Le programme indo-russe FGFA a du plomb dans l’aile !

Cela aurait du être le plus gros programme de coopération internationale portée par la Russie dans le domaine de l’aéronautique militaire, mais finalement il n’aura pas duré plus de onze ans. L’état-major de l’Indian Air Force a annoncé ce vendredi 20 avril 2018 le retrait indien du programme FGFA visant à développer un avion de combat de cinquième génération directement dérivé du Sukhoi Su-57. Pour autant la Russie de son côté ne semble pas avoir (encore) décidé de jeter l’éponge et pourrait donc bien développer seule cet avion.

En fait cette décision est une demi-surprise pour tous ceux et toutes celles qui depuis plusieurs années suivaient le programme FGFA (pour Fifth Generation Fighter Aircraft) et ses brouilles répétées entre l’Inde et la Russie. Malgré l’imminence de l’entrée en service opérationnel du Sukhoi Su-57 dans l’aviation russe cet avion n’a jamais réussi à plaire aux décideurs militaires et politiques indiens ! Pis ils sont nombreux dans ce pays à le juger inadapté à leurs besoins.

Nonobstant le gouvernement indien laisse entrevoir une petite porte de sortie pour Sukhoi en indiquant que dans un futur plus ou moins proche il pourrait décider d’acquérir des Su-57 voire le FGFA si celui-ci était finalement développé. Seulement voilà cela ne se fera que dans le cas où l’Indian Air Force ne trouvait pas d’ici là un avion jugé mieux adapté à ses besoins. Et force est de constater qu’il y a du monde sur les rangs, à commencer bien évidemment par le Dassault Aviation Rafale français déjà acquis dans le pays. Mais ce dernier n’est pas le seul, et le réchauffement puis la normalisation depuis une quinzaine d’années des relations américano-indiennes pourrait bien jouer en faveur de Lockheed-Martin et de son F-35A Lightning II.

Mais alors pourquoi parler d’un FGFA et non d’un Su-57 ? Tout simplement parce que ce programme indo-russe proposait d’aller plus loin que celui stricto sensu russe. Le Su-57 s’annonce en effet comme un des grands chasseurs de supériorité aérienne de ces vingt ou vingt-cinq prochaines années face notamment aux remises à niveau à venir du Lockheed-Martin F-22A Raptor. Mais pas plus. Il ne semble pas dans l’état actuel de son avancement technologique être réellement polyvalent. Or c’est de cela que les Indiens ont besoin : d’un avion de combat multirôle. Et en fait depuis maintenant trois ans les dirigeants indiens se faisaient régulièrement l’écho du plus gros défaut du Sukhoi Su-57 : il semble moins polyvalent que tous ses contemporains.

Pour autant après cette décision indienne il n’est pas inenvisageable que les Russes décident dans les semaines à venir de stopper tout bonnement le programme FGFA. Il faut dire que chez eux il ne reposait pas vraiment sur une nécessité impérieuse à disposer d’avions de combat de cinquième génération dont on pouvait craindre l’explosion des coûts.
Le retour d’expérience du programme F-35 Lightning II aux États-Unis est criant dans ce domaine.

Certains analystes et experts soulignaient déjà depuis au moins un an et demi qu’a terme le programme FGFA pourrait déboucher sur une nouvelle tranche de modernisation du Sukhoi Su-57 sans forcément du coup donner naissance à un nouvel avion. Il s’agirait là d’un bon compromis pour Moscou qui pourrait stopper ce développement sans pour autant perdre ses éventuelles avancées technologiques, et encore moins la face.

La fin du programme FGFA pose aussi des questions autour d’un autre programme indo-russe majeur : celui du biréacteur de transport tactique Ilyushin Il-276 initié en 2009 en concurrence de l’Antonov An-178. Mais là où l’avion ukrainien a volé pour la première fois en 2015 son futur (hypothétique ?) concurrent indo-russe ne le fera pas avant encore au moins cinq années. Un retard qui commence à en agacer plus d’un en Inde.

Aux vues des programmes actuellement en cours en Inde, et en gardant toute la prudence de mise dans ce genre de dossier, il est parfaitement envisageable que Hindustan Aircraft Limited tente d’en profiter pour étendre le champ de son programme AMCA (pour Advanced Medium Combat Aircraft) et en faire désormais plus qu’un simple chasseur-bombardier. Pour mémoire ce très ambitieux programme d’avion furtif est destiné au remplacement à l’horizon 2024 des derniers Mikoyan-Gurevitch MiG-27 et SEPECAT Jaguar encore en dotation, voire même des Dassault Aviation Mirage 2000.

Au final on en vient à se demander si les montages industrialo-financiers conçus entre l’Inde et la Russie dans le domaine de l’aéronautique de défense sont vraiment intéressants pour les deux parties ? Car onze années de FGFA pour finalement presque rien, cela a fait gâcher des sommes considérables aux deux parties alors même qu’elles auraient pu investir chacune de son côté dans des programmes nationaux.

Photo © Key Publishing

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Arnaud
Arnaud
Passionné d'aviation tant civile que militaire depuis ma plus tendre enfance, j'essaye sans arrêt de me confronter à de nouveaux défis afin d'accroitre mes connaissances dans ce domaine. Grand amateur de coups de gueules, de bonnes bouffes, et de soirées entre amis.
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Commentaires

8 réponses

  1. Peut-être que les indiens sont très bien informés sur le SU-57 et ils estiment que la base pour un futur avion n’est pas à la hauteur ?!

    1. L’Inde est surtout à la recherche de transfert de technologies. Ils sont équipé d’environ 200 appareils Français (Rafale, M-2000 et Jaguar) et du reste de matériel Soviétique (Mig 21,27,29, SU-30), 40 Tejas doivent venir remplacer les Mig 21.
      Le tejas est propulsé par des GE-404 américains. Dans tout les cas, leur défense dépend de pays tiers, comme la Russie, la France et les USA.
      Peu être que les récent événement en Syrie ont eut une influence sur le gouvernement Indien.
      Pour mémoire, la version naval du Tejas à été annulé, une appel d’offre à été émise pour 57 chasseurs embarqué.
      Il y a peu de chance que l’inde choisisse du materiel Russe car les Mig-29k ne répondent pas aux attentes.
      Et une autres appel d’offre a été lancé pour un mono moteur léger qui sera produit sur place a été lancé il y a 1 ans.

      1. Pour mémoire nico, les Jaguar vendus à l’Inde ne l’ont pas été par la France mais par le Royaume-Uni. Vous semblez oublier les liens très étroits qui unissent ces deux pays, entre ancienne puissance dominatrice et ancienne colonie.

  2. L’IAF n’est meme pas satisfaite des performances de leur Tejas de G4 et de son utilité, et la voila critique les russes de ne pas trop collaborer avec eux dans le FGFA!!! et en plus l’IAF juge le projet FGFA comme une erreur!!!! WOW.

    Les russes ne veulent pas faire la meme erreur du F-35. Actuellement, aucun conflit à l’échele internationale requiert un avion G5. Donc pourquoi se précipiter à faire enter en service un avion qui n’est pas mature?

    1. Les Indiens sont parfaitement en droit de juger que le FGFA n’est pas à la hauteur de leurs attentes, je vous rappelle que ce sont eux qui supportent la plus grosse partie de la charge financière du projet. Après tout le contribuable indien n’a pas pour vocation de faire grossir les caisses de Sukhoi et de l’état russe pour rien ou presque rien !

      1. Concernant le contribuable Indien, il est grillé par le contrat des 36 Rafales et l’echec story du Tejas (avec toutes les implications stratégiques, tactiques, technologiques et financières sur le MOD et l’industrie militaire).

  3. Que dire du contribuable canadien grillé pour emplir les caisses de…. Lookheed!!! Les indiens n’ont pas appréciés que les chaînes de fabrications ne soient pas en parties transférées en Indes pour le FGFA. Pour le reste c’est le rapprochement des Russes et de la Chine qui passe très mal auprès du gouvernement Indien ! (déclaration du ministre Indien de la défense de mai 2018).

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