Douglas O-31

L’entre-deux-guerres fut une période faste pour l’industrie aéronautique américaine, particulièrement pour celle à destination des militaires. Elle passa des balbutiements où elle se trouvait après la Première Guerre mondiale à un outil de très haut niveau, et ce dans à peu près toutes les catégories d’avions et d’hydravions. Le recueil du renseignement était même devenu une des spécialités américaines avec des machines autant destinées à la reconnaissance pure qu’à l’observation du champ de bataille. Dans cette seconde catégorie un avion permit, de par ses deux évolutions principales, une belle progression dans les connaissance du domaine : le Douglas O-31.

Au tournant des années 1930 l’US Army Air Corps a plusieurs fournisseurs d’avions d’observation. Pourtant le principal est alors la société Douglas grâce à ses biplans O-32 et O-38. Pourtant elle emploie à côté de ceux là des avions en passe d’être obsolètes comme les Douglas O-2 dont découlent les deux modèles précédemment cités mais aussi l’amphibie monomoteur Loening OA-1/OA-2, ou encore le décevant Consolidated O-17 récemment entré en service. C’est pour remplacer tout ces modèles que l’US Army Air Corps proposa un programme visant au développement d’un nouveau modèle unique.
Douglas y répondit bien entendu avec un avion désigné XO-31, mais également Curtiss avec ses XO-18 et XO-30 , Keystone avec son XO-15, Thomas-Morse et le XO-19, ou encore Vought et le XO-28. La compétition fut âpre mais tourna très vite à l’avantage de Douglas et de Thomas-Morse. Alors que les autres avionneurs étaient peu à peu éliminés les deux survivants se virent chacun crédité d’une commande pour deux prototypes. L’ordre arriva fin janvier 1930.

Alors que le Thomas-Morse XO-19 était un très académique biplan à train classique et moteur en étoile le Douglas XO-31 jouait à fond la carte de l’originalité avec sa voilure monoplan parasol. Cette technologie était alors peu utilisée aux États-Unis, bien plus en Allemagne et surtout en France. Le XO-31 en outre était animé par un moteur à douze cylindres en V Curtiss V-1570 Conqueror. Le prototype vola en septembre 1930.
Finalement à l’issu des essais en vol c’est Thomas-Morse qui emporta le marché. Pour autant l’US Army Air Corps demanda à Douglas de persévérer dans son idée d’un monoplan parasol d’observation. Plusieurs autres exemplaires dont cinq Y1O-31 de présérie furent commandés et testés par les militaires américains. Un unique Douglas O-31B entra en service à Noël 1930. Désarmé il assurait des missions de transport d’état-major depuis une base aérienne située en périphérie de Washington DC. Il s’agissait là d’une très maigre consolation.
Pendant ce temps là les Thomas-Morse O-19 volaient eux aux côtés des Douglas O-25, O-32, et O-38. C’était le règne des biplans d’observation !

Les équipes de Douglas ne perdaient pas confiance et en 1931 elles proposèrent à l’armée une version élaborée à partir du dernier Y1O-31 et baptisé Y1O-43. L’aile parasol était désormais contreventée octroyant une meilleure pénétration de l’air, une portance plus importante, et surtout une meilleur visibilité pour l’équipage. L’empennage avait de ce fait été redessinée. Devant la réussite des ingénieurs de l’entreprise l’US Army Air Corps décida de commander en série un lot de vingt-trois Douglas O-43 destinés prioritairement au remplacement des Consolidated O-17.
Les premiers exemplaires de série entrèrent en service actif au cours du premier trimestre 1934.

Au sein de l’arsenal américain composé principalement de biplans et de monoplans à ailes basses cantilever le Douglas O-43 et sa voilure parasol détonnaient. Pourtant à l’usage l’US Army Air Corps et la National Guard qui les faisaient voler ne tarissaient pas d’éloge sur cette machine. Agréable à piloter, permettant des prises de vue efficaces, et pouvant même opérer en zone subtropicale l’O-43 était un avion idéal. Le déploiement entre fin 1934 et fin 1935 de trois machines sur le canal de Panama permit de cocher toutes les cases des cahiers des charges. Un vingt-quatrième avion fut produit, cette fois sur fonds propres. Les ingénieurs de Douglas voulaient proposer une version dotée du moteur en étoile Pratt & Whitney R-1535-7 Twin Wasp Junior en lieu et place du Curtiss V-1570 Conqueror. L’avion passait ainsi de 675 à 730 chevaux. Les résultats des essais en vols furent remarquables.

L’US Army Air Corps décida de passer une première commande pour soixante-et-onze exemplaires de la nouvelle machine. Elle fut désignée Douglas O-46. Lorsque les premiers exemplaires de série arrivèrent en unité en mai 1936 les militaires revirent leur commande, à la hausse. Dix-neuf machines supplémentaires furent acquises afin de remplacer les derniers biplans Douglas O-38. Mieux encore, en avril 1937 quand les derniers exemplaires de série sortirent d’usines ils commencèrent à remplacer des Thomas-Morse O-19 que l’O-43 avait commencer à ringardiser. La boucle était bouclée.
À la toute fin des années 1930 pourtant l’arrivée de modèles d’observation plus avancés comme les Curtiss O-52 et North American O-47 envoyèrent définitivement à la retraite les derniers O-43. Quand aux O-46 encore en état de vol ils furent scinder en deux groupes. Une petite moitié affectée à l’entraînement avancé des équipages d’avions d’observation et une plus grosse moitié versée à des unités de seconde zone, notamment autour du golfe du Mexique ou encore dans l’archipel d’Hawaï.

En 1940 après avoir effacé les Bellanca YO-50 et Ryan YO-51 le Stinson O-49 fut officiellement acquis pour succéder au Douglas O-46. Pour autant des retards industriels firent que lorsque le Japon attaqua les États-Unis le 7 décembre 1941 la moitié des parasols d’observation volait encore. Certains furent même employés contre les forces nippones quelques jours plus tard lors de la contre-attaque aux Philippines. Obsolètes ils se firent balayés lors de leur seul et unique engagement au combat.
Au 1er mars 1942 les derniers Douglas O-46 furent officiellement rayés des cadres de l’US Army Air Corps. Huit jours plus tard il devenait US Army Air Force et les avions d’observation disparaissaient au profit des avions de liaisons.

Les Douglas O-31, O-43, et O-46 sont représentatifs de ces atermoiements doctrinaux très présents dans l’aviation militaire. Jamais exportés ils furent pourtant très important dans l’histoire de leur constructeur : sa première et unique expérience dans la construction en série d’une famille d’avions parasols à vocation militaire.
De nos jours un Douglas O-46 est préservé au sein des collections de la Smithsonian Institut à Washington DC marquant ainsi l’intérêt historique de cette machine.