Aujourd’hui encore c’est un des grands mystères de l’aviation civile commerciale en France. Le vendredi 3 novembre 1950 l’avion de ligne quadrimoteur Lockheed L-749A Constellation porteur de l’immatriculation VT-CQP s’écrasait dans les Alpes françaises. Il n’y eut aucun survivant parmi les 48 passagers et membres d’équipage de celui qui avait été baptisé Malabar Princess. Depuis une douzaine d’années la fonte des glaces dans la région permet de retrouver des éléments de l’accident, y compris des restes humains.
L’une des particularités du drame du Malabar Princess c’est que 75 ans après l’accident il est toujours impossible d’établir formellement les causes de l’accident. On a parlé d’une défaillance des moteurs au-dessus des Alpes, on a abordé le cas d’une forte tempête de neige, ou encore d’une erreur de pilotage de la part de l’équipage d’Air India. À l’automne 1950 le BEA (le très respecté Bureau d’Enquêtes et d’Analyses pour la sécurité de l’aviation civile) n’avait que quatre ans d’existence et pas encore le savoir faire mondialement reconnu dont il jouit aujourd’hui. Surtout le Constellation s’était écrasé dans le massif du Mont-Blanc à plus de 4000 mètres d’altitude, c’est à dire en haute montagne.
Ce dont on est sûr et certains c’est qu’aucun des quarante passagers et des huit membres d’équipage de l’avion n’a survécu à la collision avec la montagne. Car oui la destruction du L-749A Constellation résultat d’un impact avec le rocher de la Tournette qui culmine à 4677 mètres d’altitude. L’avion réalisait une liaison aérienne régulière entre Bombay et Londres. Il avait réalisé son escale habituelle au Caire et se préparait à atterrir à Genève pour sa dernière étape avant son arrivée dans la capitale britannique. À 10 heures 28 le commandant de bord indique par radio au contrôle aérien suisse qu’il pense se trouver à 5000 mètres d’altitude à la verticale de la ville iséroise de Voiron. La météo est très mauvaise et la visibilité quasi nulle. Le commandant de bord, Alan Saint, est un ancien pilote de bombardier de la Royal Air Force avec plus de 4000 heures de vol à son active. Ce n’est donc pas un bleu. Six minutes plus tard, à 10 heures 34, le contact radio est perdu.
Il est alors impossible à d’éventuelles équipes de secours de se rendre sur zone. Il faudra attendre 48 heures pour qu’un vol de reconnaissance puisse repérer la zone du crash autour du rocher de la Tournette. Les chances de retrouver des survivants sont alors déjà quasi nulles. Pourtant le lendemain deux groupe de guides de haute montagne prennent la route de la zone du crash. Vingt-cinq hommes quittent le village de Chamonix et six celui de Saint-Gervais en direction de l’épave du Malabar Princess. Ce sont tous des spécialistes aguerris. Pourtant tous n’en reviendront pas. Une avalanche surprend l’équipe de Chamonix et emporte l’un de leurs chefs, l’alpiniste de renom René Payot. Il décède dans la montagne. Ses camarades décident de redescendre son corps et stoppent net leur ascension vers le rocher de la Tournette. Les six guides partis de Saint-Gervais n’ayant pas eu vent du drame ils poursuivent leur mission de sauvetage. Ils ne seront que cinq à y arriver après cent deux heures de marche. L’un d’entre eux a été obligé de redescendre dans la vallée, souffrant d’engelures. Ils arrivent sur la zone du crash onze jours après celui-ci. Effectivement il n’y a aucun survivant. Ils ne trouvent même pas les 48 dépouilles, tant la neige a partiellement recouvert le site du crash. Les guides de haute montagne redescendent dans la vallée avec ce qu’ils peuvent : quelques effets personnels, des sacs de courrier, ou encore des papiers d’identité.
En France, en Grande Bretagne, et en Inde l’accident du Malabar Princess est retentissant. Jamais dans notre pays une telle catastrophe aérienne n’avait eu lieu. Les cinq guides de Saint-Gervais sont hissés en héros par la presse. Et puis commencent les rumeurs. Certains disent que l’avion aurait été alourdi par une mystérieuse cargaison chargée au Caire et qui aurait dû être débarquée à Genève. On parle notamment un temps de lingots d’or, de l’or nazi. Bien entendu rien de tout cela ne repose sur quoi que ce soit de solide. Mais en cette fin d’année 1950 il faut bien vendre du papier.
L’affaire du Malabar Princess, son drame humain, revient sur le devant de la scène une première fois en juin 1978 quand un groupe de gendarmes du PGHM découvre une cinquantaine de lettres encore cachetée. Remises à la Poste elles seront finalement expédiées à leurs destinataires d’origine. C’est un peu morbide mais c’est comme ça. Plus près de nous en septembre 2013 un alpiniste découvre à quelques kilomètres de la zone du crash une boite à bijoux avec des pierres précieuses à l’intérieur. Le trésor est estimé à 300 000 euros et partagé entre l’inventeur et la ville de Chamonix. Cependant un doute subsiste : provient t-il du Malabar Princess ou du Kangchenjunga ? Ce dernier est un Boeing 707 appartenant lui aussi à Air India et lui aussi tombé dans le massif du Mont-Blanc dans des conditions mystérieuses le 24 janvier 1966. Et là encore il n’y eut aucun survivant.
Et si un tel drame devait à nouveau se reproduire dans le massif du Mont-Blanc les secouristes piétineraient t’ils autant ? Malheureusement nous avons la réponse grâce au drame de l’Airbus A320-200 de la Germanwings en mars 2015. Les équipes françaises de sauvetage y ont fait un travail remarquable, avec en premier lieu les gendarmes des PGHM et les policiers des CRS Montagne. Pour mémoire le crash de la Germanwings n’avait rien d’accidentel, le pilote de ligne a volontairement projeté son avion contre la montagne afin de se suicider. Donc non si un tel accident devait se reproduire les secouristes seraient très rapidement à pied d’œuvre. Il faut savoir qu’en terme de secours héliporté en haute montagne novembre 1950 c’est la préhistoire.
Photo © Air India.
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Une réponse
Salut ARNAUD et les Passionnés,
Je mettrai juste un bémol à ton optimisme quant à la capacité de réaction des secours français actuellement, et ça vaut aussi bien aujourd’hui comme hier, pour les secours en mer, sur terre et sous terre; ce sont les conditions météorologiques qui s’imposent aux secours et à toute leur logistique moderne et réactive, et qui souvent empêchent toute action immédiate; ce qui peut avoir évidemment des conséquences évidentes quant à la survie déjà précaire des victimes.
Quant au MALABAR PRINCESS, en fait j’en ai finalement vraiment entendu parlé avec le superbe film MALABAR PRINCESS de Gilles Legrand en 2004, avec Jacques Villeret, Michèle Laroque, Claude Brasseur, Clovis Cornillac….Vraiment un bon film à revoir ou découvrir…
D’après l’historique des crashs dans les Alpes françaises, il n’était pas conseillé de voler sur Air India…!
Aéronautiquement,