La question peut sembler saugrenue mais elle se pose vraiment au Brésil. Si vous préférez ce que la rue et les parlementaires brésiliens se demandent de plus en plus c’est quelle est l’utilité d’avoir une chasse embarquée si on ne possède plus de porte-avions ? Plusieurs options sont actuellement sur la table, comme l’abandon pur et simple des actuels Douglas AF-1 Skyhawk. Une autre solution est envisagée, demandant cependant une mutation profonde de la chasse navale brésilienne.
Il y a quelques semaines déjà nous nous faisions l’écho de ce débat qui secoue actuellement le Brésil. Sauf que les choses s’accélèrent et que désormais la disparition complète d’une aviation embarquée sur aéronefs voilures fixes est clairement à l’ordre du jour.
Plusieurs facteurs semblent jouer en ce sens, à commencer par le vieillissement confirmé des avions de combat. Les AF-1B/C Skyhawk actuels sont en fait de vieux A-4KU et TA-4KU rachetés de seconde main auprès de la Kuwait Air Force. On pourrait donc se dire que la Marinha do Brasil est le second utilisateur de ces avions d’attaque ? Et c’est faux. En effet avant la cocarde du Koweït ils ont porté celle des États-Unis, de l’US Marines Corps et de l’US Navy en fait. Les A-4KU étaient alors connus comme A-4M et les TA-4KU comme TA-4J. Ce sont donc des avions usés malgré leur modernisation réalisée par Embraer au cours de la décennie précédente. Mais surtout le facteur numéro 1 pour Brasilia afin de faire disparaître cette chasse embarquée provient du fait qu’elle n’est plus embarquée du tout. Pour rappel son ancien porte-avions rouille au fond de l’Atlantique sud depuis trois mois déjà.
Les prérogatives de la Marinha do Brasil n’offrent aucune capacité de défense aérienne du territoire à ses chasseurs. Celle ci est la chasse gardée de la Força Aérea Brasileira. C’est donc un troisième facteur en faveur de la disparition prochaine, et désormais inéluctable des Douglas AF-1 Skyhawk.
Une option est pourtant de plus en plus sur la table des négociations : le remplacement par un avion plus récent et surtout totalement adapté à la flotte brésilienne. Son seul navire capable de recevoir des avions étant le porte-aéronefs Atlântico elle devra donc se convertir aux décollages et atterrissages verticaux. Ça tombe alors bien que quand il s’appelait encore HMS Ocean il ait pu embarquer des BAe Harrier GR Mk-7.
Bien sûr on pourrait se dire que c’est une nouvelle aubaine pour Lockheed-Martin d’offrir un marché inédit à son F-35B Lightning II. Ce serait pourtant nier une variante essentielle dans le dossier : la diplomatie. L’administration Biden apposera forcément son véto à l’exportation du chasseur de 5e génération à un pays qui n’a pas condamné officiellement l’agression russe de l’Ukraine. En outre il n’est pas évident que le Brésil ait en 2023 les moyens financiers d’acheter cette machine.
Si la Marinha do Brasil veut absolument maintenir une chasse embarquée elle devra donc acquérir des Harrier II de seconde main, soit de facture américaine soit de construction britannique. Elle devra également acheter quelques biplaces d’entraînement avancé.
Alors révolution copernicienne ou simple abandon de toute chasse navale à court ou moyen terme ? Le choix brésilien marquera aussi ses ambitions à demeurer ou non la première puissance militaire sud-américaine. Le président Lula da Silva va t-il comme son prédécesseur caresser les militaires dans le sens du poil ou chercher à réduire les inégalités sociales du pays quitte à se mettre sa propre marine à dos ? L’avenir nous le dira sans doute très vite.
Photos © Marinha do Brasil
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6 Responses
Pour les Harrier, il faudra l’accord des USA et/ou des anglais. Autant dire qu’il risque d’y avoir le même refus que pour le F-35, le but étant de mater les alliés des russes.
Le Brésil est loin d’être un allié de la Russie, il ne faut pas croire les mensonges de Lavrov. Lula ne condamne pas l’agression de février 2022 mais il est très critique vis à vis des bombardements contre les civils ukrainiens.
De mon point de vue, le Brésil avec le BRIC est devenu un état non amical vis à vis de l’Occident dans le cas contraire la géopolitique du Brésil laisse dubitatif
Le Brésil reste le Brésil c’est un état non aligné comme il l’était durant la guerre froide. Il faut se souvenir, c’est tout. Je rappelle que la France fournit 75% des hélicoptères militaires et parapubliques brésiliens, c’est un allié économique.
Mais pour quoi faire ? Le coût d’un groupe aéronaval a considérablement augmenté et le Brésil a vraisemblablement des investissements plus importants à considérer pour sa défense. La défense aérienne ne compte que 36 Saab-Gripen ce qui peut sembler dérisoire en regard de l’étendue de son territoire. Par ailleurs le contrôle des zones forestières au nord du pays est un enjeu sérieux de souveraineté pour le pays et il n’est pas sûr qu’il dispose des moyens aériens nécessaire. Dans ce contexte et compte tenu du fait que des interventions extérieures brésiliennes s’effectueront vraisemblablement dans la région Caraïbe le remplacement du porte avion Sao Paulo par le porte hélicoptère Atlantico apparaît comme un choix sensé.
ne pas oublier que malgré les aides à la navigation, une attaque en pleine mer demande un pilote ayant de sérieuses connaissances maritimes, d’autres pays on des aéronautiques navales sans porte aéronefs , pour bénéficier de cette double culture navale ET aérienne.