Peu d’aéronefs sont aussi méconnus que les avions-radars. Sous ce vocable, on considère généralement les avions ayant pour fonction de porter haut et loin la capacité de détection d’un radar de surveillance aérienne. Tous ont pour rôle d’observer l’activité de l’espace aérien d’un ennemi ou bien une puissance étrangère. Si à l’origine les nations pouvant se payer des avions-radars se comptaient sur les doigts d’une seule main il en est tout autrement actuellement, grâce notamment à des plateformes conçus et construites spécialement pour les besoins de puissances moindres. Parmi ces avions-radars de nouvelle génération est apparu au début du 21ème siècle un nouveau biréacteur américain : le Gulfstream Aerospace G550CAEW.
À la différence de la majorité des avions américains le Gulfstream Aerospace G550CAEW ne tire pas ses origines d’un programme du Pentagone mais d’une volonté de l’état d’Israël de disposer d’une plateforme de surveillance radar aéroportée permettant de combler ses lacunes en la matière. En effet Heyl Ha’Avir ne possédant à la fin des années 1990 que deux Boeing 707 modifiés localement par IAI et directement inspirés du Phalcon. L’état-major israélien désirait donc acquérir un nouveau type d’avion, plus léger, pour les assister.
Un protocole d’accord fut passé en 2005 entre IAI et l’avionneur américain Gulfstream Aerospace afin que ce dernier fournisse deux jets d’affaire G550, une version améliorée du GV, connu notamment comme C-37A dans les rangs des forces américaines. À la même époque les deux parties étaient déjà engagées dans la transformation de trois avions de cette dernière série en Gulfstream Shavit, des avions-espions chargés de missions de surveillance électronique pour les besoins là encore de Heyl Ha’Avir.
L’accord fut rapidement entériné par le Congrès américain.
En fait le futur avion-radar devait emporter le radar israélien à antenne active EL/W2085 disposant d’une antenne réseau à commande de phase. Cette technologie permet notamment d’éviter le recours à un rotodôme comme sur le Grumman E-2C Hawkeye américain. Surtout ce nouveau radar israélien permet de traiter et de poursuivre entre quatre-vingt-dix et cent cibles en même temps dans un rayon de 350 à 375 kilomètres autour de la zone de patrouille de l’avion-radar.
Les premiers essais statiques du nouvel avion, désigné donc Gulfstream Aerospace G550CAEW, commencèrent en janvier 2008. Il s’agissait notamment de valider les systèmes de détection aéroportée mais aussi les tests aérodynamiques réalisés en soufflerie sur diverses maquettes. Il faut dire qu’extérieurement le nouvel avion avait perdu beaucoup de la finesse légendaire des jets d’affaire Gulfstream. Dorénavant il ne pouvait plus cacher son rôle purement militaire.
Dans son architecture générale le Gulfstream Aerospace G550CAEW conserve les grandes lignes des avions d’affaires du constructeur : monoplan à aile basse en flèche, de construction mixte métal et composites, propulsé par deux réacteurs fixés à l’arrière du fuselage (ici des Rolls-Royce BR710CA-11 d’une puissance nominale de 6975kgp) et empennage en T. Pour le reste la cabine a été largement réaménagée. Au revoir le luxueux aménagement à destination des riches clients de l’aviation d’affaire, en lieu et place l’avion emporte entre trois et quatre consoles pour les membres d’équipages. Par ailleurs les antennes du radar EL/W2085 sont installées dans divers bosselages répartis entre les flancs du fuselage, le nez, la queue, et même les extrémités de voilure, sous les winglets.
C’est dans cette configuration le G550CAEW a réalisé son premier vol à la fin de l’année 2009.
Ensuite une série d’essais en vol a été réalisée principalement aux États-Unis, pour des raisons de sécurité, mais aussi en conditions réelles en Israël. Finalement le premier G550CAEW de série a été déclaré opérationnel par Heyl Ha’Avir en avril 2012 sous le nom de baptême de Eitam. Le second a suivi six mois plus tard, ce qui fit que fin 2012 l’état hébreu pouvait se targuer de posséder deux des plus modernes avions radars du moment.
Rapidement il devint évident que le Gulfstream Aerospace G550CAEW se présentait comme une alternative plus économique aux lourds Beriev A50 russes et Boeing E767 américains. Pour autant le petit biréacteur se heurtait à une concurrence existant déjà sur le marché, notamment de la part de l’avionneur brésilien Embraer et de son E-99. Malgré cette optique le G550CAEW fut lancé sur le marché international.
Le premier contrat export certainement actuellement le plus intéressant économiquement puisqu’il concerne quatre exemplaires du Gulfstream Aerospace G550CAEW. Signé en 2007, alors même que le premier avion n’était même pas encore assemblé, il concerne la Republic Of Singapore Air Force. Cette dernière recherchait alors un modèle d’avion-radar capable de prendre la succession de ses Hawkeye en service depuis le début des années 1980, et usés jusqu’à la corde. Le premier de ces quatre avions entra en service opérationnel au début de l’année 2013, la dotation complète en G550CAEW singapourien étant réelle à l’été 2016.
Le deuxième contrat concernait l’Italie qui acheta deux exemplaires pour les besoins de l’Aeronautica Militare Italiana. En fait il s’agissait d’une concession faite aux Israéliens en échange de la fourniture de trente avions d’entraînement M-346 Master. Le premier des deux G550CAEW italiens est entré en service en décembre 2016, le second étant attendu pour la fin de l’année 2017.
Mais le contrat le plus étonnant est celui signé par l’US Navy à l’automne 2015 et portant sur la livraison à l’horizon 2018 pour un G550CAEW. Non pas que la marine américaine envisage d’utiliser ce biréacteur pour remplacer ses Hawkeye embarqués mais plus pour des missions de télémétrie radar. Selon plusieurs sources l’avion devrait entrer en service sous la désignation de Gulfstream NC-37B. Il semble qu’en plus du radar EL/W2085 il emportera des systèmes de facture américaine.
Pour autant les commerciaux de chez Gulfstream Aerospace et IAI ne se reposent pas sur leurs lauriers. Des pourparlers étaient en cours au printemps 2017 avec divers clients, notamment asiatiques et européens en vue de poursuivre ce qui ressemble bien à un succès à l’export pour le G550CAEW.
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