S’il est passablement retombé aujourd’hui dans l’oubli général, hors les passionnés d’aviation ou d’histoire militaire, le nom de Nieuport fut synonyme pendant plus de 25 ans d’excellents chasseurs. C’est durant la Première Guerre mondiale que cette réputation naquit. Les chasseurs Nieuport étaient connus pour leur robustesse, leur manœuvrabilité, et aussi leur aspect compact. Sa première réussite fut un biplace de reconnaissance rapidement modifié en monoplace de chasseur : le Nieuport X.
C’est au printemps 1914 que l’ingénieur Gustave Delage pensa le Nieuport X comme biplan… de course. L’Europe n’était alors pas encore à feu et à sang et des compétitions aéronautiques étaient organisées. Dans le cas de cet avion il s’agissait de la coupe Gordon-Bennett remporté l’année précédente par l’aviateur Maurice Prévost sur monocoque Deperdussin Monocoque. Le prototype fut assemblé début juin 1914. Ironie de l’Histoire c’est le jour où il réalisa ses essais de roulage que l’archiduc d’Autriche Franz Ferdinand von Habsburg-Lothringen fut assassiné à Sarajevo. Le jeu des alliances diplomatiques et militaire entraîna l’Europe dans un conflit encore inégalé : la Première Guerre mondiale. Le coupe Gordon-Bennett fut annulé. Delage proposa alors de militariser le Nieuport X.
Transformer un monoplace de course en biplace de reconnaissance et d’observation ne fut pas si difficile que cela. C’est donc en configuration d’avion militaire que le Nieuport X réalisa son premier vol, en juillet 1914. Pourtant dans les premières semaines du conflit les généraux français ne voulurent pas entendre parler de lui. Ils le trouvaient trop petit, et finalement inadapté à la fonction de reconnaissance, d’observation, et de réglage des tirs d’artilleries. Ils lui préférèrent les Caudron G.III et Farman MF-7 Longhorn jugés plus stables. Deux modèles qui étaient aussi plus lents et moins manœuvrables. En fait Nieuport ne dut la survie de son biplan qu’aux Britanniques. Le Royal Naval Air Service passa commande à Noël 1914 pour un premier lot de vingt-quatre Nieuport X. L’avion était alors proposé en deux versions le Nieuport X AV et le Nieuport X AR, pour respectivement arrière et avant suivant la position de l’observateur vis-à-vis du pilote. Le RNAS sélectionna la seconde version.
L’achat britannique réveilla les généraux français qui choisirent de commander à leur tour le même nombre d’exemplaires mais en Nieuport X AV. Les premiers exemplaires entrèrent en service dans les deux pays en janvier 1915. Et très vite la petitesse de l’avion fit son succès. Si les équipages se plaignaient fréquemment de crampes musculaires à bord ils louaient surtout sa vitesse et sa manœuvrabilité à même de les mettre à l’abri des avions allemands.
Aussi dès le début du printemps 1915 apparut le Nieuport X C1. De biplace d’observation le biplan était devenu monoplace de chasse. La mitrailleuse avait été fixée sur plan supérieur de voilure. Il s’agissait d’une Hotchkiss de calibre 7.9 millimètres sur les modèles français et d’une Lewis de 7.7 millimètres sur ceux destinés aux pilotes britannique.
Déployés dans les premières véritables unités de chasses britanniques et françaises les Nieuport X faisaient un carton, dans tous les sens du terme. Ils surclassaient par leur vitesse et leur manœuvrabilité tout ce que l’Allemagne développait. Et très vite cette version de chasse attira les pays étrangers. En Italie la société Macchi, créée par Nieuport elle-même, lança sa chaîne d’assemblage tout comme Dux en Russie. Des Nieuport X C1 furent aussi achetés par la Belgique, le Portugal, la Roumanie, et la Serbie. Pourtant l’apparition de modèles plus récents comme le Nieuport XI, le fameux Bébé développé à partir de lui en réduisant ses dimensions générales, eut comme impact immédiat de le ringardiser. Dès l’automne 1915 le nombre d’exemplaires commandés fondit comme neige au soleil.
Dès lors une troisième carrière s’ouvrit à lui. Après avoir été biplace d’observation et de reconnaissance, puis monoplace de chasse, le Nieuport X devint monoplace d’entraînement avancé. Il allait former les pilotes. C’est d’ailleurs dans ce rôle qu’il vola le plus longtemps puisque des Nieuport X E servaient encore au début de l’année 1918. Outre les pilotes britanniques et français ils permirent d’entraîner ceux du corps expéditionnaire des États-Unis.
Première véritable réussite de l’avionneur Nieuport ce biplan donna naissance, outre le Nieuport XI Bébé, à l’avion d’entraînement Nie.83 ou encore à un triplan expérimental. Actuellement au moins deux Nieuport X sont préservés, mais pas en France. Le premier est exposé Museo Nazionale della Scienza e della Tecnica Leonardo da Vinci de Milan en Italie et le second à l’Old Rhinebeck Aerodrome de Red Hook sur la côte est des États-Unis. Pour la petite histoire c’est un Nieuport qui remporta la coupe Gordon-Bennett quand celle-ci fut rétablie en 1920, un chasseur Ni-D 29 modifié. La revanche du Nieuport X !
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