À l’instar de l’automobile et du cinéma, nés tous deux à peu près à la même époque qu’elle, l’aviation fut rapidement universelle. La quasi totalité des pays développés d’Europe s’y essaya, avec plus ou moins de réussite. En Europe septentrionale ce fut notamment le cas de la Lituanie qui sous l’impulsion de l’ingénieur et chef de guerre Antanas Gustaitis permit à son pays de sortir de l’ombre. Sa première véritable réussite fut le monoplan d’entraînement Karo ANBO III.
Après avoir mis au point un premier monoplan d’entraînement à aile basse appelé ANBO I et demeuré à l’été de prototype Gustaitis se lança dans le développement d’un avion plus conventionnel. Il pensa à un appareil là aussi dédié aux fonctions d’écolage mais possédant désormais une aile haute dite parasol. Antanas Gustaitis avait, comme nombre de pilotes européens de l’époque, approché les productions française de Morane-Saulnier. Il comptait s’en inspirer. Son avion reçut la désignation d’ANBO II.
Animé par un petit moteur Walter NZ60 à cinq cylindres en étoile d’une puissance de 60 chevaux le Karo ANBO II était de conception assez simple. Il était assemblé en bois entoilé et disposait d’un train d’atterrissage classique fixe. Avec une masse à vide de 278 kilogrammes et à charge d’à peine 550 kilogramme cet avion école était un poids plume. Il fut officiellement essayé en vol à l’automne 1927. Si les pilotes civils louèrent sa légèreté les militaires de leur côté le trouvèrent trop peu stable. Ils demandèrent à Gustaitis de revoir sa copie.
Plutôt que de repartir de zéro comme entre l’ANBO I et l’ANBO II l’ingénieur lituanien choisit de développer une version améliorée du second. Baptisé ANBO III le nouvel avion était clairement une évolution de son prédécesseur. Il avait été fortement renforcé, son architecture avait été réétudiée. Seule sa voilure demeurait en bois entoilé, son fuselage et son empennage étant désormais en bois et contreplaqué. Le moteur Walter NZ60 de 60 chevaux d’origine laissa la place à un Mars Mk-I à neuf cylindres en étoile du même motoriste mais développant cette fois 145 chevaux. De ce fait le train d’atterrissage fut remplacé par un modèle beaucoup plus récent. Après un premier vol survenu en novembre 1929 l’avion fut commandé par la Lietuvos Karinės Oro Pajégos, l’aviation militaire lituanienne, à hauteur de dix exemplaire dont le prototype.
Les Karo ANBO III entrèrent en service en août 1931. Pas fondamentalement révolutionnaires ni particulièrement en pointe technologiquement parlant ces monoplans parasols étaient pourtant parfaitement adaptés aux besoins de la Lietuvos Karinės Oro Pajégos. Ils permettaient d’assurer aussi bien la formation de base qu’intermédiaire des pilotes lituaniens. À la fin de l’année 1932 l’état-major demanda à Antanas Gustaitis de travailler sur une versions spécifiquement dédiée aux missions d’entraînement intermédiaire afin de renforcer la future flotte d’ANBO V. Le futur avion reçut la désignation d’ANBO VI.
Celui-ci était en fait un ANBO III sur lequel le train d’atterrissage et l’empennage avaient été revus et corrigés. Des travaux de motorisations avaient eu lieu, avec des tests autour de l’Armstrong Siddeley Mongoose britannique à cinq cylindres en étoile et les Continental R-670 à sept cylindres en étoile et Curtiss R-600 à six cylindres également en étoile tous deux américains. Désigné ANBO VI il vola finalement avec le Curtiss R-600 mais ne fut produit qu’à trois exemplaires en plus de celui de présérie.
Quand en septembre 1939 les forces soviétiques envahirent la Lituanie, au titre du pacte Ribbentrop-Molotov signé avec les nazis, la Lituanie faisait encore voler la très grande majorité de ses Karo ANBO III et ANBO VI. Ils assuraient non seulement l’entraînement initial et intermédiaire mais également des missions de liaisons et de vaguemestre. L’aviation soviétique en réquisitionna la quasi totalité. Malheureusement pour elle ne put jamais les faire voler, ils avaient été saboté par des mécaniciens restés fidèles au pouvoir lituanien démocratiquement élu. De ce fait l’URSS n’employa jamais aucun de ces avions d’entraînement.
S’il ne reste de nos jours plus aucun Karo ANBO III et ANBO VI une réplique du prototype ANBO II vole depuis 2016. Elle se produit régulièrement dans des meetings aériens en Europe du Nord. L’ANBO III reste dans l’histoire lituanienne comme le premier avion de conception indigène à avoir été produit en série.
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