Ankara se tire une balle dans le pied sur le contrat d’achat des 40 F-16 Viper.

L’information est tombée ce samedi 23 octobre 2021 en soirée. Le dirigeant turc Recep Tayyip Erdogan a décidé d’expulser de son territoire les ambassadeurs de dix pays européens et nord-américains. En terme de timing il ne pouvait pas faire pire quand on sait que son pays négocie actuellement avec les États-Unis l’acquisition de quarante chasseurs multi-rôles Lockheed-Martin F-16V Viper. Le contrat concerne aussi une possibilité de modernisation de quatre-vingts appareils déjà en dotation.

Dans les faits il découle de l’exclusion de la Turquie du programme Joint Strike Fighter décidée par l’administration Trump et entérinée de nouveau par celle de Joe Biden. La proximité diplomatique et politique entre Erdogan et Poutine dérange dans les allées du Capitole autant qu’à la Maison-Blanche. Dans le même temps la Grèce, l’éternel adversaire de la Turquie, avait décidé d’acquérir des chasseurs omnirôles français Dassault Aviation Rafale. Cela risquait de faire tanguer grandement l’équilibre des forces dans la région en direction d’Athènes. Enfin l’hypothèse d’acquisition de chasseurs auprès de l’avionneur russe Sukhoi aurait eu pour effet immédiat que l’OTAN ferme immédiatement, et sans doute définitivement, le robinet des aides financières à la Turquie.
C’est pourquoi Ankara décida il y a quelques mois d’acquérir quarante Lockheed-Martin F-16V Viper et de commander quatre-vingts kits de modernisation pour les F-16C/D Fighting Falcon en sa possession. L’option semblait une bonne alternative pour les Turcs.

Le contrat était depuis quelques jours sur les bureaux de la DSCA, la Defense Security Cooperation Agency, et du Pentagone. Il attendait un feu vert administratif américain qui ne viendra finalement sans doute jamais.
Rien à avoir avec la décision d’Erdogan d’exclure d’Ankara les ambassadeurs allemands, canadiens,  français, ou néo-zélandais. Là où l’autocrate turc a fait une grave erreur diplomatique c’est d’y intégrer le représentant officiel des États-Unis. L’ambassadeur américain est lui-aussi déclaré personae non grata par l’état turc.

Au-delà du contrat avec Lockheed-Martin c’est véritablement la place de la Turquie dans l’alliance Atlantique qui va bientôt poser question. La conservation d’Incirlik AB ou bien les menaces d’Erdogan vis-à-vis de la crise migratoire nécessitent t-elles vraiment de conserver un allié aussi encombrant ? À n’en pas douter les états-majors européens et nord-américains se sont déjà interrogés dessus.
Une chose semble désormais assurée : les F-16V Viper ne sont pas près d’arriver de sitôt dans ce pays.

Photo © Wikimédia Commons

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ARTICLE ÉDITÉ PAR
Arnaud
Arnaud
Passionné d'aviation tant civile que militaire depuis ma plus tendre enfance, j'essaye sans arrêt de me confronter à de nouveaux défis afin d'accroitre mes connaissances dans ce domaine. Grand amateur de coups de gueules, de bonnes bouffes, et de soirées entre amis.
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Commentaires

15 réponses

  1. Mr Iznogoude ne comprend que deux choses : la politique du fait accompli et le rapport de force qui va avec. Attention au retour du boomerang….

  2. Pour compléter le nombre à 10 pays, il s’agit de : Le Canada, la France, la Finlande, le Danemark, l’Allemagne, les Pays-Bas, la Nouvelle-Zélande, la Norvège, la Suède et les Etats-Unis .

    1. Oui c’est anecdotique, les pays autres que les États-Unis n’ayant aucun intérêt sur ce coup là.

      1. C’est vrai, Officiellement il a voulu faire un lot pour l’intégrer dans une autre affaire . Mais bon, à ce niveau ce n’est plus du noyage de poisson, c’est un manque total de discernement.

    1. Ce qui est bien Jacques c’est que moins d’une heure avant votre commentaire je demandais de revenir à l’aéronautique. 😉

  3. Tout à fait et sans aucun problème pour ma part, Cependant le malheur, c’est que puisque la décision est diplomatique et non pas aéronautique, la suite de cette affaire sera politique, diplomatique, ou autre, qu’en sais-je, n’étant ni très diplomate ( c’est le moins que je puisse dire ) et totalement apolitique, de toutes les manières au minimum cela dépassera l’entendement et au maximum cela sera un clash de plus vis à vis d’un dictateur qui se déplace au gré de son intérêt personnel sur l’ échiquier mondial, ( Arnaud, il va sans dire que votre travail aérononautique n’est pas en cause, mais je tenais, non pas à ouvrir un débat libre sur la polique Turque, il y a bien d’autres moyens de diffusion pour cela, mais justement en revenir aux faits diplomatiques, si cette disgression est soit erronée soit réellement hors de propo sur le site ne la publiez pas. Cordialement)

  4. Erdogan vient de décider de faire machine arrière suite au tolé provoqué par sa décision. La vente des F-16V Viper pourra donc sans doute se faire.

    1. Sa décision de virer les 10 ambassadeurs ou seulement celui des USA ? quoiqu’il en soit, pour lui, c’est bien une reculade. En souhaitant qu’il s’en serve à bon escient .

      1. il a annulé l’expulsion pour les ambassadeurs des 10 pays. Le faire juste pour un seul (les USA en l’occurance) n’aurait pas eu de sens vu que le reproche fait est le meme pour chaque
        Maintenant, il n’est pas dit que cela ouvre la voie à l’achat des F-16V, il doit y avoir auparavant un accord des sénateurs et du congrès, or ils sont majoritairement très hostiles à Erdogan. Et après ce coup de bluff d’Erdogan, je doute que ça arrange son image de gars instable et imprévisible. Sa proximité de plus en plus évidente avec les russes en fait un partenaire avec lequel il n’est pas bon de partager du matériel militaire de haut niveau.

      2. Une reculade oui plutôt celle des USA et de tous les états qui demandaient la libération du Kavala.
        Du coup ils ne demandent plus sa libération après les menaces d’expulsion ?.

        1. Il n’est vraiment pas certain à ce jour que le gvt US autorise cette vente de F16V. le congrés semble contre, la Turquie dans ce cas va devoir se trouver un nouveau partenaire, ce qui n’est pas vraiment évidant ….Kavala n’est que la partie visible de l’iceberg, et dire que ce pays voulait rentrer dans l’Union Européenne ! au pire il risque même, bon grès mal grès, de se faire sortir de l’Otan. en attendant la solution est économique, il n’y a qu’à voir la chute de la livre turque / USD.

        2. On va ici calmer le jeu entre vous Florian et Jovanovic et revenir strictement à des commentaires aéronautiques.
          D’avance merci.

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