L’Atlantique 2 et les vacanciers du Tréport.

Cela pourrait presque être le titre d’une fable contemporaine. En fait ce qui s’est passé ce dimanche 24 août 2025 peu avant midi démontre à quel point les Français sont peu habitués à voir voler des aéronefs militaires en dehors du défilé du 14 juillet ou des meetings aériens. La scène s’est déroulée au-dessus des plages de la célèbre station balnéaire du Tréport, en Seine Maritime, et concerne un avion de patrouille maritime de la Marine Nationale. Un fait divers à mi chemin de la grosse panique pour certains et de l’émerveillement pour d’autres.

Pour celles et ceux qui l’ignoreraient Le Tréport est souvent considéré comme la plus ancienne station balnéaire de France. C’est là qu’au 19e siècle est née la mode des bains de mer. Même la reine d’Angleterre, Victoria, y vint en 1843. En 1872 la construction d’une gare ferroviaire permit l’essor d’un tourisme bourgeois en provenance de Paris. L’avènement des congés payés en 1936 a rebattu les cartes et fait du Tréport la station balnéaire populaire qu’elle demeure aujourd’hui encore. Il faut dire que ses plages de galets sont parmi les plus belles de France. Bon par contre l’eau est souvent franchement fraiche, pour pas dire glaciale. Je sais de quoi je parle j’y ai passé la plus part de mes vacances entre l’âge de 7 ans et celui de 20 ans. C’est même au Tréport qu’à 18 ans j’ai validé mon BAFA.

Et durant toutes mes jeunes années je n’y ai jamais vu le moindre avion militaire, au grand maximum des avions de tourisme qui fréquentaient les proches terrains d’aviation d’Ault et de Dieppe. C’est dire si je suis un peu jaloux des témoins de ce survol dimanche dernier.

Malgré une saison estivale bien avancée il y avait encore foule sur les plages normandes en cette fin de matinée. Aussi quand un Dassault-Breguet ATL-2 Atlantique de la Marine Nationale a surgi au-dessus de la falaise de craie beaucoup ont été surpris. Certains ont même été apeurés puisque plusieurs appels téléphoniques au 17 (le numéro d’alerte police gendarmerie en France) ont été enregistrés. Pas de meeting aérien dans le coin, pas de base militaire à proximité, ce gros bimoteur (turbopropulsé) a fait un effet bœuf à la plus part des vacanciers présents sur les plages du Tréport. D’autant que l’avion militaire est demeuré près d’une minute visible de tous avant de s’éloigner.

Mais que faisait cet avion de patrouille maritime à plus de 400 kilomètres de son nid de la Base d’Aviation Navale bretonne de Lann-Bihoué ? Selon la Marine Nationale il s’entraînait. On peut aussi considérer qu’avec la très stratégique centrale nucléaire de Penly, une de celles fournissant l’électricité pour Paris et sa région, à treize kilomètres de là son équipage faisait son job en surveillant et en protégeant nos sites sensibles de la menace extérieure. D’autant que les eaux des plages du Tréport sont celles de la Manche, une des mers les plus utilisées de la planète pour le trafic commercial international.

Ce survol du Tréport et surtout la réaction de certains vacanciers illustrent bien le nécessaire travail de pédagogie qu’ont à faire les services de l’État auprès du grand public. Et en premier lieu le ministère des Armées afin de préparer les Français à la présence régulière au-dessus de leurs têtes d’aéronefs militaires. Les pouvoirs publics nous rebattent les oreilles depuis des mois de la nécessité pour les populations civiles de se préparer à un futur conflit de haute intensité. Ce qui s’est passé dimanche dernier en Normandie démontre qu’il y a encore du travail à faire !

Photo © Marine Nationale