Joyeux anniversaire Béluga

Voilà un anniversaire qui compte pour un avion toujours aussi attachant. Bon disons-le tout de suite ce n’est pas le plus bel appareil de la famille Airbus, mais qu’importe c’est sûrement le plus atypique. Vingt ans que l’Airbus A300-600ST Béluga a réalisé son premier vol, ça se fête !!! Et quelle plus belle manière de le célébrer qu’en rappelant en quelques lignes les grandes heures de ces vingt dernières années.

Tout d’abord rappelons que l’Airbus A300-600ST Béluga (ST pour Spécial Transport) a été conçu dès 1991 par et pour Airbus Industries afin de remplacer les vieux quadriturbopropulseurs Aero Spaceline Super Guppy d’origine américaine, des avions eux-même dérivés du quadrimoteur de transport militaire Boeing C-97 Stratofreighter dont la conception remontait à la deuxième moitié de la Seconde Guerre mondiale. Autant dire qu’en ce début des années 1990 leur cellule commençait à sérieusement accuser le poids des ans.
Rapidement le choix des ingénieurs d’Airbus se tourna vers le biréacteur A300-600 un avion puissant mais dont la fin d’usinage s’annonçait désormais avec l’arrivée prochaine d’une nouvelle génération d’avions de lignes plus économiques. Les ingénieurs allemands et français qui menèrent les travaux eurent alors l’idée de s’inspirer des modifications réalisées par Aero Spaceline sur les C-97 pour créer leur A300-600ST.

Un Aero Spaceline Supper Guppy aux couleurs d'Airbus Industries dans les années 1980.
Un Aero Spaceline Supper Guppy aux couleurs d’Airbus Industries dans les années 1980.

Le résultat fut saisissant lorsqu’à la fin de l’été 1994 l’avion fut révélé au monde entier. Le 13 septembre il prenait enfin les airs. Entre d’un côté les quolibets et les sobriquets peu enviables que lui affligèrent des médias généralistes toujours aussi nuls en aéronautique et, de l’autre les interrogations voire les intérêts nets de la part de la presse spécialisée et des aficionados le fossé semblait énorme. Je me souviens encore d’un article dans un grand quotidien français qui se demandait clairement si l’avion allait réussir à tenir les airs. Le jeune adulte que j’étais alors s’était dit que vraiment les journalistes de ce canard n’en touchaient pas une bille en aéronautique.

Il fallut encore attendre un an avant de voir la bête en vol de manière opérationnelle. Et là ceux qui avaient douté du talent des ingénieurs européens en avaient pris pour leur grade, non seulement il volait bien mais en plus il était magnifique en évolution. En juin 1995 il régala même de sa présence le show aérien du salon du Bourget. Entre temps il avait été baptisé Béluga, du nom de ce petit cétacé blanc qui vit dans les eaux glacées du cercle polaire arctique. Tout comme lui dans l’eau le nouvel avion d’Airbus était très à l’aise dans les airs malgré un air pataud indéniable.

Sur ce cliché l'Airbus A300-600ST démontre bien son agilité en vol.
Sur ce cliché l’Airbus A300-600ST démontre bien son agilité en vol.

Et de l’agilité le Béluga allait en avoir besoin. Son rôle était de transporter entre les différentes plateformes d’assemblage du constructeur, principalement en Allemagne et en France les éléments des avions construits parfois à plusieurs milliers de kilomètres de là dans des pays différents, en Belgique, en Espagne, en Italie, et ailleurs. Autant le dire les cinq Airbus A300-600ST n’allaient pas chômer.

Avec l’aventure du quadriréacteur A380 le Béluga entra dans une nouvelle phase. Il était désormais le seul avion civil capable de transporter les éléments du géant des airs. En gros le succès technologique du nouvel avion européen reposait entre autre sur sa soute. Et gageons que là, il n’y avait pas photo. Celle ci est globalement plus vaste que celle des Antonov An-124 et Lockheed C-5, et lors de la sortie du Béluga, seul l’héxaréacteur Antonov An-225 avait une soute plus vaste. Cependant l’A300-600ST ne faisait pas le poids avec ses congénères en matière de tonnage transporté. C’est un cargo hors-norme pas un transport lourd, sa charge marchande maximale n’excède pas quarante six tonnes, soit 2.5 fois moins que le Galaxy et 3 fois moins que le Ruslan.

Sur ce cliché le Béluga avale littéralement l'empennage d'un Airbus A380.
Sur ce cliché le Béluga avale littéralement l’empennage d’un Airbus A380.

Mais sa soute l’a rendu apte à transporter bien autre chose que des éléments d’Airbus. En 1999 le ministère français de la Culture affrète un de ces avions pour un vol historique : transporter le chef-d’œuvre d’Eugène Delacroix « La Liberté guidant le peuple » jusqu’à Tokyo. Le souci c’est que ce tableau du XIXème siècle est un rectangle qui mesure la coquette taille de 3.65 mètres sur 2.60 mètres. Et il est bien entendu impossible de le découper ou même de le rouler pour le transport, il doit demeurer sur son châssis entre le musée du Louvre à Paris où il est habituellement exposé et le musée japonais qui le présentera au public. Particularité on sait alors qu’il ne rentre pas à bord de la soute des Boeing 747 d’Air France. Seul le Béluga peut remplir cette mission.
Pour l’occasion l’avion est même repeint aux couleurs du tableau. Il lui faudra vingt heures de vol, et deux escales pour rejoindre le Japon. La première, aux Émirats Arabes Unis sera même l’occasion d’une petite polémique sur les seins nues de la Liberté reproduits sur le fuselage de la machine et fort peu aux goûts de certains censeurs de ce pays assez tatillons sur la représentation de la féminité.
Bien évidemment l’A300-600ST réalisa également le vol retour de cette huile historique.

Quatre ans plus tard, en 2003 ce sont deux hélicoptères militaires que l’avion va transporter, cette fois de l’autre côté de la Terre à Canberra en Australie. Ce sont donc un NH-90 et un Tigre qui franchissent les mers à bord du Béluga. À cette époque le pays porte un intérêt certain à ces deux machines.
Grand bien ayant prit à Eurocopter, puisque les deux hélicoptères ultramodernes furent commandés en série par les Australiens.

On aperçoit bien la position particulière du cockpit, très en dessous de la soute du Béluga.
On aperçoit bien la position particulière du cockpit, très en dessous de la soute du Béluga.

Alors vingt ans oui c’est un bel âge, mais certains chez Airbus Group pensent déjà à son successeur qui pourrait voir le jour sous la forme d’un Airbus A330-300 fortement modifié. Un futur Béluga NG en somme ?
En attendant, souhaitons lui un très joyeux anniversaire. La retraite viendra quand il le faudra, en attendant profitons de cet avion vraiment pas comme les autres.

Photos © Airbus Group.


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Arnaud
Passionné d'aviation tant civile que militaire depuis ma plus tendre enfance, j'essaye sans arrêt de me confronter à de nouveaux défis afin d'accroitre mes connaissances dans ce domaine. Grand amateur de coups de gueules, de bonnes bouffes, et de soirées entre amis.
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Commentaires

Une réponse

  1. ayant la chance de vivre a Toulouse, j’ai la chance de le voire tous les jours (souvent plusieurs fois par jours) et même après deux an il fait toujours sont effet.
    et pour information la maquette de A330 beluga est actuellement en soufflerie

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