Seconde Guerre mondiale: la Grande-Bretagne et l’Amérique au secours de l’URSS

Cette année marque le 80ème anniversaire de la fin de la Seconde Guerre mondiale. Cette guerre a façonnée le monde dans lequel nous vivons aujourd’hui. La défaite de l’Allemagne nazie et de l’Empire du Japon donnèrent l’espoir qu’enfin une paix durable allait dorénavant régner sur la planète. Mais à l’issue du conflit, il restait un dictateur encore au pouvoir et aux visées expansionnistes qui mena rapidement à la Guerre froide qui va perdurer jusqu’à la chute du Mur de Berlin et l’effondrement de l’URSS.

Les dictateurs veulent toujours réécrire l’histoire afin d’exacerber le sentiment nationaliste, tout en inventant des ennemis de la nation afin de consolider leur mainmise sur le pouvoir. Un certain Poutine en est l’exemple frappant. Selon la vision du dictateur actuel de la Russie, l’URSS aurait pratiquement défait à elle seule le nazisme lors de la Grande Guerre patriotique ! Certes l’URSS a payé un lourd tribut lors de ce conflit, mais l’aspirant Tsar occulte le fait que sans l’aide des alliés occidentaux, les villes de Moscou, Leningrad et Stalingrad seraient sans doute tombées aux mains des troupes allemandes.

Mal préparé à la guerre, Staline avait signé un pacte de non-agression avec l’Allemagne nazie qui prévoyait notamment le dépeçage de la Pologne. L’URSS, qui avait également des visées sur une partie du territoire de la Finlande, lança une offensive contre ce petit pays en novembre 1939. Convaincus d’une victoire rapide, les troupes soviétiques vont plutôt subir une raclée humiliante durant la Guerre d’hiver de 1939-1940. Cela n’est pas sans rappeler des évènements plus récents en Ukraine, que le révisionniste en chef du Kremlin a le culot de traiter de régime nazi afin de justifier une guerre injustifiable. Bien malgré nous, nous voici replongés en pleine Guerre froide version 2.0 qui n’augure rien de bon, si ce n’est un renforcement de l’OTAN.

Mais revenons aux heures sombres de l’Opération Barbarossa. Le Blitzkrieg  se met en branle le 22 juin 1941 et les troupes soviétiques subissent alors toute une déculottée ! Plus de 2 700 avions allemands attaquent les aérodromes soviétiques. En quelques jours, près de 1 500 avions soviétiques sont détruits au sol, et près de 400 sont abattus en plein vol. Pour la plupart obsolètes face aux chasseurs allemands, les appareils soviétiques ne font pas le poids. Désorganisée suite aux purges staliniennes et mal équipée, l’Armée rouge est sur le point de s’effondrer.

Les Britanniques furent les premiers à secourir l’URSS, malgré le fait qu’elle ne pouvait encore compter que sur ses principaux alliés du Commonwealth. Des chasseurs Hawker Hurricane, initialement pilotés par des Britanniques, sont apparus en URSS dès les premiers mois de la guerre afin de pallier de toute urgence à l’hécatombe subie par l’armée de l’air soviétique. Les chasseurs britanniques couvrent alors en priorité les convois arctiques d’approvisionnement et protègent Moscou. Environ 3 000 appareils Hurricane furent livrés à l’URSS. Afin d’accroître leur force de frappe, les Soviétiques vont modifier ces chasseurs britanniques en remplaçant les huit mitrailleuses de 7,7 mm d’origine par deux canons ShVAK de 20 mm et deux mitrailleuses de 12,7 mm.

Suivront plus tard environ 1 300 appareils Supermarine Spitfire. Rapides, maniables et faciles à piloter, les Spitfire Mk.V frappés de l’Étoile rouge s’illustrèrent lors des combats aériens au printemps-été 1943. À partir de février 1944, des appareils Spitfire Mk.IX, commencèrent à être livrés à l’URSS, mais celle-ci disposait déjà de ses propres chasseurs indigènes en nombre croissant, ainsi que de nombreux chasseurs américains davantage adaptés à ses besoins.

Des 17,5 millions de tonnes d’aide des Alliés acheminés à l’URSS, 94% de ce tonnage provint des États-Unis dans cadre du programme Prêt-Bail (Lend-Lease). Pour donner une idée de l’ampleur de l’aide fournie, les Américains ont utilisé 22 millions de tonnes de matériel durant toute la campagne d’Europe. Côté matériel roulant, les Américains vont fournir à l’URSS plus de 1 900 locomotives, 152 000 camions, 52 000 Jeeps, 4 000 chars Sherman, sans compter les milliers de canons automoteurs. Plus de 50% des munitions utilisées, 30% des avions militaires et 60% du carburant d’aviation utilisés par les Soviétiques durant le conflit proviendront également de l’Amérique. En tout, l’URSS a reçu environ de 15 000 avions fabriqués aux États-Unis. Près de la moitié d’entre eux ont été initialement livrés par convois maritimes via l’Atlantique Nord ou par la voie des airs au-dessus de l’Atlantique Sud, l’Afrique et la Perse. Plus tard, les livraisons d’avions s’effectuèrent par un trajet un peu moins hasardeux via le Canada, l’Alaska et la Sibérie, soit la voie aérienne du Nord-Ouest.

Passons en revue les avions américains qui ont combattu sous les couleurs de l’URSS, en commençant par le Curtiss P-40 Tomahawk qui sera livré à environ 2 400 exemplaires. Dès l’automne 1941, des P-40 participaient à la défense de Moscou et de Leningrad aux côtés des Hurricane britanniques. Les P-40 se distinguaient par leur grande résilience. Plus d’une fois, s’étant retrouvés sans munitions, des pilotes soviétiques ont pratiqué des tarans avec leur P-40 et réussirent tout de même à retourner à leur aérodrome.

Le Bell P-39 Airacobra fut toutefois le chasseur américain préféré de plusieurs as soviétiques, dont Alexandre Pokrychkine et Grigori Retchkalov (65 victoires chacun). Il fut également le plus utilisé avec près de 5 000 exemplaires fournis à l’URSS. Apprécié pour sa capacité de survie incroyable, il pouvait continuer la bataille même criblé de balles. Moins apprécié des Alliés occidentaux, car peu performant à haute altitude, le P-39 convenait parfaitement au front de l’Est.  Les combats s’y déroulaient principalement à moyenne et basse altitude où le P-39 excellait. Sa puissance de feu était redoutable: un canon de 37 mm, deux mitrailleuses de gros calibre (12,7 mm) et deux autres de calibre 7,62 mm.

Les Américains ont conçu le Bell P-63 Kingcobra en tenant compte des besoins de l’aviation soviétique et de l’expérience de combat aérien accumulée sur le front de l’Est. Version améliorée du P-39, le P-63 pouvait performer aussi bien à haute qu’à basse altitude. Au total, l’URSS a reçu environ 2 400 appareils de ce type. Ils furent livrés durant la dernière année de la guerre et n’ont pratiquement pas participé aux hostilités contre l’Allemagne. Les Kingcobra ont plutôt combattu sur le front oriental pendant la courte Guerre soviéto-japonaise. Nommés Fred selon le système de codification de l’OTAN, l’URSS continua à utiliser le P-63 jusque dans les années 1950,

L’aide américaine durant la guerre ne se limita pas uniquement aux avions de chasse. Parmi les 3 800 bombardiers fournis à l’URSS, le principal fut le Douglas A-20 Havoc livré plus de 3 000 exemplaires. Rapide, manoeuvrable et fiable, le A-20 fut très apprécié des pilotes soviétiques. En URSS, l’armement de ce bombardier fut modifié : les mitrailleuses américaines de 7,62 mm furent remplacées par des Berezin UB de gros calibre (12,7 mm) et parfois, des canons ShVAK de 20 mm. Frappés de l’étoile rouge, les A-20 furent utilisés comme bombardier tactique de jour et de nuit, avion de reconnaissance, chasseur de nuit et avion d’attaque. L’URSS utilisa également l’A-20 dans des rôles inédits: bombardier-torpilleur et avion mouilleur de mines.

Livrés en moins grand nombre que les A-20, les North American B-25 Mitchell furent tout autant appréciés. Déployés dans des unités de première ligne à compter de 1942, quelques 870 appareils B-25 furent acheminés à l’URSS. Durant les raids de nuit, ses qualités pouvaient être pleinement exploitées: excellent matériel de navigation, grand rayon d’action et importante charge offensive afin de détruire les cibles stratégiques à l’arrière des lignes allemandes. Très facile à piloter, le B-25 servait aussi pour la formation des jeunes pilotes. Sous le nom code Bank attribué par l’OTAN, nombre de B-25 demeurèrent en service en URSS jusqu’au milieu des années 1950, notamment à des fins de transport et de formation de pilotes.

L’URSS bénéficia également de l’envoi de 700 avions de transport Douglas C-47 Skytrain durant le conflit. Pourtant, l’URSS produisait déjà une version locale du DC-3 sous licence, soit le Passazhirskii Samolet GAZ-84. Toutefois, lors du début de l’invasion allemande, l’URSS disposait d’un nombre insuffisant d’avions de transport. Il faudra attendre la mise en production ultérieure d’une version plus évoluée, soit le Lisunov Li-2, pour que l’URSS puisse enfin disposer des milliers d’exemplaires requis. Fait inusité, un certain nombre d’appareils Li-2 destinés à des missions de bombardement furent équipés d’une tourelle dorsale munie d’une mitrailleuse mobile UBK de 12.7mm.

Du côté des hydravions, l’URSS a également bénéficié du légendaire Consolidated PBY Catalina développé par les États-Unis. Dès 1937, elle négocia un contrat avec Consolidated Aircraft pour l’achat de trois PBY-2, ainsi que le droit de produire le Catalina en URSS sous licence. Ces Catalina soviétiques furent motorisés avec des Shvetsov ASh-62, une copie du moteur Wright Cyclone R-1820 également fabriqué sous licence. En 1938, un groupe de 18 ingénieurs américains fut envoyé à Taganrog, sur les rives de la mer d’Azov, pour participer à la construction de l’usine soviétique. En octobre 1941, lorsque l’armée allemande prit Taganrog, moins d’une trentaine d’hydravions avaient été construits, reflétant le dysfonctionnement de l’URSS. Des 860 hydravions de tous types présents dans l’arsenal soviétique au moment de l’invasion allemande, seuls 271 avaient survécu. À la demande de la marine soviétique, une version modifiée du Catalina, soit le Naval Aircraft Factory PBN-1 Nomad, fut fournie à l’URSS à environ 150 exemplaires. Une des caractéristiques du PBN-1 était l’augmentation de la taille des réservoirs de carburant de l’hydravion, permettant une autonomie de 50 % supérieure au Catalina. Les PBN-1 soviétiques vont demeurer en service jusque dans les années 1950 et affublés du nom de code Mop par l’OTAN.

Bien sûr, il faut reconnaître que l’URSS va produire d’excellents avions en quantité considérable plus tard dans le conflit, lorsque les usines déplacées plus à l’Est vont tourner à plein régime. On à qu’à songer aux Ilyushin Il-2 Sturmovik, Petlyakov Pe-2Lavochkin La-7 et Yakovlev Yak-3. Mais n’eût été de l’aide massive des Américains, le régime soviétique se serait sans doute écroulé tout comme ce fut le cas de la Russie impériale lors de la Première Guerre mondiale. Mais la Russie d’aujourd’hui, sous la férule du dictateur Poutine, cherche à effacer ces fait des livres d’histoire. Ira-t-il jusqu’à faire disparaître les monuments érigés sur son propre territoire et rappelant ce chapitre de la Seconde Guerre mondiale ?

Monument commémorant la Voie aérienne du Nord-Ouest / Kirensk, Russie

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Marcel
Fils d’un aviateur militaire (il est tombé dedans quand il était petit…) et biologiste qui adore voler en avion de brousse, ce rédacteur du Québec apprécie partager sa passion de l'aéronautique avec la fraternité francophone d’Avions Légendaires.
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