L’Ukraine lorgne sur l’A-10C Thunderbolt II et l’AH-1W Super Cobra.

Il se pourrait que le Warthog fasse enfin ce pourquoi il a été conçu dans les années 1970 : bousiller du char russe ! Par la voix d’un de ses plus hauts gradés la défense ukrainienne vient officiellement de demander aux États-Unis la fourniture d’avions d’attaque au sol Fairchild-Republic A-10C Thunderbolt II et d’hélicoptères de combat Bell AH-1W Super Cobra. Mélanger les deux aéronefs dans la même demande est quelque chose d’assez malin puisqu’ils sont totalement complémentaires et que le second est disponible dans des délais très courts. En effet ce modèle ne sert plus dans l’US Marines Corps, les exemplaires ayant été stockés à Davis Monthan AFB.

Tous les Bell AH-1W Super Cobra qui servaient donc dans l’US Marines Corps ainsi que la petit poignée qu’utilisa l’US Navy en soutien pour des essais en vol sont désormais sous cocons. Enfin ceux qui n’ont pas été ferraillés. Et ça les Ukrainiens le savent bien. En outre le Fairchild-Republic A-10C Thunderbolt II est sur la pente descendante de sa carrière, notamment en raison de la généralisation des livraisons de Lockheed-Martin F-35A Lightning II dans l’US Air Force. Qu’on le veuille ou non, que l’on soit ou non d’accord avec cela le chasseur de 5e génération est aussi le successeur désigné de ce mythique tueur de chars. Pour l’instant Kyïv ne réclame pas de chasseurs multi-rôles furtifs afin de bouter l’envahisseur russe hors de son territoire, Crimée comprise.

Alors que les premiers General Dynamics F-16AM/BM Fighting Falcon ex européens sont attendus d’ici quelques semaines l’officialisation de la volonté d’acquérir des A-10C n’a rien de surprenante. C’est un avion dont Moscou s’est toujours méfiée, d’abord sous l’ère soviétique puis aujourd’hui russe. Il faut dire qu’il a largement démontré ses capacités air-sol, que ce soit dans la destruction de colonnes de chars comme en Irak début 1991 ou bien dans la guerre asymétrique en Afghanistan à partir de fin 2001 et en Irak/Syrie dès 2014. Des pilotes ukrainiens aux commandes de Warthog représenteraient à coup sûr une menace sérieuse pour les artilleurs et tankistes russes. Enfin ça c’est sur le papier.

Car la réalité est un poil plus compliquée. D’abord si la très grande majorité des pilotes d’A-10 Thunderbolt II adorent leur avion tous reconnaissent qu’il est parfois très compliqué à prendre en main. D’autant plus qu’aucune version biplace de transformation opérationnelle n’existe. Il faut donc apprendre de zéro dessus. Moins simple de ce fait de se familiariser avec la machine que par exemple avec un F-16AM ou même un F-16C pour lequel les biplaces sont encore légions. Surtout impossible d’aller se former en Europe l’US Air Force est la seule force utilisatrice de ce puissant avion d’attaque. Alors bien sûr le phacochère américain serait une monture idéal pour les pilotes ukrainiens formés sur Sukhoi Su-25 Frogfoot puisque ce dernier fut en son temps la réponse soviétique à son apparition. Sauf que les deux avions sont au final très différents et ne relèvent même pas de la même logique doctrinale. En fait l’avion dont l’idée même se rapprocherait le plus dans l’histoire soviétique du A-10 est feu l’Ilyushin Il-40 Brawny conçu au début des années 1950 comme un successeur (avorté) du génialissime Il-10 Beast. Le Su-25 n’est pas vraiment, contrairement à l’avion américain, un tueur de chars ou Shturmovik en russe. C’est un avion d’attaque au sol, d’appui aérien rapproché, excellent dans les deux cas mais auquel il manque un réel armement offensive interne. Le passage, la transition en fait, entre le Su-25 Frogfoot et l’A-10 Thunderbolt II n’a donc rien de logique. Ce n’est pas pour rien si aucun des pays de l’OTAN jadis rattachés au Pacte de Varsovie ne chercha jamais à échanger ses vieux Sukhoi pour des Fairchild-Republic. Ils l’avaient bien compris.

Tout ça pour dire que la décision d’acquérir des A-10C Thunderbolt II dans l’urgence de la guerre contre l’envahisseur russe a tout d’une fausse bonne idée. Et c’est là que la demande du colonel général Oleksandr Syrskyi prend tout son sens. Le chef d’état-major des forces terrestres ukrainiennes indique qu’il se verrait bien doter d’hélicoptères de combat Bell AH-1W Super Cobra. Tout comme le Warthog celui-ci est un tueur de chars et tout comme l’avion d’attaque ce biturbine a fait ses preuves dans les mêmes conflits aussi bien en antichar qu’en appui tactique rapproché. Surtout il est donc totalement disponible, à condition bien sûr que les exemplaires en question soient remis en condition opérationnelle après avoir quitté leurs cocons.

Le Bell AH-1W Super Cobra volera t-il sous la fameuse cocarde jaune et bleue de la résistance ukrainienne ?

Là par contre la transformation opérationnelle des pilotes pourrait s’avérer plus facile, notamment pour ceux issus du Mil Mi-24 Hind. Surtout une livraison d’AH-1W Super Cobra sera plus facile à gérer par l’administration Biden vis-à-vis de la frange la plus réactionnaire des Républicains, les soutiens de l’ancien président Donald Trump. Ces derniers continuent de voir dans le dictateur russe Vladimir Poutine une personne avec qui ils peuvent discuter franchement. Pour l’actuel locataire du bureau ovale l’ancien hélico des Marines permet de ménager la chèvre et le chou, ou dans le cas présent l’Ukraine et la droite dure américaine.

Affaire (forcément) à suivre.

Photos © US Air Force et US Marines Corps.

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ARTICLE ÉDITÉ PAR
Arnaud
Arnaud
Passionné d'aviation tant civile que militaire depuis ma plus tendre enfance, j'essaye sans arrêt de me confronter à de nouveaux défis afin d'accroitre mes connaissances dans ce domaine. Grand amateur de coups de gueules, de bonnes bouffes, et de soirées entre amis.
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Commentaires

21 réponses

  1. Il y aurait sans doute aussi un autre pb si des A10 étaient rapidement livrés en Ukraine : pour qu’ils puissent opérer efficacement il leur faut évoluer dans un ciel sûr, nettoyé de la menace air-air, donc que les F16 occupent le ciel et tiennent à l’écart la chasse russe. F16 d’abord et ensuite éventuels A10 et autres Cobra !

  2. Ce qui semblerait optimal dans un premier temps ce sont des gripen, dommage que ce dossier ne semble pas trop avancer.
    Les hélicoptères de combat et les avions d’appui dans un conflit de haute intensité risquent des pertes importantes, que l’Ukraine n’a pas les moyens d’absorber (et les russes pas forcément beaucoup plus, d’où la disparition des su25 et ka52), des systèmes d’artillerie en nombre avec une grande mobilité, des munitions modernes voire « intelligentes », des missiles de croisière, des drones, des systèmes de défense antiaériens … bref, du matériel qui provoquera une attrition de l’ennemi avec un minimum de perte dans son propre camp semble plus utile, les russes ne méritent pas que des hommes libres meurent contre eux.

    1. Entièrement d’accord. D’après ce que j’ai lu, le dossier est en attente de l’approbation définitive de la Suède à l’Otan, Stokholm ne voulant pas se départir de ses avions tant qu’elle n’a pas l’assurance de pouvoir recourir au bouclier otanien en cas d’agression

  3. Je ne peut que plussoyer. La survie d’un A-10C serait fortement compromise sans l’assurance d’une supériorité aérienne.
    C’est un peu le même « problème » que l’utilisation de F-16 MLU sans suppression des défenses aériennes adverses au préalable (SEAD/DEAD). Dans les 2 cas, cela limite le potentiel offensif des 2 appareils.
    Point positif, l’Ukraine continue à faire parler d’elle, et c’est indispensable pour sa survie.
    Petite remarque sur cette affirmation « contrairement à l’avion américain, un tueur de chasse ou Shturmovik en russe » : « shturmovik » ne signifie pas « tueur de char » en russe, mais plutôt « troupe de choc », « troupe d’assaut », et par extension « avion d’attaque ».

  4. Je lis parfois votre blog car je suis spécialiste des questions géopolitiques européennes et que je m’intéresse un peu a l’aéronautique. Quelle platitude dans vos propos. On croirait lire les analyses d’un enfant de 14 ou 15 ans pendant qu’il joue a la console de jeux vidéos. Votre parti-pris en faveur de l’Ukraine et de son président sont totalement a contre-courant de ce que pensent les gens sérieux en France et même en Europe. Demandez donc aux conseillers stratégiques d’Eric Ciotti ou de Jordan Bardella comment ils analysent cette guerre et vous verrez. Je vous invite a très vite réctifier votre position et a retrouver le sens commun. L’avenir ce n’est ni l’OTAN ni l’Ukraine l’avenir de la France c’est la Russie. Et cessez immédiatement de taxer le président Poutine de dicteur cela pourrait bien vous conduire devant les tribunaux pour diffamation. Et par pitié soignez votre orthographe ou alors cessez immédiatement de vous prétendre journaliste.
    François Griveaud, conseiller spéciale en géopolitique.

    1. Encore un troll collabos pro rusSSe , spécialiste auto proclamé des questions géopolitique européenne, raz le bol de ces mythos qui pollue ce site , si cela ne leurs convient pas , qu’ils passe leurs chemin on a pas besoin de ces pauvres types

    2. On en tient un bon là avec François le RN moscovite…
      Ou alors c’est du second degré, c’est pas possible d’être aussi niais, incroyable !

  5. Ils peuvent faire toute les demande qu’ils veulent en attendant j’ai entendu que les usa fessait en sorte de livre que très peu d’armes seulement de quoi de défendre et arrêter la progression Russie pas pour vaincre la Russie.

    Que ce passerrait t’il si il Russie perdait totalement la guerre et que poutine était renversé ? Un effondrement de la Russie une puissance nucléaire et ça pour les américains c’est impossible ils pourrait y avoir pire que poutine à la tête de la Russie ou même des tête nucléaire vole comme à la chute de l’URSS donc les américains sur ça sont pragmatiques,
    Donner des armes aux ukrainiens ce qui faut pour stopper la progression Russie mais pas trop pour faire gagner l’Ukraine face à la Russie les usa veulent une fin de la progression Russe pas une chute de la Russie d’ailleurs c’est ce qui arrive depuis 1 an les lignes sont bien défini sur le front

    1. La fin de la guerre il y en a un qui l’a en main : le dictateur russe Vladimir Poutine. C’est lui qui a décidé en 2014 d’envahir et d’annexer la Crimée puis en 2022 d’envahir et d’annexer le Donbass tout en bombardant le reste de l’Ukraine. Qu’il ordonne à ses troupes de se retirer de tous les territoires envahis en Ukraine et là guerre sera terminée. L’Ukraine n’est pas la Russie, ce n’est pas une nation belliqueuse, ce n’est pas une dictature ultranationaliste. Tant que cela n’aura pas eu lieu il faudra que les Alliés continuent d’armer les Ukrainiens.

    2. Étonnamment, du temps de la guerre froide, le A-10 était vu par les vu par les Américains comme un avion ayant une très courte espérance de vie face aux forces du pacte de Varsovie. Que c’était en quelque sorte un avion sacrifiable dont l’utilité était de stopper momentanément le déferlement des blindés de l’Est.

      Citation Wikipédia:
      Les états-majors prévoyaient alors que, si les A-10 étaient entrés en action, 7 % des appareils auraient été perdus par 100 sorties. Comme il était attendu que chaque pilote effectue plus de quatre missions par jour, chaque base aurait dû en théorie générer plus de 250 sorties par jour. Au taux de pertes attendu (peut-être sous-estimé), au moins 10 A-10 de chaque base auraient été abattus par jour. À ce rythme, en moins de deux semaines, toute la force d’A-10 de l’époque – autour de 700 avions – aurait été détruite et les pilotes tués, blessés, capturés ou tout au moins très « secoués ».

      Dans le calcul de la planification d’une éventuelle Troisième Guerre mondiale, on considérait que sacrifier une flotte entière d’avions de combat et tous ses pilotes dans l’objectif de la destruction de plusieurs divisions blindées soviétiques était stratégiquement acceptable.

  6. Pour autant que je sache, les A-10 sont sont interdits à l’export. Cette partie du dossier est donc probablement réglé. Et même sans cela, la logistique (formations, armements, pieces de rechange) nécessaire pour transférer des A-10 à l’Ukraine rend ce scénario quasiment impossible.

    Pour les AH-1W, je doute que les USA acceptent d’en livré.

    Au point où la guerre est rendu (comprendre que l’OTAN arme et entraîne directement les forces ukrainienne), pourquoi ne pas intervenir directement?

    Je veux dire, il est hypocrite de livrer des tonnes d’équipements militaires et des renseignements, et de dire haut et fort que l’ont me veut pas s’impliquer.

    1. Personne au sein des Alliés prétend ne pas vouloir s’impliquer militairement dans la guerre contre la Russie. Simplement il existe bien des manières de le faire, et la fourniture d’avion de combat, de pièces d’artilleries, ou encore de munitions en est une. Des pays comme le Canada, les États-Unis, ou encore la France agissent de cette manière.

  7. Bonsoir,
    Bien que je soit un très grand fan de l’A10, je ne peux que répéter ce que je pense être le meilleur soutien aéronautique à l’Ukraine: le F-16, le F-16, le F-16, le F-16 et aucun autre type d’avion.

  8. Vous me faite rire vous les occidentaux avec vos A10. Que vont-ils faire contre les meilleures chasseur du monde comme le SU35, le SU57, et le MIG31? Rien du tout. La guerre est gagné par la Russie vous avez perdue.

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