Ces deux semaines durant lesquelles Donald Trump n’avait plus aucune emprise sur ses forces armées !

L’information est juste extraordinaire pour quiconque connait un minimum les réalités institutionnelles des États-Unis. Le célèbre journaliste américain Robert Woodward révèle dans son dernier livre d’investigation que le général Mark Milley lui aurait déclaré avoir décidé au soir du 6 janvier 2021 de refuser tout ordre militaire émanant de Donald Trump, alors Président des États-Unis. Dès lors ce dernier n’avait donc plus aucun commandement possible sur les six commandements de l’US Department of Defense. La nouvelle a fait l’effet d’une bombe médiatique outre-Atlantique.

Ce n’est pas pour le Washington Post dont il demeure un des piliers grâce à d’excellents éditos réguliers que Bob Woodward a obtenu les confidences de celui qui était déjà CJCS (pour Chairman of the Joint Chiefs of Staff) mais pour son dernier bouquin titré «Peril».
Le général Mark Milley, qui demeure actuellement patron des forces armées américaines, explique qu’au soir du 6 janvier 2021 il décide d’exiger de tous ses généraux et amiraux de ne plus exécuter les ordres émanant de la Maison-Blanche sans lui en avoir auparavant rendu compte. Désormais donc Donald Trump n’a plus aucun mainmise sur l’US Army, l’US Navy, l’US Air Force, l’US Marines Corps, l’US Special Operations Command, et l’US Coast Guard. Il n’est donc plus vraiment Commander in Chief. Cela pourrait ressembler à un coup d’état contre celui qui était alors encore pour deux semaines à la tête de la première puissance militaire mondiale.

En fait c’est tout l’inverse. En empêchant Donald Trump de déclencher n’importe quel conflit à quatorze jours de l’investiture de Joe Biden le général Milley entend protéger les institutions fédérales américaines d’un président qu’il considère alors comme inapte à diriger le pays.

Mais au fait pourquoi Mark Milley a t-il attendu cette date du 6 janvier 2021 ? Tout simplement parce qu’à la mi-journée Donald Trump avait harangué ses électeurs et militants en les poussant à marcher sur le Capitole. Deux heures plus tard ils prenaient littéralement d’assaut le cœur du parlementarisme américain, sous les regards choqués de la planète toute entière. Quand les policiers et militaires réussirent à reprendre le contrôle de la situation quatre émeutiers étaient morts ainsi qu’un policier. Ce dernier a littéralement été massacré par les soutiens de celui qui dirigeait encore le pays.
Plus de 600 émeutiers furent interpellés, beaucoup sont en attente de leur procès.

Comme beaucoup le CJCS est donc profondément heurté par ces images et par la réaction de Donald Trump. Et c’est là qu’il prend la décision de squizzer totalement le Président des États-Unis de toute décision relative aux opérations militaires autant qu’au renseignement. Il en informe la NSA et la CIA mais pas la Maison-Blanche. Jusqu’au bout Trump croira qu’il demeure Commander in Chief.

Woodward va plus loin en annonçant que Milley lui a déclaré avoir personnellement téléphoné dans la même soirée du 6 janvier au général Li Zuocheng. Il s’agit rien moins que de son homologue à Pékin, commandant en chef des forces armées chinoises. Il tenait à le rassurer sur des rumeurs faisant état d’une possible chute de l’administration américaine et des forces armées des États-Unis. Dans le même temps le CJCS s’entretenait avec Nancy Pelosi, la puissante présidente démocrate de la Chambre des Représentants et ennemie politique numéro 1 de Donald Trump.

Jusqu’au 20 janvier 2021 donc Milley a fait croire à Donald Trump que tout se passait pour le mieux dans le meilleur des mondes. Candide président américain que voilà. Il n’avait en fait plus aucun pouvoir sur les militaires depuis deux semaines.

N’importe quel autre journaliste américain aurait pu écrire un tel livre, honnêtement je n’y aurai prêter aucun intérêt. Mais il s’agit de Bob Woodward. C’est tout sauf un faiseur de fake news. Rappelons-nous que l’homme révéla à seulement 30 ans l’un des pires scandales de l’histoire américaine : le Watergate qui aboutit le 9 août 1974 à la démission du Président des États-Unis Richard Nixon.
On ignore actuellement si «Peril» sera ou non traduit en français.

Photo © US Air Force

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ARTICLE ÉDITÉ PAR
Arnaud
Arnaud
Passionné d'aviation tant civile que militaire depuis ma plus tendre enfance, j'essaye sans arrêt de me confronter à de nouveaux défis afin d'accroitre mes connaissances dans ce domaine. Grand amateur de coups de gueules, de bonnes bouffes, et de soirées entre amis.
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Commentaires

7 réponses

  1. @Arnaud, ce n’est pas très aéronautique comme sujet là! 🙂
    Mais c’est un sujet à débat, perso, même si je n’apprécie pas du tout le personnage de Trump ni sa façon de gouverner, même si certaines de ses décisions ont eu des conséquences positives (mais là c’est un autre sujet), je trouve que le général Milley avait dépassé ses fonctions exécutant et avait mis les pieds dans la politique, même s’il avait raison dans le fond (question sécurité nationale), je suis étonné que Biden, et je pense qu’il est au courant de la chose, ne l’a pas écarté de ce poste.

  2. Dire que le général Milley a déchu Trump de son attribution de ‘Commander in chief’ est aller un peu vite en besogne. Il a simplement demandé de le consulter avant d’agir. D’un point de vue technique, il n’a pas désobéi ni perpétré un coup d’état. C’est précisément pour empêcher Trump d’en commettre un qu’il a réuni son état-major. Et je peux le comprendre pour avoir suivi de près le déroulement des 4 dernières années de politique américaine. Trump a démontré au-delà du raisonnable son mépris des institutions, des lois et des us et coutumes de la politique américaine et internationale.
    Politico et CNN mentionnent même un ordre de Trump qui n’est pas passé par les canaux habituels et qui exigeait le retrait des forces américaines du bourbier afghan avant le 15 janvier de cette année. Le danger était et est toujours bien réel. Trump restera dans l’histoire comme le fossoyeur des démocraties car ses actions dépassent de loin le strict cadre des États-Unis.
    Revenons à l’aviation, c’est moins triste.

  3. « quatre émeutiers étaient morts ainsi qu’un policier. Ce dernier a littéralement été massacré par les soutiens de celui qui dirigeait encore le pays. »
    Franchement, le policier est mort d’un AVC en rentrant chez lui… C’est Officiel ! Tapez juste « décès policier capitole » dans un moteur de recherche..

    1. C’est rigolo Palou c’est exactement la théorie des Three Percenters et de leurs potes QAnon. Sauf que le dit policier est bien mort sur place, dans le Capitole. Et non il n’y vivait pas.

      1. Avec tout le respect que je vous dois, Arnaud, ainsi qu’à ce pauvre policier, il semble que Palou n’ait pas entièrement tort, voyez ici un article du Monde d’avril dernier : https://www.lemonde.fr/international/article/2021/04/20/etats-unis-le-policier-decede-apres-l-assaut-du-capitole-est-mort-de-causes-naturelles_6077357_3210.html

        Le policier n’est pas mort chez lui mais dans le Capitole le soir des événements ; il n’empêche que la cause de ces AVC ne semble pas être liée aux émeutes d’après l’autopsie.

  4. Merci Arnaud de nous faire partager votre passion et tout votre savoir en aéronautique.
    Quant à ce qui s’est passé pendant la fin du mandat du grand guignol à la chevelure improbable : il est rassurant de constater que la démocratie américaine ,meme si cela s’est fait par des moyens détournés et exceptionnels , a parfaitement bien réagi dans de telles circonstances sans précédent se retrouvant avec un commander in chief ne disposant plus manifestement de toutes ses capacités mentales si du moins il en possédait depuis sa lamentable investiture ?

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