L’entre-deux-guerres fut une des périodes les plus fastueuses de l’histoire aéronautique au nombre de projets menés et réalisés. Durant les deux décennies entre 1918 et 1939 de nombreux pays européens s’essayèrent à la réalisation d’aéronefs en série, certains avec plus de succès que d’autres. Un des pays qui tira son épingle du jeu fut l’Italie du dictateur Benito Mussolini. Ses constructeurs se lancèrent tous azimuts dans des programmes parfois hasardeux parfois totalement dans l’ère du temps. Un des plus étonnants concerna un biplan d’envergure inégale dédié à la reconnaissance tactique : le Meridionali Ro.30.
Entre sa fondation en 1923 et le début des années 1930 la société Industrie Meccaniche e Aeronautiche Meridionali, mieux connue comme Meridionali, se spécialisa dans le développement d’avions civils légers comme le Ro.5 et la construction sous licence locale d’appareils étrangers à l’image des Ro.1 et Ro.10. Ces derniers étaient respectivement l’avion de reconnaissance Fokker C.V et l’avion de transport léger Fokker F.VII. Ces chantiers réalisés en collaboration avec le fameux industriel néerlandais offrit aux ingénieurs et ouvriers italiens une véritable expérience.
Aussi quand en 1929 la Regia Aeronautica annonça chercher un remplaçant à ses monoplans parasols de reconnaissance tactique Ansaldo A.120 Meridionali décida de proposer un avion. Elle ne fut pas la seule société en lice. Caproni proposa son Ca.105 face au Meridionali Ro.30. Les deux avions étaient très différents. Caproni pariait sur un monoplan à aile haute disposant d’un train d’atterrissage classique à large voie animé par un moteur à sept cylindres en étoile Armstrong Siddeley Lynx assemblé sous licence locale par Alfa Roméo. L’avion de Meridionali était très différence. En effet le Ro.30 se présenta sous la forme d’un biplan d’envergure inégale à cabine fermée animé lui par un Bristol Mercury à neuf cylindres en étoile lui aussi sous licence italienne.
Si le Ca.105 vola très rapidement, dès l’été 1930, il fallut attendre le printemps 1932 pour que le Ro.30 en fasse de même. Malgré ce retard c’est l’avion de Meridionali qui fut sélectionné par la Regia Aeronautica. L’aviation fasciste passa commande alors pour douze exemplaires. On était alors bien loin de la quarantaine d’A.120 en dotation à l’époque sous cocarde italienne. En fait le concept d’avion de reconnaissance diurne à vue était passable dépassé. Pourtant le contrat fut signé. Le Ca.105 termina sa carrière comme avion de transport léger.
Esthétiquement parlant le Meridionali Ro.30 ne ressemblait à rien qu’on puisse voir à l’époque. Construit en métal et contreplaqué c’était un biplan d’envergure inégale prévu pour un équipage de trois personnes. Il possédait un train d’atterrissage classique fixe doté d’une roulette de queue. Le pilote s’installait dans un poste de pilotage totalement fermé tandis que son navigateur prenait place dans un second poste séparé de celui-ci et lui aussi fermé installé sous le plan supérieur de voilure. Enfin l’observateur volait lui derrière la voilure à l’air libre. Son armement se résumait à trois mitrailleuses Breda-SAFAT de calibre 7.7 millimètres montées pour l’une en position de chasse et les deux autres sur affût mobile arrière. Son moteur Bristol Mercury construit localement par Alfa Romeo développait 530 chevaux et entraînait une hélice bipale en bois et métal. Au septième exemplaire construit le moteur Mercury fut remplacé, pour des raisons économiques, par un Bristol Jupiter de même architecture mais développant 30 chevaux de moins et produit par Piaggio.
Les avions de série entrèrent en service au début de l’année 1933. La particularité notable de la petite flotte de Meridionali Ro.30 de la Regia Aeronautica c’est que jamais elle ne servit au sein d’une seule unité de reconnaissance. Les appareils étaient répartis deux par deux dans des unités évoluant aussi bien sur d’autres avions de reconnaissance que sur des bombardiers. Leur emploi fut donc un véritable casse-tête. Heureusement pour l’aviation italienne ils n’eurent pas une carrière très longue. En décembre 1935 tous avaient quitté la première ligne remplacés par le Meridionali Ro.37 nettement plus réussi. Ils furent relégués (une fois leur armement déposé) au remorquage de cibles volantes. En décembre 1937 plus aucun Ro.30 ne servait.
Jamais exporté et construit en toute petite série le Meridionali Ro.30 est un avion de reconnaissance qui ne connut jamais le feu. Sans une architecture pour le moins très originale il aurait sans doute sombrer dans l’oubli. Premier avion militaire 100% de conception Meridionali il ne reste de nos jours plus rien de lui.
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