Il n’y a plus de KC-10A Extender en dehors des États-Unis !

C’est un signe qui ne trompe pas. Ce  jeudi 5 octobre 2023 un McDonnell-Douglas KC-10A Extender appartenant à l’US Air Force a décollé de Prince Sultan AB en Arabie Saoudite à destination des États-Unis. Jusque là rien de très étonnant sauf que par cette action se refermaient les déploiements étrangers de ce ravitailleur en vol triréacteur marquant ainsi le véritable début de la fin de sa carrière opérationnelle. Car il faut bien reconnaitre que cet avion n’est nullement taillé pour le seul espace aérien américain.

En fait dès son entrée en service en mars 1981 le KC-10A Extender a été vu comme un outil de projection de force à l’étranger. Jamais l’US Air Force n’avait eu un avion de ravitaillement en vol aussi volumineux capable de transférer du carburéacteur aussi bien à un bombardier stratégique Boeing B-52H Stratofortress qu’à des chasseurs tactiques McDonnell F-15A Eagle. Évoluant alors sous une étonnante livrée bleue et blanche qui le faisait ressembler à un McDonnell-Douglas DC-10 civil dont il dérivait ce triréacteur se révéla également être un très efficace avion de soutien logistique. Le transport de fret sur palettes était une de ses spécialités quand il ne jouait pas les stations services du ciel.

C’est 5 ans après son entrée en service que les passionnés d’aviation découvrent réellement les talents de cet avion. Il participe activement à l’opération Eldorado Canyon visant à bombarder la Libye du colonel Khadafi en représailles d’une attaque à la bombe contre un discothèque ouest-allemande fréquentée par des GI’s. Les McDonnell-Douglas KC-10A Extender assurent le ravitaillement des General Dynamics F-111F Aardvark de l’US Air Force déployés depuis la Grande Bretagne. Le refus des gouvernement espagnols et français d’ouvrir leur espace aérien à ces avions d’attaque obligea les équipages de tankers à de nombreux transferts de carburéacteur. Quatre ans plus tard c’est le monde entier qui le découvrit quand il permit d’acheminer une grosse partie de l’aide militaire américaine à l’Arabie Saoudite lors de l’opération Desert Shield. Aux côtés des Lockheed C-5B Galaxy et C-141B Starlifter il détonnait par son air d’avion de ligne. Et pour cause. Il avait pourtant adopté une livrée nettement plus guerrière qu’à ses débuts.

Dès lors le gros de la carrière de cet avion ô combien discret se fera en dehors du territoire américain. Qu’il vole en ex-Yougoslavie ou bien aux abords directs de la Corée du Nord le McDonnell-Douglas KC-10A Extender est alors à lui seul une image de la puissance militaire des États-Unis. Il est énorme. Et c’est encore plus palpable quand il ravitaille en même temps deux General Dynamics F-16C Fighting Falcon. Avec les attaques terroristes du 11 septembre 2001 se profile le nouveau terrain de jeu des équipages de ravitailleurs triréacteurs : l’Afghanistan. L’avion y volera comme il volera quelques mois plus tard au-dessus de l’Irak. Pendant plusieurs années il mènera de front ces deux zones d’interventions de l’Amérique et de ses alliés. Toujours dans l’ombre.

Car le propre d’un ravitailleur en vol c’est de rester à distance de la guerre, à distance aussi du crépitement des flash d’appareils photos. Cette mission aussi essentielle soit-elle pour toute action à l’étranger est un rôle à remplir dans la discrétion et dans l’humilité. Sans station service volante pourtant rien ne serait possible. C’est la raison pour laquelle la fin des déploiements extérieurs du McDonnell-Douglas KC-10A Extender est forcément une triste nouvelle. Elle préfigure sa retraite future. Rappelons que l’avion n’a actuellement aucun successeur connu, et que l’on ne vienne pas me parler du Boeing KC-46A Pegasus. Déjà qu’il peine à remplacer le KC-135R Stratotanker ce n’est pas pour lui confier la même tâche vis-à-vis du triréacteur géant.

C’est le 30 septembre 2024 que le dernier de ces ravitailleurs en vol quittera le service actif dans l’US Air Force. Une page se tournera alors dans l’histoire de l’aviation.

Affaire à suivre.