Il y a un siècle Alcock et Brown vainquaient l’Atlantique nord.

Célébrer un centenaire n’est pas anodin en aviation et celui-ci est essentiel. Le dimanche 15 juin 1919, soit il y a exactement 100 ans les aviateurs britanniques John Alcock et Arthur Brown faisaient atterrir leur bimoteur biplan Vickers Vimy en Irlande. Partis un peu plus de 16 heures auparavant de l’île canadienne de Terre-Neuve ils venaient de réaliser le premier transatlantique en avion de l’Histoire. Nous étions alors huit ans avant le célèbre vol de Charles Lindbergh.

À la différence de ce dernier qui relia la côte est des États-Unis à la France, soit l’une des liaisons les plus longues en Atlantique nord, les deux aviateurs britanniques allèrent au plus court. Et pour cela ils avaient préparé leur vol.

Alcock et Brown n’étaient d’ailleurs pas les premiers à traverser l’Atlantique nord par les airs, mais ils furent les premiers à le faire en avion… et sans escale. Quelques jours avant eux le commandant Albert Read avait lui réalisé un vol entre Minaola dans la banlieue sud de New York et le port anglais de Plymouth avec ses hydravions à coque Curtiss NC. Moyennant quatre escales il avait relié l’Amérique du nord à la Grande Bretagne en deux semaines, du 16 au 31 mai 1919.

Les Britanniques eux ont une autre idée : utiliser un bombardier Vimy spécialement modifié, et évidemment désarmé, pour traverser l’océan d’une traite. Pas d’escale pour eux, ils n’auraient pas su où se poser d’ailleurs. Et ce modèle de biplan bimoteur leur semble être l’avion idéal pour franchir les 3500 kilomètres qui selon eux séparent la côte est de Terre-Neuve du comté de Mayo, leur cible. À se demander si ces deux aviateurs savaient lire une carte !!! Ils pensent alors mettre 18 heures pour réaliser cet exploit, sachant également qu’à la moindre erreur de leur part c’est la mort qui les attend.

Tout commence le mercredi 28 mai 1919, alors que Read et ses équipiers sont encore en vol. Le Vimy est débarqué d’un navire en provenance d’Angleterre sur les quais du port de Saint-Jean de Terre-Neuve. Il faut quelques jours aux équipes de Vickers qui l’accompagne pour le remonter et tester ses deux moteurs Rolls-Royce Eagle d’une puissance unitaire de 360 chevaux. Et enfin le samedi 14 juin 1919 l’avion est fin prêt, l’équipage bien à sa place à son bord. Il s’élance !

La première moitié du vol se déroule sans encombre mais à mi-distance l’avion se heurte à une puissante dépression. Des vents très forts et beaucoup de pluie frappent l’avion et anéantissent le moral de l’équipage. Mais Alcock et Brown n’ont pas le choix il leur est impossible de faire demi tour, ils n’auraient plus assez de carburant pour rentrer au Canada. Soit ils continuent soit ils s’abîment dans l’Atlantique nord. Les deux solutions sont aussi périlleuses l’une que l’autre dans la nuit. Alors ils poursuivent leur route. Aux alentours de 6 heures 45 du matin Brown aperçoit des goélands, ils savent désormais qu’ils touchent au but. Mais pour eux ils sont trop en avance sur leur temps.

En fait la dépression qu’ils ont traversé les a littéralement poussés au cul. Ils ont gagné environ 300 kilomètres en se détournant d’un peu plus d’un degré et demi de leur route. Résultat à 8 heures du 40 matin ils se posent à Clifden dans le comté de Galway, ou plutôt c’est ce que l’Histoire retiendra. Car dans la réalité des faits ils se sont franchement vautrés dans une tourbière particulièrement humide. Leur Vimy s’est même mis en pylône. Pour autant Alcock et Brown s’en sortent miraculeusement sains et saufs.
Au final ils sont plus au nord que leur objectif initial. Mais surtout ils ont finalement parcouru 3185 kilomètres. L’Atlantique nord a été vaincu, sans escale, et avec un avion.

Il existe deux écoles sur le temps mis par les deux aviateurs pour réaliser leur exploit. Certains disent qu’ils ont mis 15 heures et 57 minutes et d’autres disent qu’ils ont mis 16 heures et 12 minutes. Une différence de seulement un quart d’heure qui a son importance. Même si je fais partie de la seconde, en fait les deux ont raison. Le premier est celui durant lequel le Vimy est réellement resté en vol au-dessus de l’Atlantique nord tandis que le second est celui entre le moment où le train d’atterrissage quitte le plancher des vaches au Canada et celui où l’avion touche le sol irlandais.

Malheureusement pour eux Alcock et Brown n’ont jamais eu la célébrité d’un Lindbergh alors même que leur vol était aussi culotté et courageux. Au final les passionnés d’aviation savent bien qu’eux aussi ont gagné leur pari au moment où personne n’envisageait qu’un siècle plus tard les cieux de l’Atlantique nord ressembleraient à une véritable autoroute des airs. Le Vimy a formidablement ouvert la route à ce que les Airbus A350 et Boeing 787 Dreamliner font désormais dans la plus totale indifférence.

Photo © San Diego Air & Space Museum.


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Arnaud
Passionné d'aviation tant civile que militaire depuis ma plus tendre enfance, j'essaye sans arrêt de me confronter à de nouveaux défis afin d'accroitre mes connaissances dans ce domaine. Grand amateur de coups de gueules, de bonnes bouffes, et de soirées entre amis.
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Commentaires

4 Responses

  1. Le verbe vaincre à l’imparfait n’est pas terrible terrible pour les oreilles lors de la prononciation ! Mais bon nous sommes sur un site aéronautique et non en cours de diction en prélude à l’harmonie des mots hi hi hi !

    1. C’est vrai que ce n’est pas terrible mais c’est grammaticalement juste. Et très sincèrement mon vocabulaire ne me donnait pas d’autre verbe utilisable. 😉

      1. La traversée en avion ne durant pas des lustres, on pouvait utiliser le passé simple: vainquirent. Au final on s’en fiche de mes taquineries, l’important étant votre rappel d’un exploit.

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