Alerte maximale aux feux d’espaces naturels en Europe.

Depuis près de deux semaines la moitié nord de la France vit sous une fraicheur très inhabituelle ; c’est pourtant l’arbre qui cache la forêt… ou plutôt ce qu’il en reste. Car cet été 2025 est d’ores et déjà un des plus dramatiques dans l’Union Européenne où le mécanisme de solidarité rescUE fonctionne à plein régime. Avions et hélicoptères bombardiers d’eau se relaient aux quatre coins de notre Vieux Continent. Les équipages ne comptent pas leurs heures.

Chez nous le pire est sans doute à venir. Des alertes météos sont annoncées pour des températures caniculaires sur l’ensemble du pourtour méditerranéen. De la frontière espagnole à la frontière italienne les sapeurs-pompiers français se préparent à une semaine dantesque. Les Bouches-du-Rhône sont aujourd’hui le département sur lequel se focalisent toutes les craintes, moins d’un mois après le feu qui a frappé Marseille. L’Aude, la Drome, le Gard, ou encore le Var ne sont pas beaucoup mieux lotis. Nos équipages de Bombardier CL-415 et Dash 8 de la Sécurité Civile, ainsi que ceux des avions et hélicos des services départementaux d’incendies et de secours se préparent à un début août tonitruant.

Devant un tel cauchemar annoncé on pourrait être tenté de se dire que l’herbe est plus verte ailleurs en Europe. Et la réponse est oui mais pas autour de la Méditerranée, de l’Adriatique, et de la Mer Noire.
À Carbadella de Avia dans le sud de la Galice ce sont des sapeurs-pompiers néerlandais et portugais qui sont venus soutenir leurs collègues espagnols. Avant cela, dans la semaine passée, six pays d’Europe méridionale ont réclamé le déclenchement du mécanisme rescUE : l’Albanie, la Bosnie-Herzégovine, la Bulgarie, Chypre, la Grèce, et la Macédoine du Nord. Il est à noter que trois de ces nations ne sont pas membres de l’Union Européenne mais seulement en phase de négociations autour de leur future adhésion. Le mécanisme rescUE reposant sur la solidarité il serait difficilement compréhensible de leur refuser notre aide commune.

Ainsi en Albanie ce sont deux Canadair CL-215 grecs et trois Bombardier CL-415 (deux en provenance d’Italie et un de Croatie) ainsi que deux hélicoptères militaires Mil Mi-17 Hip-H hongrois dotés de Bambi buckets qui sont intervenus. En Bosnie-Herzégovine deux CL-415 appartenant à la Croatie voisine ont frappés les feux tandis qu’à Chypre le temps que les deux CL-415 espagnols arrivent les incendies avaient été maîtrisés. Les avions amphibies ont donc fait machine arrière après avitaillement en carburant sur l’île. En Bulgarie cinq hélicoptères bombardiers d’eau Blackhawk et H215/Super Puma (fournis par la France, la Hongrie, la République Tchèque, la Roumanie, et la Slovaquie) ont été appuyés par deux Air Tractor AT-802 en provenance de Suède. L’Italie a également envoyé en Grèce un Bombardier CL-415 et un Erikson AirCrane. En Macédoine du Nord c’est un PZL W-3A Sokol tchèque et un Eurocopter AS.532 Cougar bulgare qui ont apporté l’eau par les airs. Eux aussi reposaient leur action sur le Bambi bucket.

On sera surpris que la France ne soit pas plus engagée, au-delà d’un hélicoptère affrété Airbus Helicopters H215. En fait les autorités de l’Union Européenne savent que les moyens de la Sécurité Civile sont actuellement en flux tendus avec plusieurs départs de feux quotidiens, parfois distants de plusieurs centaines de kilomètres de la base de Nîmes. Nous payons ici le refus ministériel d’en ouvrir une seconde, dans les Landes. N’oublions pas qu’il y a trois ans c’est Paris qui appelait à l’aide ses partenaires européens, lors du mégafeu de Landiras. Et aux vues des prévisions pour les jours et semaines à venir il m’est d’avis que les pilotes croates, espagnols, italiens, et portugais ont intérêt à potasser leurs cartes de la France.

Alors bien sûr certaines voies se sont faites entendre, sur des médias bien connus pour préférer la bêtise et la polémique politicienne aux sujets de fond, afin de réclamer que rescUE se limite aux seuls états membres de l’UE. Des voies discordantes qui ignorent bien souvent la signification du mot solidarité. Surtout des crétins qui ne voient pas plus loin que le bout de leurs propres petits intérêts égoïstes. Face au réchauffement climatique et à la guerre du feu qui en découle c’est unis que nous ferons face, pas seuls dans notre (petit) coin.

Photos © Ejercito del Aire y del Espacio, Sécurité Civile, Union Européenne.