La période entre 1945 et 1975 est connue en France sous le chrononyme de «30 glorieuses» tant l’activité économique y fut florissante après les années de disette de la Seconde Guerre mondiale. C’est notamment l’industrie qui se relança en profondeur, avec deux secteurs en particulier : l’automobile et l’aéronautique. Dans ce second cela prit notamment la forme d’une production tant civile que militaire extrêmement riche avec des machines construites en grande série à l’image des légendaires Dassault Mirage III et Sud Aviation SA.316 Alouette III. Pourtant comme dans toute période d’euphorie il y eut des échecs, des aéronefs qui ne dépassèrent pas le stade du prototype. L’un des plus significatifs était un petit monomoteur à turbopropulseur : le SIPA S.251 Antilope.
Au début des années 1960 ces mêmes «30 glorieuses» avaient fait revenir l’aviation française de loisirs à un niveau équivalent à celui du mouvement de l’Aviation Populaire initié en 1936 par Pierre Cot. L’activité des aéro-clubs était en plein boom. De ce fait les constructeurs d’avions de tourisme connaissaient une période faste. Le Robin DR-100 était alors la référence tricolore avec les avions américains produits par Beechcraft, Cessna, et Piper.
Après son échec sur le S.1000 Coccinelle construit à seulement trois exemplaires la SIPA tenta de se relancer avec un projet des plus ambitieux : concevoir un avion de tourisme et de transport d’affaire léger doté d’un turbopropulseur en lieu et place de l’habituel moteur à pistons. L’avionneur français entendait également proposer son futur appareil au ministère de la défense nationale.
Le programme reçut la désignation de S.251 Antilope. Le turbopropulseur choisi était de conception française : le Turboméca Astazou X de 665 chevaux. Dérivé du turbomoteur Astazou II équipant l’hélicoptère SE.313 Alouette II celui-ci entraînait une hélice tripale en métal conçu et usiné en France par Ratier-Figeac.
Pour le reste le S.251 Antilope était un concentré de technologie de son temps : aile basse cantilever, construction métallique avec éléments en matière plastique, train d’atterrissage tricycle escamotable à assistance électrique, et une avionique comparable à celle des premiers jets d’affaire. Clairement la SIPA visait le marché très haut de gamme.
C’est sous l’immatriculation provisoire F-WJSS que le prototype du SIPA S.251 Antilope réalisa son premier vol le 7 novembre 1962. Les essais en vol furent réalisés par des pilotes et ingénieurs de l’entreprise mais avec le concours du Centre d’Essais en Vol. Ainsi les militaires français eurent la possibilité de voir de plus près cet avion qui les intriguait tant.
L’Armée de l’Air et l’Aviation Légère de l’Armée de Terre ne mirent pas longtemps à formuler une demande d’informations autour de lui. En parallèle la DGAC lui délivra sa certification de type en avril 1964.
Manœuvrable, rapide, sûr, le S.251 Antilope était de l’avis même des pilotes d’essais un avion plaisant à piloter.
D’autant qu’il remporta plusieurs records mondiaux dans la catégorie des avions de tourisme à turbopropulseur. Une catégorie alors bien petite qui lui permit de s’imposer six fois entre 1964 et 1966. En janvier 1965 notamment il remporta celui des cent kilomètres à une vitesse moyenne de 135 kilomètres heures à pleine charge. Pour autant l’avenir s’assombrit pour lui quand l’ALAT puis l’Armée de l’Air lui tournèrent le dos, le prix unitaire de la version de série S.2510, étant jugé trop élevé par les militaires.
Finalement il fut décidé en 1968 d’arrêter le programme du S.251 Antilope. L’avion ne serait jamais produit en série, et ne dépassa donc pas le stade expérimental. Quelques mois plus tard la SIPA disparaissait, absorbée par la toute nouvelle société Aérospatiale. L’avion fut alors remisé dans un hangar, attendant le funeste sort de la plus part des prototypes.
Pourtant cela n’eut pas lieu. Le seul et unique SIPA S.251 Antilope fut sauvé par les bénévoles de l’Association Antilope sise sur l’aéroport de Montpellier. L’avion expérimental a rejoint leur collection dans laquelle on trouve également un Max Holste MH-260 ou encore un SOCATA TB-30 Epsilon. Dernier avion développé par la SIPA le S.251 Antilope était sans doute un avion arrivé trop tôt sur un marché sur lequel les avions à moteurs à pistons régnaient en maîtres absolus, à l’image des Morane-Saulnier MS.880 Rallye et Wassmer WA.40.
En savoir plus sur avionslegendaires.net
Subscribe to get the latest posts sent to your email.