La France prête à déployer des centaines de troupes en Roumanie.

C’est l’une des premières vraies réponses de Paris face à l’agressivité grandissante de Moscou dans la région. La ministre des Armées, madame Florence Parly, a lancé ce samedi 29 janvier 2022 une petite bombe médiatique en déclarant au micro de France Inter que notre pays était en capacité d’envoyer très rapidement plusieurs centaines de soldats en Roumanie. Pour mémoire ce pays est à la fois frontalier de l’Ukraine, bordé par la Mer Noire, et membre de l’OTAN et de l’Union Européenne. Une annonce qui fait écho à la présence prochaine d’avions du Charles de Gaulle dans la région.

Bien entendu le chiffre est suffisamment évasif pour tout imaginer. Plusieurs centaines de combattants cela peut être 800 comme 1500 ou 2000. Reste que la grande inconnue demeure la logistique. Car même si France et Roumanie sont toutes deux dans l’Union Européenne la seconde n’est pas toute près de la première. Il faudra forcément des moyens de projection rapides et sûrs.
Pour les personnels, et notamment pour les unités de première intervention on pense évidemment aux Airbus DS A400M Atlas, Lockheed C-130H/H-30 Hercules, et Lockheed-Martin C-130J-30 Super Hercules de l’Armée de l’Air et de l’Espace. Des avions en outre capables de parachuter les troupes aéroportées si la dégradation de la situation diplomatique l’exigeait. Les biréacteurs Airbus DS A330 MRTT Phénix et les quadriréacteurs Boeing C-135FR peuvent également laisser de côté leur mission de ravitaillement en vol afin d’assurer le soutien logistique aux forces engagées.

Le problème c’est qu’un tel déploiement doit aussi prendre en compte les véhicules terrestres. Et c’est là que la bat blesse. La France ne possède pas le moindre avion de transport lourd capable d’emporter nos chars Leclerc et AMX-10RC ou encore nos véhicules de avant blindés, véhicules blindés de combat d’infanterie, ou même les nouveaux véhicules blindés multi-rôles Griffon. Les petits véhicules protégés et les véhicules blindés légers ou à fortiori les obusiers Caesar connaissent le même problème tout comme les engins du génie.
Et là trois solutions s’offrent au ministère des Armées.

  • La première consiste à quémander à nos alliés des Boeing C-17A Globemaster III et des Lockheed-Martin C-5M Super Galaxy ou à louer des gros-porteurs civils Antonov An-124 Condor et Ilyushin Il-76 Candid à des compagnies privées ukrainiennes.
  • La deuxième réside dans la Marine Nationale et dans ses moyens de projection de forces : les trois porte-hélicoptères amphibies de classe Mistral. En outre les Dixmude, Mistral, et Tonnerre ont la capacité de transporter également les hélicoptères de l’Aviation Légère de l’Armée de Terre sur leur pont d’envol pendant que les véhicules terrestres sont en soutes.
    Seul souci, et pas des moindres : il faut passer le Bosphore, et donc obtenir l’accord de la Turquie, pour entrer en Mer Noire. C’est là que le quai d’Orsay entre en jeux.
  • La troisième est la voie terrestre. L’Union Européenne dispose d’un vaste réseaux ferré totalement adapté aux transferts de matériels militaires. Les déploiements de blindés français vers l’Estonie l’ont démontré.

Vous l’aurez sans doute compris ce sont les deux dernières solutions qui sont les plus viables pour la France. Celle d’espérer une solidarité de nos alliés se heurte à une réalité : eux aussi vont avoir des troupes à déployer au plus près de l’Ukraine ! La France paye donc son entêtement à refuser d’acquérir des C-17A Globemaster III qui furent proposés aux présidences Chirac et Sarkozy par l’administration de George Bush Jr puis à la présidence Hollande par l’administration de Barack Obama. Désormais il est trop tard !

Dans un avenir sans doute très proche nous aurons les réponses à ces interrogations. En espérant que la première puissance militaire de l’Union Européenne ne se ridiculise pas de nouveau par son incapacité chronique à déployer vite et bien ses moyens de combat.
Affaire donc à suivre.

Photo © Armée de l’Air et de l’Espace.

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ARTICLE ÉDITÉ PAR
Arnaud
Arnaud
Passionné d'aviation tant civile que militaire depuis ma plus tendre enfance, j'essaye sans arrêt de me confronter à de nouveaux défis afin d'accroitre mes connaissances dans ce domaine. Grand amateur de coups de gueules, de bonnes bouffes, et de soirées entre amis.
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Commentaires

8 réponses

  1. Le Heavy Airlift Wing de l’OTAN possède trois C-17 basés en Hongrie.
    Sinon hormis le char Leclerc, tout les autres véhicules que vous avez cité peuvent être embarqués dans un A400m. On peut même mettre deux AMX-10 rc dans un ATLAS.

    1. Bien sûr que sur le papier le Caesar et le VBCI sont aérotransportables par A400M Atlas. Mais une fois que vous en avez entrer un vous ne mettez plus rien dedans. Et niveau logistique c’est très limite comme capacité. Un A400M es validé pour trois VBL ou quatre PVP en outre, mais là encore c’est faible.
      Quand aux Globemaster III de l’OTAN je pense qu’ils seront prioritairement employés par d’autres.

  2. Une solution simple: ne pas envoyer de chars Leclerc. Une bonne autre pas trop compliquée: les envoyer en Grèce puis traverser la Bulgarie. Nous n’aurons pas de C17. On ne refait pas l’histoire.

  3. Utiliser un ou 2 bpc pour débarquer à Thessalonique chez nos bons alliés grecs, et remonter vers Bucarest par Sofia en train ou par route. En une semaine, tout le monde est sur place, pas besoin de se casser la tête avec des avions. Plus rapide et moins coûteux en logistique…

  4. Je suis 100/100 d’accord avec votre analyse Arnaud.
    25 ans d’abandon de nos armées, sous prétexte  » que nous récoltons les bénéfices de la paix) dixit, Mr Chirac, nous amènent dans l’impasse dans laquelle nous aujourd’hui.

    Sans oublier que nos forces sont dispersées un peu partout sur la planète ( Afrique, Moyen Orient, Dom, Tom), il nous reste quoi en réalité ?

    L’intention est bonne, mais l’intendance ne suit pas, comme disait les anciens.

  5. Souvenirs de la 1ere guerre du Golfe (1991) où notre PA Clemenceau avait été transformé en porte-conteneur…. sous la risée de nos alliés anglo-saxons….
    2021 : bis repetita. Aucune prise en compte du RETEX. Ceux qui oublient leur passé sont condamnés à le revivre.

  6. En 1990 le clemenceau avait servit pour embarquer 40 hélicoptères puma et gazelles, 70 vehicules garés à la fois sur le pont et en soute et 600 militaires du 5RHC. En plus de cela l’armée avait réquisitionné le Ferry Esterel de la SNCM et embarqué 2000 militaires et 117 véhicules. Qu’est-ce qui empêche d’en faire autant avec Corsica linea ou Corsica ferries ? En plus nous sommes en periode calme pour ces compagnies. En 2018 l’armée avait bien affrété un navire de Corsica linea ( ex-SNCM) pour l’exercice Trident juncture 2018.
    Ne pas oublier les deux navires MN Calao et Tangara qui sont affrété à temps plein pour les besoins des Armées françaises. La franchement je ne vois pas où est le problème, surtout pour déplacer seulement l’équivalent d’une brigade. En 1991 c’était 12500 hommes et 2500 véhicules (dont 500 blindés et 1130 camions).

  7. pour le déploiement d’une brigade blindée ou mécanisée rien de tel que les convois ferroviaires, tous les pays de l’OTAN ou du Pacte de Varsovie ont des voies faites pour décharger les blindés, Le transit par mer est très limité en terme de taille de groupement tactique transporté et de plus susceptible d’être « coincé » par les turcs.
    je l’ai souvent fait c’est simple et rapide

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