
    que vous m’avez tous compris!!!!

  2. Maintenant on ne pourrait plus le faire on se mangerait directe le drapeau qui flotte sous l’arche.

  3. Impressionnant, le pilote a bien de faire venir des journalistes et des photographes. Ce sont de magnifiques photos !!

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