Cessna XMC

On a souvent l’impression que concevoir et fabriquer des avions de tourisme relève d’une simplicité absolue et ne demande pas beaucoup de travaux d’ingénierie. Si c’est vrai que les recherches et développement sont généralement bien moins poussées que sur des avions de combat ou même des avions de ligne croire que penser un avion de tourisme est à la portée de tous est une erreur. Certains avionneurs en ont fait leur spécialités au point même de se lancer dans l’étude et l’emploi de bancs d’essais destinés à valider des concepts novateurs. Le plus fameux d’entre eux nous vient des États-Unis : le Cessna XMC.

À la toute fin des années 1960 les responsables de l’avionneur Cessna eurent l’idée d’étudier les futures formes que pourraient prendre les avions de tourisme à l’horizon 1980. Leur idée était alors qu’un avion lancé à cette époque volerait encore en l’an 2000, un horizon alors particulièrement encore lointain. Chez Cessna on voulait étudier les possibilités d’avenir sans pour autant se renier sur les fondamentaux. L’idée était donc de concevoir un avion à aile haute particulièrement novateur. Afin de noyer le poisson et de se garder de l’espionnage industriel des concurrents américains et européens le programme reçut en 1970 le nom d’Experimental Magic Carpet ; le tapis volant expérimental dans la langue de Beaumarchais et de Molière. L’avion destiné à ce chantier de recherche reçut la désignation constructeur de Model 1014 avant d’être officiellement nommé XMC, les initiales du programme.

Afin de minimiser les risques financiers plusieurs éléments non novateurs de l’avion furent prélevés sur d’autres appareils. La planche de bord et le manche à balai provenait d’un Cessna 140 tandis que le moteur Continental O-200B à quatre cylindres à plate de 100 chevaux était similaire à celui équipant alors le biplace d’entraînement Cessna 150. Ce dernier d’ailleurs offrit aussi au XMC son train d’atterrissage tricycle fixe. Pour le reste le nouvel avion était réellement inédit. Son moteur d’abord avait été placé de manière à entraîner une hélice propulsive (tournant vers l’arrière de l’avion) qui devait à terme être carénée de manière à donner naissance à une soufflante comme sur le Bell X-22 lui aussi expérimental. La voilure bien que traditionnellement haute chez Cessna avait été profondément revue et corrigée afin d’adopter un profil cantilever en flèche tandis que l’empennage double dérive n’était pas sans rappeler le bimoteur push-pull Cessna 337. Le pilote et son passager prenaient place dans un cockpit biplace côte à côte largement vitré.

L’une des techniques que Cessna éprouva dans l’assemblage de son XMC fut le collage des métaux sur le fuselage et les ailes ainsi que l’emploi de matières plastiques à certains endroits. Ces derniers, déjà très employés alors en France et en Grande Bretagne, en étaient encore à l’ébauche dans l’aviation de loisirs aux États-Unis. C’est sous l’immatriculation civile provisoire N7174C que le prototype réalisa son premier vol le 22 janvier 1971. Et tout ne se passa pas comme prévu. D’abord selon le pilote d’essais maison Bruce Barrett le bruit de l’hélice propulsive était assourdissant en cabine, faisant même trembler les sièges. Heureusement il était seul à bord pour ce vol inaugural. Ensuite l’aile haute cantilever en flèche présentait un défaut majeur : l’avion était plus que délicat à faire atterrir. Ce qui était préjudiciable à Cessna omniprésent dans les écoles de pilotages aux USA et en Europe occidentale. Deux vols d’essais supplémentaires eurent lieu avec cette fois un ingénieur d’essais en guise de passager. Les résultats furent sans appel et confirmèrent les premières impression de Barrett.

Le Cessna XMC retourna en atelier et ressortit sous la forme du Model 1034 sur lequel le carénage de soufflante fut déposé. Et ô miracle en juin 1972 à la reprise des vols l’avion se révéla plus facile à prendre en main et nettement moins bruyant. Le souci de l’aile haute en flèche demeurait lui totalement entier. Bruce Barrett réalisa un total de onze vols d’essais avec le XMC version Model 1034. Si l’emploi de plastiques et de métaux collés se révéla un succès celui d’une hélice propulsive et d’une aile en flèche s’avéra vraiment bien moins évident. Quelques jours avant Noël 1972 les dirigeants de Cessna prirent la décision de stopper cette campagne d’essais. Le XMC fut cloué au sol, définitivement.

Selon toutes vraisemblances c’est après quatre années de stockage, en 1976, que le Cessna XMC a été démoli. Il ne reste donc plus rien de lui. En 2006 des ingénieurs de l’avionneur ont déclaré que le retour d’expériences de cette machine avait été très utile dans la mise au point du Model 162 Skycatcher.