Ce jeudi 27 novembre 2025 le traditionnel, et quotidien, ravivage de la flamme du soldat inconnu sera placé sous l’égide de l’Armée de l’Air et de l’Espace. Ce sera là le point d’orgue des commémorations du 80ème anniversaire du Transport Aérien Militaire, fondé au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Point de défilé aérien pour l’occasion, pas le moindre avion de transport tactique au-dessus de l’Arc-de-Triomphe. L’Armée de l’Air et de l’Espace fait le service minimum.
Mise en place de la cérémonie à 17 heures 30 devant le célèbre monument parisien et ravivage à 18 heures 30. Un quart d’heure plus tard tout sera plié. Emballez c’est pesé, on passe à autre chose. Voilà comment en novembre 2025 l’Armée de l’Air et de l’Espace traite sa composante de projection de forces au moment de ses 80 ans. Ah si j’oubliais il y aura une remise de breloques au Cercle des Armées, en petit comité.
Vous auriez aimé que des avions de transport tactique, de transport léger, voire des hélicoptères puissent survoler les Champs-Élysées après le ravivage ? Bah non. Bon en même temps fin novembre à Paris à cette heure là il fait nuit et on n’aurait rien vu d’aucun de ces avions, hormis leurs feux. Pourtant en 80 ans d’existence le transport aérien militaire en a fait des choses, et aux quatre coins du monde.

D’abord si vous l’appelez encore CoTAM (pour Commandement du Transport Aérien Militaire) ou même CFAP (pour Commandement de la Force Aérienne de Projection) je ne saurais que trop vous conseiller de vous mettre un chouïa à la page. C’est un peu comme si vous disiez encore Armée de l’Air et non Armée de l’Air et de l’Espace. C’est dépassé ! Aujourd’hui on parle de BAAP pour Brigade Aérienne d’Appui et de Projection ; laquelle est intégrée au sein du Commandement des Forces Aériennes ou CFA. Oui oui les aviateurs adorent les acronymes et initiales.
Particularité notable mais qu’il est toujours bon de rappeler les avions de ravitaillement en vol ne lui sont pas rattachés, ils appartiennent au Commandement des Forces Aériennes Stratégiques ou CFAS.
Donc pour faire simple en 80 ans le transport aérien militaire français est passé du bricolage de l’après-guerre à une des flottes les modernes et efficaces de l’Union Européenne et de l’OTAN même si celle-ci est encore perfectible. À sa naissance ses principaux avions s’appellent Amiot AAC-1 Toucan, Caudron C.440 Goéland, ou encore Douglas C-47 Skytrain. Et ces avions vont symboliser des débuts tonitruants avec notamment un pont aérien afin de mâter l’insurrection malgache entre mars 1947 et novembre 1948. Les bases sont posées le transport aérien militaire va devenir un outil de lutte contre les mouvements anticolonialistes. Il faut acheminer troupes et matériels. Et deux avions de transport français vont véritablement symboliser cet effort contre les aspirations de liberté des peuples occupés et opprimés par la France : le Breguet Br.765 Deux-Ponts et surtout le Nord N.2501 Noratlas. Avec le Douglas C-54 Skymaster d’origine américaine ils vont servir en Indochine puis en Algérie, notamment en larguant des parachutistes sur les zones de combat.

Après la guerre d’Algérie l’Armée de l’Air va faire muer son aviation de transport militaire vers quelque chose de plus en adéquation avec l’époque. Désormais la menace est clairement à l’est. Les avions n’auront donc pas besoin d’une allonge très importante puisqu’il faudra aller se battre en Allemagne de l’Est ou bien dans les plaines de Hongrie et de Tchécoslovaquie. C’est alors l’avènement des bimoteurs turbopropulsés Nord N.262 Frégate et surtout de la merveille franco-allemande Transall C.160. Cet avion à lui seul va représenter le transport aérien militaire français durant un demi siècle. Ses forces en matière de polyvalence et de robustesse et surtout sa faiblesse numéro 1 : le rayon d’action définitivement trop court. Faute de moyens stratégiques l’Armée de l’Air fera alors sienne l’emploi d’avions de ligne, d’abord avec le quadriréacteur américain Douglas DC-8 puis avec le biréacteur européen Airbus A310 et le quadriréacteur A340.
Les années 1990 seront celles de la fin de la guerre froide et du début des conflits asymétriques contre les groupes terroristes djihadistes alors que dans le même temps on se bat en Europe. La Yougoslavie se disloque. Et elle ne le fait pas pacifiquement. Nos avions de transport sont là encore mis à contribution avec notamment le digne remplaçant du Noratlas et de la Frégate : le Casa CN-235 espagnol. Les Lockheed C-130H/H-30 Hercules d’origine américaine viennent eux aussi combler des manques, mais toujours en nombre insuffisant. Il faudra attendre le 21ème siècle et l’apparition de l’Airbus Military A400M Atlas pour que l’Armée de l’Air puis l’Armée de l’Air et de l’Espace dispose enfin d’un outil high tech totalement adapté. Les années 2010-2020 vont voir une petite révolution : le transport aérien militaire va enfin disposer de ses propres avions-citernes. Malheureusement ils ne seront jamais en nombre élevés. On parle ici des Lockheed-Martin KC-130J Super Hercules qui volent, aux côtés de C-130J/J-30, au sein du seul escadron de transport binational au monde. Il est franco-allemand et stationne en Normandie. Tout un symbole.

Faire le tour des opérations du transport aérien militaire des 80 dernières années en quelques lignes est forcément un gabegie. J’aurais aussi pu parler de l’intervention à Kolwezi au printemps 1978 ou encore à Ouvéa dix ans plus tard sans compter la guerre du Golfe de 1990-1991. En fait nos aviateurs spécialistes du transport sont allés partout où la France avait besoin d’eux. De même parler des 80 dernières années du transport aérien sans indiquer que la France possède des avions de transport léger et en a toujours posséder serait une grave erreur. Les plus anciens se souviendront des De Havilland Canada DHC-2 Beaver et Max Holste MH.1521 Broussard et les plus jeunes des De Havilland Canada DHC-6 Twin Otter et Socata TBM-700. Une catégorie d’aéronefs enfin n’existait pas dans l’Armée de l’Air il y a 80 ans et est pourtant omniprésente dans le transport aérien de 2025 : les voilures tournantes.

Des Sikorsky H-19 et Piasecki H-21 américains d’origine ont succédé les Sikorsky H-34 puis sont apparus les hélicoptères de facture française. Et deux machines ont marqué leur époque : les Aérospatiale SA.316B Alouette III et SA.330B Puma. Si la première n’y est plus qu’un lointain souvenir, remplacée depuis longtemps par le très efficace Eurocopter AS.555 Fennec, le second devrait tirer sa révérence dans les semaines à venir. Qui alors pour remplacer l’increvable Puma ? Simple l’Eurocopter EC-725 Caracal et son petit frère l’Airbus Helicopters H225M ont été pensé pour cela et acheté dans cette optique.
Pur produit de la Vème République, portant clairement la marque gaullienne, la mission de transport de hautes personnalités revient aussi à l’Armée de l’Air et de l’Espace et à son transport aérien militaire. Si les Sud-Aviation Caravelle et Dassault Mystère XX ont disparu depuis longtemps les Airbus A330, Dassault Aviation Falcon 900 et Falcon 7X ont largement su reprendre le flambeau tandis que le transport héliporté est assuré sur Aérospatiale AS.332 Super Puma, des hélicoptères qu’il faudra bientôt remplacer puisqu’ils datent tout de même du second quinquennat de François Mitterrand. Donc du siècle dernier. Point intéressant : dès lors que le Président de la République se trouve à bord d’un avion ou d’un hélicoptère de transport de l’Armée de l’Air et de l’Espace celui-ci prend l’indicatif de Cotam Unité. Cotam comme Commandement du Transport Aérien Militaire tel qu’il existait entre les années 1960 et 1990. Comme quoi chez nos aviateurs les traditions perdurent, même en cette fin d’année 2025.

Voilà vous en savez désormais un peu plus sur ces 80 ans du transport aérien militaire français que notre Armée de l’Air et de l’Espace célèbre à minima, sans faire de vague. Décidément en France on a beau faire de grands discours, entendre tout le spectre politique, de la gauche à la droite en passant par les extrêmes dire tout le bien qu’ils pensent des armées quand il faut saluer un anniversaire marquant il n’y a plus personne. Bizarrement je ne suis même pas surpris. Peut-être que le ministère des Armées va rectifier le tir pour les 400 ans de la Marine Nationale puis les 100 ans de l’Armée de l’Air et de l’Espace. On verra bien.
Photos © Armée de l’Air et de l’Espace & Service Historique des Armées.
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