Pourquoi est-ce que parler d’avion à moteur radial est un abus de langage en français ?

C’est un terme que l’on retrouve encore assez souvent dans certaines publications de presse ou sur le web, et de manière très marginale dans les ouvrages spécialisés. Il arrive en effet encore très régulièrement que des publications se fassent dans lesquelles le ou les auteurs décrivent la motorisation comme radiale. Or l’expression «moteur radial» est un barbarisme, un abus de langage héritée d’une forme de paresse intellectuelle dans la volonté de traduire depuis l’anglais. En effet s’il est correct dans la langue de William Shakespeare et d’Oscar Wilde de parler de «radial piston engine» sa traduction littérale ne l’est pas dans celle de Molière et de Beaumarchais.

Dans ces fameuses publications passablement erronées on parle donc de moteur radial voire de moteur radial à pistons. Vous l’aurez donc compris ce sont là deux tentatives de traduction verbum pro verbo de l’anglais vers le français. Un mode de traduction au mot à mot qui se révèle rarement juste entre nos deux langues, et ici nous en avons en démonstration flagrante.

Pourtant l’idée n’est pas idiote tant les anglicismes sont fréquents dans le jargon aéronautique, nous en avons expliqués quelques exemples dans nos kézakos : Barnstormer, Combat Proven, ou encore Gundoor.
Mais alors si on ne peut pas parler de «moteur radial» quel terme peut-on utiliser ?

Tout simplement on parle de «moteur en étoile».
Le terme est un peu plus poétique et surtout il est reconnu par les Immortels, les sages de l’Académie Française. Cette expression aujourd’hui totalement entrée dans le jargon aéronautique est l’œuvre de l’ingénieur français Louis Verdet et remonte à 1912. C’est à dire à la naissance même de l’aviation. Verdet n’est pas un inconnu dans le microcosme aéronautique puisqu’il fut le concepteur du moteur rotatif Le Rhône 7C à sept cylindres en étoile d’une puissance de 70 chevaux considéré par les historiens comme le premier véritable moteur en étoile. Par la suite Le Rhône fusionna avec Gnome et donna naissance à Gnome-et-Rhône, l’un des plus prestigieux motoristes du vingtième siècle.

Sur ce bombardier en piqué embarqué Vought SB2U-1 Vindicator le moteur est un Pratt & Whitney R-1535-96 Twin Wasp Junior à neuf cylindres en étoile.

Désormais vous savez pourquoi ce terme de «moteur radial» est faux en aviation. Et surtout vous avez maintenant l’information de l’origine même de l’expression «moteur en étoile». Vous remarquerez d’ailleurs qu’en français on ne stipule pas qu’il s’agit d’un moteur à pistons car seuls ceux-ci possèdent une architecture en étoile.

Photos © RAF Museum Library et US Naval Air Museum.


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ARTICLE ÉDITÉ PAR
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Arnaud
Passionné d'aviation tant civile que militaire depuis ma plus tendre enfance, j'essaye sans arrêt de me confronter à de nouveaux défis afin d'accroitre mes connaissances dans ce domaine. Grand amateur de coups de gueules, de bonnes bouffes, et de soirées entre amis.
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Commentaires

8 Responses

  1. J’ai remarqué que les moteurs en étoile avaient toujours un nombre de cylindres impair…. quelle est la raison qui expliquerait cela?

    1. Bonjour,
      Je crois me souvenir que c’est lié aux vibrations et aux résonnances en cas de nombre pair de cylindre… A confirmer néanmoins…

    2. Diverses sources disent que c’est pour l’équilibrage dynamique (pendant le fonctionnement)
      Mais Il existait des moteurs Anzani à 4, 10 et 14 cylindres qui équipaient pas mal d’avions, celui de Blériot notamment

  2. Pour ma part, je trouve que « radial » est à mettre en comparaison avec « en ligne » (ou longitudinal ») et « rotatif » traduisant les différents parcours des pistons entre eux dans un moteur
    « Radial » venant de « rayon » traduit bien un moteur en étoile

  3. A mon avis et comme les cylindres sont dans le même plan autour du vilebrequin, leurs axes sont bien les rayons d’un cercle qui a pour centre l’axe de l’attache de la bielle sur le vilebrequin, et donc que le terme  » radial  » est approprié. Ce moteur peut donc être qualifié de moteur à cylindres en étoile ou de moteur à cylindres à pistons radiaux. Qu’en pensez-vous ?

    1. C’est marrant on vous explique par A+B que l’expression « moteur radial » est un abus de langage et vous nous dites le contraire. C’est à se demander pourquoi on fait des articles de ce genre puisqu’au final vous en restez à vouloir reproduire l’erreur.
      Au moins avec des réactions comme la vôtre la prochaine fois que je voudrais faire un article sur le jargon aéronautique, bah je m’abstiendrai.

    2. Le Trésor de la Langue Française est en accord avec l’utilisation de cet adjectif et donc un « moteur en étoile », c’est un moteur dont les cylindres sont en position radiale (selon un rayon par rapport à un axe/centre).
      Cependant, je ne connais pas de moteur dont les cylindres ne sont pas alignés sur des rayons partant de l’axe moteur : un « moteur bicylindre en V » est aussi un « moteur radial » (à 2 rayons). Finalement, tous les moteurs à pistons sont donc « radiaux ».
      La traduction mot pour mot est étymologiquement correcte et intellectuellement compréhensible mais ne correspond pas aux usages dans notre langue, ce qui est le point de l’article d’Arnaud. Dans mon domaine (sciences), nous avons des problèmes similaires avec par exemple les anglicismes « voltage/ampérage » utilisés au lieu de « tension/intensité électrique ».

  4. Arnaud j’ai juste donné mon avis et il est étayé dans la mesure où l’adjectif anglais  » radial  » est traduit par  » relatif au rayon « ,
    J’ai travaillé dans l’industrie et il est vrai qu’il existe une foultitude de mots et d’expressions techniques non reconnus par les immortels mais qui sont très bien compris par ceux qui les emploient . Votre article est très intéressant et svp continuez à en écrire d’autres sur le jargon aéronautique, personnellement je les apprécie beaucoup

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