Nation mineure de l’aéronautique l’Iran est surtout connue pour sa capacité à développer des aéronefs, pilotés ou télépilotés, à partir de machine existant déjà. Son chasseur Saeqeh et son hélicoptère Shahed 278 dérivent par exemple d’appareils américain tandis que sa munition rôdeuse Shahed 136 a pour origine un drone allemand. Ce ne sont là que trois exemples parmi tant d’autres. Un des plus récents est le premier avion de transport tactique construit localement et très fortement tiré d’un avion ukrainien : le HESA Simourgh.
Les premières études pour un avion de transport tactique iranien remontent au milieu des années 1990. Quelques plans furent élaborés avant que le programme ne soit enterré, étant jugé trop onéreux et trop complexe pour les ingénieurs du régime des mollahs. L’Iran avait subi une vaste fuite des cerveaux après la révolution islamique de 1979. Pourtant l’idée demeurait dans la tête des dirigeants de l’avionneur étatique HESA.
En 2008 ils réussirent à arracher un partenariat avec l’avionneur ukrainien Antonov afin de construire localement l’An-140 de transport régional. On parlait alors d’un avion purement commercial, sans vue militaire. Il fut désigné IrAn-140. Il permit de relancer pas mal de lignes aériennes régulières intérieures ainsi que des liaisons internationales court-courriers avec l’Irak et le Koweït. HESA et Antonov s’accrochaient pourtant sur un point : faire de l’IrAn-140 un avion de transport tactique. C’était hors de question pour l’avionneur ukrainien, détenteur des droits industriels. Téhéran contourna cela en achetant vingt exemplaires pour plusieurs services étatiques comme la police ou les Gardiens de la Révolution. Cela entraîna une brouille entre l’Iran et l’Ukraine, et la fin en 2018 du programme commun.
Quand en février 2022 la Russie a décidé d’attaquer et d’envahir partiellement l’Ukraine l’Iran fut un des premiers régimes au monde à soutenir le Kremlin. Téhéran avait toujours en travers de la gorge la dispute autour de l’IrAn-140. En fait les Iraniens espéraient bien que les Russes ramènent Antonov à de meilleures considérations. La question ne se posa jamais puisque l’avionneur ukrainien ne tomba pas entre les mains de la Russie. Le plan iranien tombant à l’eau il fut décidé chez HESA d’aller plus loin. Le programme Simourgh fut ainsi lancé comme une version officiellement «100% iranienne» de l’IrAn-140.
C’est le 19 mai 2022 que l’avionneur HESA officialisa le programme. Fondamentalement le Simourgh était un Antonov An-140 doté d’une avionique locale sur lequel une rampe de chargement arrière avait été installée. L’Iran n’ayant aucune capacité en terme de motorisation aéronautique c’est une fois encore la Russie qui fut appelée à la rescousse.
L’assemblage du premier prototype fut lancé en décembre de la même année et ses essais de roulage eurent lieu en avril 2023. Le 30 mai 2023 le prototype du Simourgh réalisait son premier vol.
L’extrême rapidité de développement de l’avion s’expliquent par le fait que l’HESA avait conservé les plans et chaînes d’assemblage de l’IrAn-140 et que le Simourgh, malgré la propagande officielle, en était un dérivé à plus de 80%. Les seules vraies nouveautés étaient la rampe de chargement arrière, la motorisation uniquement russe, et la planche de bord écrite en iranien. La campagne d’essais en vol se déroula jusqu’à l’automne 2024 et se termina par une commande officielle de onze avions aussi bien pour l’Islamic Republic of Iran Air Force que pour l’Islamic Republic of Iran Army et l’Islamic Republic of Iran Navy.
Le premier HESA Simourgh est officiellement entré en service en septembre 2025. Il ne s’agissait pourtant pas d’un avion de série, mais juste du prototype qui avait été repeint. Particularité notable il semble que l’avion était inapte au transport de fret ou encore aux opérations au profit des troupes aéroportées. En gros c’était un avion de transport de personnels. Les trois suivants étaient annoncés pour 2026 et le dernier pour le premier semestre 2027. Leur fonction première est de remplacer les vieux Fokker F.27 acquis du temps du shah et désormais totalement obsolètes. Ce sera d’ailleurs à partir de 2027 la même chose pour l’armée et la marine iraniennes qui doivent elles aussi se séparer au plus vite de leurs bimoteurs turbopropulsés d’origine néerlandaise.
En 2025 HESA a annoncé réfléchir à une version de patrouille maritime et de recherches et sauvetages en mer tout en proposant le Simourgh aux alliés de l’Iran. Il se dit que la Corée du Nord y verrait une opportunité de remplacer ses deux derniers Antonov An-24 Coke datés des années 1970. Dans le même temps un partenariat avec la Russie est envisagée, elle qui dans les années 2000 s’était intéressée à l’An-140. Il faut néanmoins relativiser ces perspectives d’exportations car on parle ici de l’Iran, un pays à la capacité industrielle de l’aéronautique très limitée. Ce sera déjà sans doute un exploit si HESA réussit à construire avant 2030 les onze avions de la commande initiale.
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