Contrat d’achat des F-16 par la Belgique, le Marché du siècle !

Actuellement une bataille commerciale s’engage entre les trois meilleurs avions de combat du moment (F-35, Typhoon, et Rafale) pour savoir lequel équipera prochainement la Composante Air. Un affrontement qui n’est pas sans rappeler celui qui se passa voila près de 45 ans afin de sélectionner l’actuel chasseur, celui qu’il faut désormais remplacer. Retour sur cette bataille et le contrat qui en découla, que la presse généraliste baptisa très rapidement de « Marché du siècle » et qui vit l’émergence du F-16 Fighting Falcon comme superstar des ventes à l’export. Un contrat qui aujourd’hui encore continue d’en faire rêver plus d’un !

Tout commença en juin 1974 quand les états-majors belges, danois, néerlandais, et norvégiens se mirent en commun afin de trouver un avion de combat capable de remplacer leurs moyens contemporains. Les chasses belges et norvégiennes volaient alors sur Lockheed F-104 Starfighter, la chasse danoise sur North American F-100 Super Sabre, et la chasse néerlandais sur Canadair NF-5 Freedom Fighter. Mais afin de pouvoir négocier au mieux les prix d’achat ils décidèrent de se mettre en commun afin de trouver un avion capable de remplir au mieux leurs exigences.

Quatre avions étaient alors en lice : le Dassault Mirage F1E, le General Dynamics YF-16, le Northrop YF-17, et le Saab J37E Viggen. Assez rapidement la commission internationale dirigée par le général norvégien Sverre Hamre écarta les deux derniers car jugés trop lourds pour les besoins des quatre pays. Ne restaient désormais plus en compétition que le Mirage F1E et l’YF-16. Le premier avait pour lui d’être déjà en service dans plusieurs pays et le second d’être le futur avion de combat léger de l’US Air Force. Deux avions de chasse donc aux arguments affûtés.

Et parmi les quatre pays chacun des deux avionneurs avait ses partisans. Dassault était plutôt suivi par la Belgique et les Pays-Bas quand General Dynamics l’était par le Danemark et la Norvège. Mais dans les deux cas le marché était particulièrement juteux, on parlait d’un total de 800 avions, monoplaces et biplaces confondus ! Dans le même temps la diplomatie américaine et le secrétariat général de l’OTAN, dont sont alors membres les quatre pays concernés, prennent logiquement fait et cause pour le General Dynamics YF-16.

Mais à Paris le Président de la République Valéry Giscard D’Estaing ne prend pas vraiment ce contrat au sérieux. En outre ses relations avec Marcel Dassault ne sont pas particulièrement au beau fixe. Deux facteurs qui ne donnent pas forcément une bonne image du Mirage F1E vis à vis du YF-16 Fighting Falcon.

Finalement le 7 juin 1975 le couperet tomba, les quatre pays firent le choix du General Dynamics F-16 Fighting Falcon. Très rapidement la presse généraliste mais aussi spécialisée qualifia ce contrat de «Marché du siècle». Il faut dire qu’il s’agissait de la plus importante commande d’avions de chasse en temps de paix en dehors des États-Unis ou du bloc communiste.

En fait outre General Dynamics le grand vainqueur de cette compétition était l’industrie aéronautique belge. En effet la SABCA (pour Sociétés Anonyme Belge de Constructions Aéronautiques) reçut pour mission de construire sous licence les 114 avions destinés à la Belgique mais aussi les 58 pour le Danemark. Dans le même temps la méconnue SONACA (pour Société Nationale de Construction Aérospatiale) devait de son côté assembler les dérives et les tronçons arrières de fuselage. La SONACA était en fait l’évolution de la société Avions Fairey, la branche belge du célèbre constructeur éponyme britannique.
Enfin l’industriel FN (célèbre pour sa manufacture d’armes à feu) se vit confier la production sous licence des réacteurs Pratt & Whitney TF100 pour les F-16 belges et danois.

Si initialement la commande belge concernait 104 monoplaces F-16A et 12 biplaces F-16B elle fut ramenée en mai 1977 lors de la signature finale du contrat à 96 monoplaces et 20 biplaces. Ils reçurent les codes tactiques belges respectifs de FA-01 à FA-96 et de FB-01 à FB-20. C’est d’ailleurs le FB-01 qui fut le premier Fighting Falcon à sortir des chaînes d’assemblage de la SABCA à Gosselies en Wallonie.

La Force Aérienne Belge (la Composante Air n’est née qu’en 2002) déclara opérationnels ses premiers F-16A & F-16B le 1er janvier 1981. Ils appartenaient à la 349ème Escadrille. À cette époque il s’agissait des chasseurs monoréacteur les plus modernes en Europe occidentale ! Par ailleurs à cette époque la Belgique employait encore ses Dassault Mirage 5BA. Et le 9 février 1983 le gouvernement belge signa un contrat supplémentaire avec son homologue américain portant sur l’acquisition de quarante monoplaces et quatre biplaces supplémentaires codés respectivement FA-97 à FA-136 et FB-21 à FB-24. Il est à noter que ces quatre biplaces furent produits aux États-Unis. Il fallut attendre le 28 février 1985, il y a donc 33 ans, pour que la Force Aérienne Belge reçoive l’ultime F-16 Fighting Falcon du premier lot, le monoplace codé FA-96. De son côté le dernier avion de second lot, le monoplace codé FA-136 n’arriva en unité que le 2 décembre 1991, soit plus de seize ans après l’annonce de la victoire du chasseur américain sur le chasseur français.

Il est intéressant de voir que moins de deux ans après la livraison de ce dernier avion le gouvernement belge s’engageait dans le programme MLU (pour Mid-Life Update) visant à moderniser ses F-16 Fighting Falcon monoplaces et biplaces. Le programme belge était alors de maintenir la flotte en état de vol jusqu’à l’horizon 2010-2012 dernier délai. Six ans après cette date butoir le successeur de l’avion n’a toujours pas été sélectionné !

Lorsque la Belgique se séparera de ces avions, ceux-ci serviront depuis quatre décennies. Il est intéressant de voir que le F-16 Fighting Falcon est toujours en production, désormais sous les auspices de Lockheed-Martin. Bon en même temps les actuels F-16E n’ont plus grand chose à voir avec les «vieux» F-16A belges.

Photo © Composante Air.

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ARTICLE ÉDITÉ PAR
Arnaud
Arnaud
Passionné d'aviation tant civile que militaire depuis ma plus tendre enfance, j'essaye sans arrêt de me confronter à de nouveaux défis afin d'accroitre mes connaissances dans ce domaine. Grand amateur de coups de gueules, de bonnes bouffes, et de soirées entre amis.
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Commentaires

12 réponses

  1. C’est vrai que ça pourrait être une situation intéressante pour les Belges :

    Le F-16 à le vent dans le dos à l’export, et ils veulent les remplacer. Le jour ou il aurront enfin décider quel model ils vont acheter, il pourrait revendre progressivement leurs F-16 pour réduire l’impact financier de l’achat du nouveau model >_>

    Qui sait s’ils vendent les F-16 en enchère il pourraient même faire des bénéfices mais ça semble quelque peut improbable <_<

  2. Le FA-55 est dans la cour du chateau de Savigny-lès-Beaune aux côtés d’un Mirage 3 et F-104 Starfighter tout les 3 belges.

    1. La Belgique n’ayant jamais volé sur Mirage III (et non Mirage 3) l’avion en question est sûrement un Mirage 5. 😉

  3. Certains Mirages V Belges ont bien été vendus au Chili et des F16 aux Jordaniens. Comme tout véhicule d’occasion, chaque vente se fait au cas par cas en fonction des états de service de la machine. De plus, l’aviation est bien un domaine où les mises à nu et rénovations complètes d’appareils ne sont pas exceptionnelles.
    Personnellement, j’ai un petit faible pour le Rafale comme remplaçant de nos F16, mais j’espère que leur remise d’offre en dehors du cadre de la demande officielle ne leur sera pas fatale. Bien qu’elle soit compréhensible. Le monde politique flamand, ceux qui dirigent réellement quoi, étant clairement en faveur du F35.
    En fait, je trouve que le Gripen aurait été un très bon compromis, mais les Suédois ont voulu jouer la carte du politiquement très (trop?) correct et sont sortis eux même de la course. Pas sympa.

    1. Je ne vois pas trop le rapport entre le marché du siècle et votre réponse mais bon hormis ça oui elle est intéressante à lire.

      1. Ma réponse à se référait au commentaire de James qui doutait des possibilités de revente des vieux F16. Ensuite, je doinnais simplement mon petit avis concernant le choix à faire pour ce second marché du siècle. C’est tout.

  4. Clairement le choix du F-16 était le bon pour ces pays tant pour le prix d’acquisition, de maintenance, de mise à jour, de collaboration internationale ou encore de capacités.
    Le F-16 MLU est toujours un très bons avion qui certe est moins bon mais qui et toujours un redoutable concurrent pour le Rafale par exemple.

  5. Même si le F-35 est poussé à fond par l’OTAN, les Néerlandais etc, les retombées industrielles pour l’industrie Belge ne sont pas claires. Dassault Aviation propose un plan de 20 (VINGT) Milliards d’Euros assorti d’un partenariat. Cela donne au Rafale des arguments lourds….voici le lien de recoupement (FR) :
    http://www.lalibre.be/actu/belgique/remplacement-des-f16-dassault-promet-20-milliards-d-euros-de-retombees-a-la-belgique-5a82d853cd70fdabb9fd6fb6

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