Giora EPSTEIN

Giora Epstein est né le 20 mai 1938 à Negba en Palestine sous mandat britannique. Ses parents étaient agriculteurs. Bon élève il se passionne dès son enfance, durant la Seconde Guerre mondiale, pour l’aviation. Une base de la Royal Air Force jouxte alors le kibboutz où vivent ses parents et il va régulièrement voir décoller et atterrir les De Havilland Mosquito et Supermarine Spitfire. En 1944 à l’âge de 6 ans il décide que plus tard il sera pilote de chasse. Ses parents voient en lui un futur agriculteur. Élève brillant il réalise une scolarité exemplaire jusqu’à ses 18 ans, année où il doit réaliser son service militaire.

Esptein est appelé sous les drapeaux et demande à servir comme cadet de Heyl Ha’Avir. Malheureusement pour lui une commission le juge inapte aux vols à cause d’un souffle au cœur observé lors de la visite médicale. Il réussit alors à convaincre les militaires de le laisser rejoindre les troupes aéroportées de Tsahal. Il veut absolument faire son service militaire auprès d’avions, quitte à n’être que parachutiste. En Israël à cette époque le service dure trente-six mois. Libéré des obligations militaires à l’âge de 21 ans il retourne au kibboutz parental. La vie d’agriculteur n’est décidément pas faite pour lui, au grand dam de son père. Giora Epstein décide de rempiler.

Conscient que la commission médicale ne l’autorisera pas à piloter des jets il se rabat sur l’option des hélicoptères. Il réussit les tests et subit pendant trois ans la formation. Il début sur biplan d’entraînement élémentaire Boeing-Sterman PT-17 Kaydet, dont il dira plus tard que ce fut ses premières impressions de liberté, avant quelques heures de vol sur North Americain T-6 Texan d’entraînement intermédiaire. Ses premiers pas sur voilures tournantes se font sur Hiller 360 avant le grand saut vers la turbine et les Sud Est SE.313 Alouette II. L’hélicoptère français lui procure ses premières véritables sensations de pilote.
Affecté au Tayeset 124 il continue de rêver d’avions à réaction. À la même époque il réussit les tests mis en place par les Américains afin de former de futurs pilotes de chasses israéliens. Fort de ces bons résultats il va à la rencontre du général Weizman, à l’époque Chef d’État-Major de Heyl Ha’Avir, et le harcèle. L’homme craque devant l’insistance d’Epstein et l’affecte à la formation des pilotes de chasse.

À 25 ans il réalise enfin son rêve d’enfant. Plus jeune pilote de la formation interne de Heyl Ha’Avir Giora Epstein est, selon ses instructeurs, un aviateur de génie. Il comprend tout et assimile les données plus vite que les autres élèves. Surtout il dévore toutes les publications sur l’aviation de son temps. Sur Fouga CM.170 Magister il réalise les meilleurs scores, devançant même parfois ses instructeurs. Du fait d’une acuité visuelle jugée hors du commun il gagne l’indicatif pilote de Hawkeye, en anglais dans le texte. Après un très court passage sur Dassault Super Mystère B2 il rejoint le Tayaset 101 et vole sur l’avion de combat numéro 1 en Israël : le Dassault Mirage IIICJ !

Ses homologues pilotes voient en lui un aviateur hors du commun. Giora Epstein ne se sent libre que dans son étroit poste de pilotage. Il a des fourmis dans les doigts, il a envie de savoir de quoi son jet est capable face à l’ennemi. À 29 ans seulement, le 6 juin 1967, deuxième journée de la Guerre des Six-Jours, il engage le combat contre une patrouille de Sukhoi Su-7 Fitter égyptiens. Au canon il en descend un. C’est sa première victoire aérienne. Ce ne sera pas sa dernière. La guerre d’attrition israélo-arabe de juillet 1967 à août 1970 va lui donner l’occasion d’abattre quatre jets égyptiens supplémentaire, lui octroyant ainsi le chiffre de cinq avions détruits et donc le titre d’as. C’est là un héritage de la Première Guerre mondiale. Ces appareils sont un Mikoyan-Gurevich MiG-17 Fresco et deux MiG-21 Fishbed ainsi qu’une fois encore un Su-7 Fitter.

Du 6 au 25 octobre 1973 l’état hébreu affronte les forces égyptiennes et syriennes dans la terrible Guerre du Kippour. Giora Epstein a troqué depuis quelques semaines son Mirage IIICJ pour un I.A.I. Nesher, un avion qu’il juge au départ moins adapté à la chasse pure que sa précédente monture. Pourtant c’est bien sur lui qu’il va réaliser son plus grand nombre de victoires, le faisant entrer dans l’histoire de l’aviation. Alors que le début du conflit est pour lui synonyme de chou blanc la chance lui sourit le 19 octobre quand il descend coup sur coup deux Sukhoi Su-7 Fitter et deux Su-20 Fitter-C égyptiens. Deux d’entre eux seront ses premières victoires aux missiles air-air, lui qui jusqu’au bout préférera le canon. Le lendemain il s’octroie de nouveau, au canon et aux missiles, quatre victoires supplémentaires contre des MiG-21 Fishbed. Ces avions sont alors réputés supérieurs aux Nesher de fabrication israélienne. Le 24 octobre au matin son avion est en panne. Les mécanos indiquent à Epstein qu’il ne reste plus que deux biplaces Mirage IIIBJ d’entraînement avancé et de transformation opérationnelle. Pas de souci pour lui il connaît bien le delta de fabrication française. Il en prend un et envoie au tapis trois MiG-21 Fishbed égyptiens supplémentaires.

À la fin de la guerre Giora Epstein est non seulement le meilleur pilote de chasse israélien mais aussi celui qui dans le monde a enregistré le plus de victoires aériennes en volant sur jets. Nommé à la tête du Tayeset 117 il retrouve alors le Mirage IIICJ. En 1977 il fait valoir ses droits à la retraite et rejoint El Al en qualité de pilote de ligne sur Boeing 707 et 720. Officier de réserve il continue ses vols occasionnels, étant même transformé en 1988 à l’âge de 50 ans sur General Dynamics F-16A Fighting Falcon. Il décide finalement de ne plus voler sur avions de combat neuf ans plus tard.

Pour son 80e anniversaire l’état d’Israël le nomme général de brigade. Giora Epstein décède auprès de sa famille le 19 juillet 2025 chez lui à Ramat Ha’Sharon. Les obsèques nationales lui sont refusées du fait de ses prises de positions en faveur de la paix avec les Palestiniens.

Il est à noter que Giora Epstein est officiellement crédité de dix-sept victoires aériennes alors que lui n’en reconnaissait que seize. Il ne considérait en effet pas qu’avoir détruit en vol un hélicoptère de transport d’assaut Mil Mi-8 Hip égyptien devait être comptabilisé. Même en retirant cette victoire aérienne Epstein reste et de loin l’as des as de l’ère des avions à réaction.