Le transport aérien militaire russe, l’autre grand absent de la guerre contre l’Ukraine.

Plus la guerre en Ukraine avance et plus les failles de l’aviation militaire russe nous apparaissent au grand jour. Alors que du temps de l’URSS c’était une des forces de l’aviation stratégique soviétique il semble désormais confirmé que le transport aérien militaire ne soit plus en Russie que l’ombre d’elle-même. La preuve en est sa quasi totale absence d’un ciel ukrainien où les généraux de Moscou craignent sans doute d’y perdre des avions face à la puissance de feu et à la détermination de la résistance locale. La perte d’un Ilyushin Il-76 Candid au début du conflit n’y est sans doute pas non plus pour rien.

Le dictateur russe Vladimir Poutine clame à qui veut l’entendre que son armée et son aviation mènent en Ukraine une opération de «dénazification». Il se place ainsi dans les pas de son illustre prédécesseur Staline, un homme tout aussi peu respectueux que lui de la nature humaine. Sauf que le dirigeant soviétique reste dans les livres d’histoire comme un vainqueur de la Seconde Guerre mondiale, à jeu égal avec le duo américain Roosevelt-Truman et avec le premier ministre britannique. Churchill.
Que retiendra justement l’Histoire de Vladimir Poutine ? La Tchétchénie, la Syrie, et l’Ukraine. Alors pour sauver les meubles il prétend «dénazifier» ce dernier pays. Personne évidemment, en dehors de son opinion publique et de quelques uns de ses crédules alliés, n’y croit.

Ilyushin Il-76 Candid.

Mais quitte à faire un parallèle avec la guerre contre l’Allemagne nazie il faut remarquer que là où l’URSS était puissante la Russie est faible : le transport aérien militaire. La loi américaine de Prêt-Bail avait bien aidé les Soviétiques. Et durant la guerre froide leur aviation de transport militaire est devenu la référence. Il faut dire qu’avec un territoire de vingt-deux millions et demi de kilomètres carrés l’Union Soviétique avait besoin de cette aviation. On pourrait croire qu’avec dix-sept millions de kilomètres carrés il en serait toujours autant aujourd’hui en Russie.
Jusqu’à fin février 2022 on le croyait, depuis cela a bien changé.

En fait à l’image des avions furtifs les avions de transport militaires russes sont bien absents du ciel ukrainien. À croire qu’à Moscou on craint vraiment la DCA fournie par les Alliés. Avec la prise de contrôles de bases aériennes et de plateformes aéroportuaires ukrainiennes on aurait largement pu croire que les Antonov An-124 Condor et les Ilyushin Il-76 Candid russes allaient pouvoir déployer un véritable pont aérien. Il n’en a été rien puisque justement les dites forces russes ont eu le plus grand mal à s’emparer des dits terrains d’aviation. Depuis le début de la guerre ils en ont même perdu, au profit de la résistance armée ukrainienne.

Restait alors le transport tactique, encore articulé en Russie autour de vieux Antonov An-12 Cub et An-26 Curl d’origine soviétique. On les attendait, ainsi que les avions plus légers comme le Let L-410UVP Turbolet, dans les missions de parachutages de troupes aéroportées. Là encore grosse déception ils n’ont brillé que par leur absence.

En fait la DCA, notamment celle fournie par les Américains et les Européens mais aussi celle saisie sur les troupes russes en déroute, n’est qu’une partie de l’explication de l’absence du transport aérien militaire russe. Il ne faut pas oublier que Moscou n’a jamais réussi à pleinement avoir la supériorité aérienne, la maîtrise du ciel ukrainien. Les chasseurs ukrainiens, et notamment les Mikoyan MiG-29 Fulcrum ont toujours continué à décoller au grand dam de la propagande moscovite.
Il reste un dernier point : la psychologie. Non pas celle de Vladimir Poutine mais celle de ses généraux. Avoir perdu un Il-76 Candid avec plus de 150 personnes à bord dans les premières heures de la guerre a dû forcément en refroidir plus d’un. Car même dans une Russie où les médias ne sont pas libres de dire ce qu’ils veulent une telle perte ne passe pas inaperçue. Les familles pleurent leurs morts et au bout d’un moment elles parlent à la presse.

Antonov An-12 Cub.
Antonov An-26 Curl.
Antonov An-124 Condor.
Let L-410UVP Turbolet.

Mis bout à bout tout cela dessine finalement une aviation de transport militaire russe déliquescente basée encore à plus de 90% sur des avions datant de la guerre froide. Pour mémoire l’URSS s’est effondrée en 1990. Ses avions volent toujours, enfin sur le papier car dans la réalité opérationnelle ils semblent bien souvent absents du champs de bataille.
Poutine peut se rêver en Staline ou en Khroutchev il n’a pas leur puissance militaire ni même leur aura historique. Son aviation militaire en est la démonstration flagrante.

Photos © ministère russe de la défense.


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Arnaud
Passionné d'aviation tant civile que militaire depuis ma plus tendre enfance, j'essaye sans arrêt de me confronter à de nouveaux défis afin d'accroitre mes connaissances dans ce domaine. Grand amateur de coups de gueules, de bonnes bouffes, et de soirées entre amis.
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Commentaires

5 Responses

  1. Super article et j’adore les photos. Encore merci Arnaud de ne pas tomber dans la facilité de ces sites qui encenssent l’opération russe. J’aime vos belles valeurs contre la betise poutinienne.

  2. Au contraire des an-124 ukrainiens étant restés hors d’ukraine, qui, eux, jouent pleinement leur rôle dans le renfort occidental humanitaire et militaire.

  3. Je crois que les Russes ne souhaitent juste pas engager leur aviation de transport. Son efficacité en matière de transport stratégique a été démontrée avec le déploiement en quelques jours de plusieurs milliers d’hommes au Kazakstan en fin d’année 2021. Comme vous le soulignez, cette maîtrise très relative du ciel empêche la mise en œuvre des gros porteurs, particulièrement vulnérables.

  4. Dans un pays continental, le transport ferroviaire, n’est pas une mauvaise option, bien sur le bombardement des lignes est le point faible, mais les attaques en Russie sont exceptionnelle (le sabotage moins parait il). Il y a quelques mois, j’ai vu passer une manœuvre sino-russes ou une armée chinoise (avec tank) a pris le train sur 3.500 Km pour venir « secourir » les russes sur le front européen.

    En terme opérationnel le champs de bataille étant juste de l’autre coté de la frontière. C’est normal qu’ils n’utilisent pas le transport aérien. La grande question de ces matériels est : Sont ils encore opérationnel, sont ils modernisées (flare chaff and co) ?

  5. Je ne préjuge pas sur l’état du transport russe (qui est peut être effectivement en lambeau, je ne sais pas). Mais pas sûr du tout que son absence au dessus de l’Ukraine soit un bon exemple pour arriver à cette conclusion.

    Poutine fait la guerre à un voisin avec qui ils partagent une immense frontière terrestre, et dont en plus le front se situe à une centaine de km de ladite frontière (Donbass, nord de la crimée, ou meme Kyiv et au sud de la biélorussie au début de l’invasion)
    L’utilisation de transport aérien militaire au cœur de l’Ukraine contestée serait au contraire une abération logistique et stratégique dans ce conflit. Cela me semble de la logique pure quand le transport routier et ferroviaire sont encore disponible et encore relativement sûrs et accessibles (et surtout bien plus efficace quand on voit le nombre de véhicules que peut transporter un train Vs un avion cargo, aussi gros que soit ce dernier).

    Mais sinon, bel article de présentation des moyens dont disposent les russes 😉

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