Dewoitine D.520

Fiche d'identité

Appareil : Dewoitine D.520
Constructeur : Société Aéronautique Dewoitine
Désignation : D.520
Nom / Surnom :
Code allié / OTAN :
Variante :
Mise en service : 1940
Pays d'origine : France
Catégorie : Chasseurs de la guerre 39-45
Rôle et missions : Chasseur monoplan

Sommaire

“ trop tardif pour empêcher l'invasion de la France ”

Histoire de l'appareil

Le Dewoitine D.520 occupe une place singulière dans l’histoire de l’aviation militaire française, tant par ses qualités techniques que par les conditions historiques dans lesquelles il fut conçu, produit et engagé. Avion emblématique de la débâcle de 1940, il incarne à la fois le sursaut technologique de l’industrie aéronautique nationale à la veille de la Seconde Guerre mondiale, et les limites structurelles du réarmement français face à la montée en puissance de la Luftwaffe. Sa carrière, étalée sur toute la durée du conflit, se caractérise par une multiplicité d’usages et de nationalités opératrices, reflet des bouleversements géopolitiques et des circonstances d’occupation de la France.

Dès 1936, dans un contexte où les chasseurs en service dans l’Armée de l’air, tels que les Morane-Saulnier MS.406 ou Bloch MB.152, apparaissaient déjà en retrait face aux progrès allemands symbolisés par le Messerschmitt Bf 109, Émile Dewoitine, ingénieur et entrepreneur, initia de sa propre initiative l’étude d’un nouveau chasseur monomoteur à moteur en ligne. L’appareil, désigné D.520, devait répondre à une demande pressante : offrir à la France un intercepteur capable de rivaliser avec les performances croissantes des appareils allemands. S’inspirant d’une architecture moderne — monoplan à aile basse, cockpit fermé, train d’atterrissage escamotable —, Dewoitine conçut un avion aérodynamiquement soigné, propulsé par un moteur Hispano-Suiza 12Y-31 de 860 chevaux, dont la conception permettait une montée en puissance future.

Le premier prototype du D.520 prit l’air le 2 octobre 1938 à Toulouse-Montaudran. Il fut suivi au printemps 1939 d’un second appareil modifié. Les performances enregistrées s’avérèrent prometteuses : vitesse maximale de 530 km/h, bonne maniabilité et comportement équilibré en vol. Les tests démontrèrent notamment une vitesse ascensionnelle remarquable et une excellente stabilité à haute vitesse, qualités cruciales dans les combats tournoyants. Bien que quelques défauts initiaux furent identifiés — notamment un manque de refroidissement moteur et une motorisation encore modeste —, ils furent partiellement corrigés dans les machines de pré-série. La validation du type déclencha une première commande officielle de 200 exemplaires, laquelle fut ultérieurement portée à 1200 unités.

Cependant, la mise en production du D.520 révéla la faiblesse de l’appareil industriel français. À la date critique du 10 mai 1940, correspondant au déclenchement de l’offensive allemande à l’Ouest, seulement 36 exemplaires avaient été livrés et mis en service. Seul le Groupe de Chasse I/3 volait alors sur l’appareil, ce qui était notoirement insuffisant pour contrer l’aviation ennemie. Malgré tout, l’avion se distingua rapidement par ses performances opérationnelles : durant les six semaines de la campagne de France, il revendiqua la destruction de 147 appareils ennemis pour 85 pertes, un ratio largement supérieur à celui obtenu par les autres chasseurs français contemporains. Face au Bf 109E, il s’avérait inférieur en vitesse ascensionnelle mais supérieur en maniabilité et agilité en virage. Ces combats soulignèrent son efficacité comme intercepteur défensif, mais aussi les limites imposées par le nombre réduit d’exemplaires disponibles.

Construit dans plusieurs usines réparties entre Toulouse, Bordeaux et Marignane, le D.520 fut maintenu en production après l’armistice du 22 juin 1940 sous l’autorité du gouvernement de Vichy. Jusqu’en novembre 1942, date de l’occupation de la zone libre par les Allemands, environ 437 appareils supplémentaires furent produits. Cette continuité industrielle, rare dans le contexte de la France occupée, s’expliquait par l’utilité de l’avion pour la surveillance aérienne coloniale, mais aussi par la volonté allemande d’exploiter un appareil performant. Une centaine d’exemplaires, capturés ou réquisitionnés par la Luftwaffe, furent affectés à des écoles de chasse en Allemagne et en Tchécoslovaquie. Plus notable encore, environ 60 unités furent transférées à la Regia Aeronautica italienne, où ils furent intégrés aux Gruppi 13, 22, 24 et 167, chargés de la défense aérienne de Naples et du centre de l’Italie. Malgré leur statut secondaire dans l’ordre de bataille italien, ces appareils participèrent effectivement à des missions d’interception contre les raids alliés.

Sur le plan structurel, le D.520 affichait un fuselage métallique semi-monocoque, une aile en trois parties rivetées autour d’un longeron principal et une configuration classique monoplace. Son train d’atterrissage rétractable et sa verrière coulissante témoignaient d’un souci de modernité. L’appareil était armé d’un canon Hispano-Suiza HS.404 de 20 mm tirant à travers le moyeu de l’hélice, accompagné de deux mitrailleuses MAC 1934 M39 de 7,5 mm dans chaque aile. Ce standard d’armement, bien supérieur à celui des premiers chasseurs français de la guerre, lui permettait d’endommager sérieusement les bombardiers allemands. L’autonomie restait en revanche limitée, avec un rayon d’action opérationnel inférieur à 800 km, inadapté à des missions d’escorte prolongée.

En 1944, dans le cadre de la reprise des combats contre les troupes allemandes repliées sur la façade Atlantique, plusieurs unités françaises furent rééquipées avec des D.520 saisis. Le Groupe de Chasse 1/8, formé dans cette optique, disposait d’une quarantaine d’appareils. Si ces machines ne pouvaient prétendre se comparer aux P-51 Mustang, Focke-Wulf Fw 190 ou Spitfire Mk IX, elles se révélèrent utiles pour des missions de harcèlement, de reconnaissance et d’appui léger. Le D.520 y fit montre d’une robustesse certaine et d’une fiabilité mécanique encore acceptable en dépit de son obsolescence relative.

Au total, 907 exemplaires du Dewoitine D.520 furent construits entre 1939 et 1944. Parmi eux, environ 403 furent livrés avant l’armistice de juin 1940. Les autres, produits sous l’égide du régime de Vichy ou repris ensuite par les Allemands, illustrent une carrière d’une rare continuité dans le paysage aéronautique français. Il fut l’un des très rares appareils conçus avant-guerre à connaître une utilisation ininterrompue durant toute la durée du conflit, bien que dans des rôles déclassés ou annexes au fur et à mesure de l’évolution des standards.

Le retrait progressif du service du D.520 s’effectua dès 1945, avec la rééquipement des escadrilles françaises en matériels américains plus modernes. Quelques exemplaires subsistèrent toutefois dans des centres d’entraînement jusqu’au tout début des années 1950. Aujourd’hui, plusieurs cellules ont été préservées et restaurées en exposition statique dans les musées français, notamment au Musée de l’Air et de l’Espace du Bourget. Un exemplaire restauré à l’état de vol, propriété du Conservatoire de l’Air et de l’Espace d’Aquitaine, a longtemps participé à des meetings aériens, témoignant du haut niveau de finition et de l’élégance aérodynamique qui caractérisèrent l’appareil.

Chasseur au destin contrarié mais jamais effacé, le Dewoitine D.520 demeure le symbole de ce que l’industrie aéronautique française aurait pu accomplir si les conditions politiques et industrielles de la fin des années 1930 avaient été réunies pour le porter à pleine maturité. Sa silhouette racée et ses performances, à défaut d’avoir pu changer le cours des combats, conservent une place particulière dans la mémoire aéronautique nationale.


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Photos du Dewoitine D.520

Caractéristiques techniques

Modèle : Dewoitine D.520
Envergure : 10.18 m
Longueur : 8.76 m
Hauteur : 2.56 m
Surface alaire : N.C.
Motorisation : 1 moteur Hispano-Suiza 12Y en V
Puissance totale : 1 x 910 ch.
Armement : 1 canon de 20 mm
4 mitrailleuses de 7.7mm
Charge utile : -
Poids en charge : 2780 kg
Vitesse max. : 529 km/h à 6000 m
Plafond pratique : 11000 m
Distance max. : 998 Km
Equipage : 1
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Profil couleur

Profil couleur du Dewoitine D.520

Plan 3 vues

Plan 3 vues du Dewoitine D.520
Fiche éditée par
Image de Gaëtan
Gaëtan
Passionné d'aéronautique et formateur en design graphique, il est le fondateur, en 1999, de l'encyclopédie de l'aviation militaire www.avionslegendaires.net. Désormais principalement administrateur et créateur des affiches de la boutique, il vous fait partager ses avis et coups de coeur (ou de gueule) sur l'actualité aéronautique.
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Vidéo du Dewoitine D.520

Le dernier vol d'un Dewoitine D.520 en juillet 1986