Quand le N°30 Squadron de la RAF patrouillait au-dessus de l’Irak !

On l’a un peu oublié aujourd’hui, en partie parce que depuis 1947 il ne vole plus que sur des avions-cargos, mais le célèbre et prestigieux N°30 Squadron britannique a aussi eu une histoire dans l’aviation coloniale. Au cours des années 1930, cette unité de la Royal Air Force survolait quotidiennement les possession du dominion britannique au Moyen-Orient, et plus précisément au-dessus des actuelles Irak et Jordanie. À l’occasion du centenaire de la RAF retour sur une période quelque peu occultée.

Au milieu des années 1920 la Royal Air Force dispose encore au Moyen-Orient de bombardiers légers de reconnaissance Airco D.H.9 dont la conception remontait à la Première Guerre mondiale. Malgré une tropicalisation de ces avions il s’avéra rapidement qu’ils n’étaient pas adaptés à la mission dans un environnement chaud et sec. Les cellules et les moteurs se fatiguaient vite. Si bien que rapidement l’état-major du N°30 Squadron en charge des missions sur un immense territoire (représentant les actuelles Irak, Iran, et Jordanie) demanda à disposer d’un nouvel avion.
Leur vœu ne fut exaucé qu’à la fin de la décennie.

En effet en 1929 l’unité reçut ses premiers Westland Wapiti. Malgré le fait que ce gros biplan était alors plus récent le N°30 Squadron perdit en capacité offensive lors des missions de bombardement mais également en matière de rayon d’action plus faible d’une centaine de kilomètres. Néanmoins le Wapiti était un avion apprécié des pilotes coloniaux de Sa Majesté en raison de sa plus grande aptitude au travail en environnement moyen-oriental. Notamment ceux-ci disposait d’un train d’atterrissage qui à la différence de celui du D.H.9 ne cassait quasiment jamais à l’atterrissage.

Westland Wapiti survolant Mossoul en Irak.

Mais surtout le nouveau biplan permettait aux pilotes de l’unité de ravitailler les casemates et fortifications britanniques réparties un peu partout sur ce territoire. Un ingénieux système permettait aux armuriers de la RAF de remplacer les bombes par des conteneurs de transport de fret. Du coup les Wapiti volaient en formation de trois avions, deux configurés en ravitaillement et un en bombardier léger de reconnaissance. Tous continuaient cependant de décoller avec des mitrailleuses bonnes de guerre, et pour cause.
Les accrochages étaient fréquents dans cette région du monde, déjà une poudrière. Certaines communautés jordaniennes et irakiennes voyaient en effet d’un fort mauvais œil la présence des forces britanniques dans la région. Il n’était par rare que des tirs d’armes automatiques aient lieu contre les avions de la RAF. La riposte était bien sûr immédiate.

Cette intensification des réactions hostiles face au britannique eut notamment comme point d’orgue la perte par le N°30 Squadron d’un Westland Wapiti au-dessus des faubourgs de Mossoul en décembre 1932. Le biplan fut abattu et les deux membres d’équipage tués par des tirs considérés alors comme provenant (selon témoignages) d’une mitrailleuse allemande de la Première Guerre mondiale. De telles armes n’étaient pas rares, certaines tribus semi-nomades ayant des liens forts avec de riches familles allemandes notoirement très anglophobes. Moins de trois ans après ce drame l’unité disait adieu à ses Wapiti !

Effectivement à l’été 1935 l’escadrille fut transformée sur un nouveau type de biplan : le Hawker Hardy. Avec cet avion le N°30 Squadron perdait désormais toute capacité de bombardement et ne devenait plus qu’une unité de reconnaissance et de soutien logistique. Bien qu’un peu plus rapide que le Wapiti ce nouvel avion avait lui aussi les pattes plus courtes. Une fois encore les pilotes perdaient une centaine de kilomètres de rayon d’action par rapport au prédécesseur. En outre le Hardy volait moins haut et supportait moins bien les conditions climatiques. Une succession de défauts qui fit que jamais ce biplan ne réussit à satisfaire pleinement les attentes des pilotes coloniaux. Par chance pour eux leurs biplans ne subir que rarement les affres des tribus hostiles, dommage pour ces dernières d’ailleurs. Car la particularité de la mitrailleuse arrière du Hardy était qu’elle ne pouvait que difficilement tirer vers le bas. Elle avait en effet été conçu pour protéger l’avion contre des chasseurs, donc tirer vers le haut ou horizontalement. Des chasseurs que les populations irakiennes et jordaniennes ne possédaient évidemment pas !

Formation de Hawker Hardy au-dessus de la vallée de l’Euphrate en Irak.

La fin des années 1930 fut marqué par la disparition des biplans au sein du N°30 Squadron qui passa en novembre 1938 sur bimoteurs monoplans Bristol Blenheim avant de déménager quelques mois plus tard à l’été 1939 vers l’Égypte. Et ensuite la Seconde Guerre mondiale, mais là c’est une autre histoire…

Avec ce rapide rappel historique vous comprendrez mieux pourquoi aujourd’hui encore les Lockheed-Martin Hercules C Mk-5 du N°30 Squadron volent avec comme insigne d’unité un palmier. Cet arbre est en effet un des symboles de cette région du monde, bien plus d’ailleurs que la région d’Oxford où est actuellement stationné cette prestigieuse unité.
Un mot enfin de sa devise : «Ventre à terre», en français dans le texte s’il vous plait !

Photos © UK Ministry of Defence.

 

 

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ARTICLE ÉDITÉ PAR
Arnaud
Arnaud
Passionné d'aviation tant civile que militaire depuis ma plus tendre enfance, j'essaye sans arrêt de me confronter à de nouveaux défis afin d'accroitre mes connaissances dans ce domaine. Grand amateur de coups de gueules, de bonnes bouffes, et de soirées entre amis.
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