Giovanni « Gianni » CAPRONI

Giovanni Baptista Caproni est né le 3 juillet 1886 dans le petit village de Massone dans le Trentin. Cette province est alors rattachée à l’empire austro-hongrois et de ce fait il est élevé avec à la fois la langue italienne mais aussi l’allemand. Issu d’une famille de la noblesse terrienne locale le jeune Caproni apprend également le français et obtient de bonnes bases en anglais. Élève brillant, quoi que rêveur et assez aventurier, il est diplômé ingénieur à l’âge de 21 ans d’une école sise à Munich en Allemagne. L’année suivante en 1908 Gianni Caproni rejoint Liège où il se spécialise dans l’ingénierie électrique. Au contact du savant roumain d’origine française Henri Coandă il commence à s’intéresser à l’aviation naissante.

Son nouveau mentor l’emmène alors à Paris où Gianni Caproni rencontre Clément Ader et Alberto Santos-Dumont. Il se lie d’amitié avec Louis Blériot, et suit les préparatifs de son historique vol trans-Manche. Accompagné de Henri Coandă le jeune ingénieur italien est même présent quand l’aviateur français décolle d’un hameau proche de Sangatte.
Quelques semaines plus tard dans l’euphorie de la réussite de son ami il rentre en Italie et fonde sa société éponyme et crée son premier appareil : le biplan expérimental Ca.1.
N’ayant pas les moyens d’embaucher un pilotes d’essais Giovanni Caproni prend lui même les commandes de l’aéroplane. Il lui permet de défricher bien des aspects de la conception aéronautique tout en suivant les conseils de Henri Coandă ou encore les enseignements de sa proximité avec Blériot.

À la fin de l’année 1914 alors que la Première Guerre mondiale vient d’éclater Giovanni Caproni choisit le camp de l’Italie et donc de la Triple Entente. Après s’être assuré que sa famille a pu se mettre à l’abri hors du Trentin il se lance dans le développement d’un premier avion militaire auquel il donne la désignation de… Caproni Ca.1. Pourtant celui-ci n’a rien à voir avec l’avion expérimental de 1910. Surtout ce bombardier lourd est le premier bimoteur conçu et construit en série en Italie. Dès lors Caproni va mettre son génie au service du conflit. Son Ca.5 apparu en 1917 figure même parmi les bombardiers les plus réussis de la guerre, toutes nations confondues.

L’immédiat après-guerre lui permet, comme à d’autres en France ou en Grande Bretagne, de se lancer dans l’aventure de l’aviation commerciale naissante. Et comme ses concurrents c’est en transformant des bombardiers qu’il crée les premiers avions de ligne. Son Ca.48 dérivé du Ca.4 est d’ailleurs le tout premier avion de transport de passagers conçu et construit en Italie. Le Trentin étant revenu à l’Italie au lendemain du Traité de Versailles de 1919 Giovanni Caproni y ouvre des locaux de son entreprise.
Depuis la France où il vit Henri Coandă lui conseille de nommer en 1922 son frère ainé Federico Caproni directeur financier de l’entreprise. L’ingénieur roumain sait à quel point son ami est un concepteur génial mais un économiste raté. Il craint pour son avenir. Il voit juste car Federico Caproni est un homme d’affaires né.

Avec l’émergence du régime fasciste Giovanni Caproni comprend très vite qu’il va devoir revenir à l’aviation militaire. Si son frère Federico adhère très vite aux théories politiques extrémistes de Benito Mussolini l’ingénieur lui demeure plus circonspect, voire même méfiant vis-à-vis des fascistes.
À la même époque les ingénieurs Enrico Piaggio, fils de Rinaldo Piaggio fondateur de l’avionneur du même non, et Luigi Nardi font pression sur le régime fasciste pour écarter Caproni des contrats officiels. Ces fervents fascistes l’accusent d’avoir des amitiés avec des juifs italiens. Dans la réalité Gianni Caproni est franc-maçon et absolument tout sauf antisémite. Il entretient donc bien des amitiés avec ses personnes de religion hébraïque.
Conscient que l’avenir de l’entreprise est en jeu Federico pousse son frère à ouvrir des bureaux d’étude disposant d’une autonomie industrielle avérée. Ainsi naissent au début des années 1930 Caproni Bergamaschi, Caproni Campini, et Caproni Vizzola toutes rattachées à la maison mère.

Le travail de sape des ingénieurs fasciste va porter ses fruits puisque Gianni Caproni sera écarté de la majorité des grands programmes italiens de la guerre, se contentant de réaliser de très bons avions de reconnaissance comme le Ca.309 ou encore le surprenant trimoteur de transport Ca.133. Au milieu d’une production italienne globalement considérée comme moyenne les avions développés par Caproni se distinguent toujours pas leurs qualités de vol et de finitions.
De par ses amitiés avec des ingénieurs américains et britanniques il s’assure que ses entreprises ne soient pas détruites quand elles tombent en 1943 entre les mains des Alliés. Ses ouvriers demeurent en poste, même si une vingtaine est déportée en Allemagne pour faits d’intelligence avec l’ennemi. Ces hommes n’en reviendront jamais.

Un temps inquiété à l’été 1945 suite à de fausses accusations de collaboration avec Mussolini Giovanni Caproni entre dans la clandestinité pour éviter la prison alors synonyme de procès bâclés et de peloton d’exécution. Il en ressort blanchi au début de l’année 1946 mais fortement affaibli psychologiquement et médicalement. Sa société n’est alors plus que l’ombre d’elle-même. Il prend sa retraite en 1948 et se concentre alors sur des œuvres caritatives, notamment en faveur des victimes de la Shoah.
Ce grand fumeur décède finalement le 27 octobre 1957 des suites d’un cancer des poumons. il est incinéré et ses cendres sont déposées dans le caveau familial de Massone. Gianni Caproni avait 71 ans.

Les hommages sont alors unanimes. La plus part des grands avionneurs salue celui qui fut un précurseur de l’aviation et un des pères de l’aéronautique civile commerciale. Depuis 1983 il est inscrit à l’International Air & Space Hall of Fame, véritable Panthéon de l’aviation mondiale.
Le dernier avion Caproni, le C.22 Ventura demeuré expérimental, a volé pour la première fois en 1980.