En ex-URSS le Dassault Aviation Rafale F4 peut-il faire coup double ?

Le monde change, les équilibres diplomatiques et stratégiques évoluent. Ainsi alors que l’option d’une commande ouzbèque du Rafale F4 devient raisonnablement possible un autre pays des steppes d’Asie Centrale pointe désormais son nez. On parle, à plus long terme, d’un futur possible accord entre la France et le Kazakhstan, marquant ainsi un nouveau recul de Moscou auprès d’un pays jadis placé sous son joug. En fait le Dassault Aviation Rafale devient peu à peu le champion des pays qui ne veulent acheter ni auprès des États-Unis ni de la Russie.

Non alignée la France ? Absolument pas. Pourtant ses productions mettent les pays acquéreurs à l’abri des sanctions américaines de la loi CAATSA. Surtout le Dassault Aviation Rafale F4 est aujourd’hui à peine plus cher qu’un Lockheed-Martin F-16V Viper tout en disposant d’une panoplie d’armement plus vaste et d’une capacité d’emport 25% supérieure avec un rayon d’action bien plus important. À la différence de ce dernier l’avion français n’a pas besoin d’un accord de Washington DC pour être vendu et peut intégrer des armements non américains… comme américains. Il permet également d’offrir à ses clients une capacité accrue de polyvalence, pouvant remplir aussi bien des missions air-air qu’air-sol et même de reconnaissance tactique. En outre le Rafale est combat proven, et ce depuis plusieurs années maintenant.

Après donc l’Ouzbékistan et alors que l’Ukraine également s’intéresse de près à lui il est désormais officiel que le Kazakhstan penche en faveur du Rafale. Mais sur une périodicité différence du premier de ces ex pays soviétiques. Là où Tachkent entend à priori régler la question avec Dassault Aviation dans les mois à venir, c’est à dire en 2024, Astana est moins pressée. Le Kazakhstan serait plus sur une échéance à l’horizon 2025, un peu comme l’Ukraine. Comme pour l’Ouzbékistan c’est le sous-sol kazakh qui devrait lui offrir la possibilité d’acheter l’avion français. Entre le pétrole de la mer Caspienne et les gisements de chrome et d’uranium les Kazakhs sont assis sur une manne indiscutable. Et là encore comme l’Ouzbékistan le Kazakhstan a commencé à remplacer des aéronefs d’origines russes et/ou soviétiques par des appareils de production européenne : Airbus DS C-295M et Eurocopter EC-145 sont déjà en service tandis que deux A400M Atlas sont en phase de commande depuis 2021. Ils doivent prochainement être livrés.

Dans ce pays les Dassault Aviation Rafale F4 permettraient de remplacer les vieux Mikoyan-Gurevitch MiG-23 Flogger et MiG-27 Flogger-D ainsi sans doute qu’une partie des surpuissants MiG-31 Foxhound régulièrement cloués au sol faute de pièces détachées. Là encore l’industrie aéronautique russe ne brille guère par sa capacité à honorer ses contrats auprès de ses clients. Au risque de les faire fuir et de les jeter dans les brans de la France.
Les très bonnes relations diplomatiques entre Emmanuel Macron et Kassym-Jomart Tokaïev expliquent aussi sans doute que le Rafale puisse ainsi envisager de s’imposer dans ce pays jadis soviétique. Et pour Gaëtan ce sera sans doute l’occasion de nous proposer une nouvelle affiche de grande qualité.

Plus encore que l’implantation de la France c’est donc surtout la totale perte de vitesse de la Russie auprès de ses ex vassaux qui se dessine. Des pays que Paris considère comme des partenaires, comme ses égaux, et non comme inférieurs. Grosse différence de point de vue vis-à-vis de Moscou. Maintenant la balle est dans le camp de Dassault Aviation qui va devoir rapidement revoir ses cadences de productions à Mérignac s’il veut suivre les commandes. Engranger les contrats (ou les intentions de ventes) c’est bien construire dans les temps c’est encore mieux. Tout cela plaide aussi pour l’ouverture d’une chaîne d’assemblage spécifique en Inde comme cela existe pour le Sukhoi Su-30MKI Flanker-C.

Affaire à suivre.

Photo © Armée de l’Air et de l’Espace

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ARTICLE ÉDITÉ PAR
Arnaud
Arnaud
Passionné d'aviation tant civile que militaire depuis ma plus tendre enfance, j'essaye sans arrêt de me confronter à de nouveaux défis afin d'accroitre mes connaissances dans ce domaine. Grand amateur de coups de gueules, de bonnes bouffes, et de soirées entre amis.
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Commentaires

21 réponses

    1. C’était vrai à l’été 2021 Dimitri. Mais depuis de l’eau a coulé sous les ponts et des bombes sont tombées sur l’Ukraine. De nombreuses nations ex soviétiques se sont peu à peu désolidarisées de la Russie après sa décision d’aller bombarder Kiev et les grandes villes ukrainiennes. Sans compter les difficultés d’approvisionnement en pièces détachées.

      1. Certes mais néanmoins je vois mal le Kazakhstan mettre au rebus des SU-30SM flambant neuf ou avoir une double flotte d’avion de chasse pour des problèmes d’approvisionnement de pièces. Peut-être les revendre ? Mais je peut me tromper.

        1. Les Kazakhs peuvent faire le choix comme les Indiens de faire voler Su-30 et Rafale. Ce sont deux avions complémentaires.

        2. Les indiens savent produire des pièces de rechange pour leur flotte de sukoi. Ps impossible qu ils se mettent à fournir des pièces de rechanges pour les anciens clients de l uac.

        3. Oui peut-être, mais la vraie question du coup est celle-ci : ont-ils le droit avec un appareil produit sous licence de construction, de vendre des pièces de rechanges aux clients du constructeur officiel ? C’est moins sur à mon avis, mais je ne connais pas les détails de la licence attribuée par la Russie à l’Inde.

        4. C était les propos d Arnaud dans un article de mars 2022 sur l entretient de su 30 réalisé par HAL au profit de l Ouganda. Donc à mon sens rien n interdit HAL de vendre des pièces détachés dans un marché d entretien. Comme rien n interdit à la Chine de vendre des j16. A mon sens en tout cas

  1. Le problème de cadence ne concerne pas vraiment Dassault : lui n’est « que » le concepteur et intégrateur de l’appareil.
    Ce serait d’ailleurs intéressant d’avoir le pourcentage du prix final par participant dans le trio Dassault/Thalès/Safran.
    Mais le problème est ailleurs.
    Et c’est aussi un problème profond.
    Le temps industriel ne se confond pas avec le temps médiatique : nos élus veulent passer en économie de guerre mais pour passer de la parole aux actes, il faut des moyens. Hors auprès des organismes de crédit, la chose militaire continue de faire peur.
    Et en absence de prêts, passer à la vitesse supérieure est impossible : pas de budgets pour les salaires, pas d’achat de matériel ou de matière première.
    Et avec l’inflation, les coûts explosent donc tant qu’elle n’est pas stabilisée, s’engager dans un achat de plusieurs milliards assortis.d’un engagement technologique de long terme est un écueil sérieux pour les clients.

    1. Le problème vient des dizaines de fournisseurs qui fabriquent les milliers de pièces qui composent un Rafale avant l’assemblage final. Beaucoup sont des PME et ils faut qu’ils suivent la cadence des approvisionnement et ça c’est le plus compliqué. Dans le magazine « Air Actualités » il était écrit qu’un rafale c’était 500 entreprises associés au programme. Sans oublier le recrutement d’ouvriers spécialisés que ce soit chez Dassault mais aussi chez ces sous-traitants.

    2. Allons, laissons Dassault gérer son affaire, il vaut mieux trop de commandes de Rafale que pas assez comme l’on craignait il n’y a pas si longtemps que ça

  2. Franchement autant pour les sacs Lvmh je suis content que ça part a 98% a l’export, pour le Rafale ça me saoule. On en 12 qui sont canibalisés et les autres on les fait voler sans relâche… bref toutes ces ‘bonnes’ annonces devraient nous permettre d’en acheter 12-16 de plus…

    1. Sauf que sans exportation du Rafale F4 il sera difficile de réaliser le Rafale F5 et ensuite le SCAF. Donc que cela vous « saoule » ou pas il est nécessaire de vendre l’avion français à l’étranger. Et puis je préfère voir les Kazakhs et les Ouzbèques sur Dassault Aviation plutôt que sur Mikoyan ou que sur Sukhoi. Pas vous ?

  3. Bonjour Arnaud
    Juste un petit coup d’œil sur Google Map. Je vois que le Kazakhstan est totalement enclavé. Le paiement des Rafales se ferait à coup de pétrole et de minerais (chrome et uranium).
    Très bien, mais quid du transport de ces matières premières ? En passant par l’Azerbaïdjan (pays sous contrôle/domination russe, comme nous l’avons vu lors du récent affrontement avec l’Arménie). Pas sûr que l’abo… minable Poutine des Neiges soit vraiment d’accord avec ce deal. D’autant que dans ce cas, il aura – encore – perdu un marché.
    Puis le passage par la Turquie, qui fait copain-copain avec le type mentionné ci-dessus (achat de missiles anti-aérien S400) et qui tape – diplomatiquement parlant – à boulets rouges sur notre pays. Sûr qu’au moment voulu, l’In… Sultan Erdogan aura son petit mot à dire sur la question, avec une position dominante pour les Turcs… et de nécessaires concessions – pas toujours plaisantes – à faire de notre côté.
    De ce point de vue, la vente de Rafale auprès du Kazakhstan risque d’être « sport ». À moins d’un revirement diplomatique complet d’ici 2025. Je ne lis pas dans les boules de cristal, mais cela me paraît peu probable, au vu des événements politiques actuels, avec les deux compères bien installés dans leurs fauteuils pour un bon moment.

    1. Dassault ne recevra pas un paiement en matière premières on est plus à l’ère du troc, Le Kazakhstan vendra ses matières premières à ses clients habituels comme d’habitude en échange d’argent, argent qu’il pourra virer ensuite via un compte bancaire sur celui de Dassault aviation. La technologie vraiment c’est génial.

  4. Outre les problèmes d’approvisionnement et les délais de livraison qui freinent les commandes russes il y a un autre problème pour les pays d’Asie centrale ex soviétique : la peur du russe. Poutine a redit la semaine passée que les frontières de la Russie allaient aussi loin qu’ il y avait des russes. Autrement dit, les frontières légales, c’est un détail. Or il existe une important minorité éthiquement russe dans chacun de ses pays. Que se passerait-il si le Kremlin décidait d’envahir l’un d’eux ? Évidemment la Russie arrêterait de livrer des pièces détachées et de l’armement Su et MIG. Diversifier ses fournisseurs, c’est une assurance vie. Ils ne peuvent pas acheter américain. Le Rafale est la meilleure option car Itar et German free. Armement compatible indien et Emirati. Ça a du sens. Les concurrents sont pakistano-chinois et peut-être coréens mais ça poserait davantage de problèmes diplomatiques vis-à-vis des États-Unis.

    1. Ingo, déjà que la dictature russe n’arrive même pas à faire plier l’armée ukrainienne depuis 2014, cela m’étonnerait qu’ils soient capables de se montrer menaçants sur un deuxième front ailleurs… j’en veux pour preuve l’abandon totale du contingent russe qui était censé défendre la souveraineté de l’Arménie au haut karabah.
      Les russes n’arrivent même plus à fournir suffisamment leur propre aviation, ils sont technologiquement largués par l’occident, pas étonnant ensuite que de nombreux pays profitent de cette situation de faiblesse de la Russie pour « aller voir ailleurs »

      1. Mais complètement d’accord sauf que la crainte du russe est très ancrée dans ces pays. C’est le reflet de leur histoire. Il faut lire les journaux/blogs en ligne depuis l’invasion de l’Ukraine. Ce n’est pas toujours rationnel mais le peur est intense… Et je ne lis que le russe, pas les langues locales. Dans les faits, Poutine a définitivement perdu l’Asie centrale le 22 février 2022. Après la géographie compte. Le Kazakhstan possède 6000 kilomètres de frontières avec la Russie. Ils ne peuvent pas avoir les mêmes rapports que l’Ouzbékistan qui n’a plus de frontières avec le Russie. Ça se ressent dans le discours officiel.

  5. La perte d’influence de la Russie est surtout le fait de Poutine et la hausse de celle de la France est à porter au crédit de Macron. Dans quelques années les Français se rendront compte que l’actuel président est le digne héritier de De Gaulle et de Mitterrand, qu’il fait tout pour la grandeur de notre pays. Et forcément cela rejaillit sur le Dassault Rafale. Ouzbékistan, Kazakhstan, et ensuite Ukraine et peut être même la Mongolie les pays anciens communistes adorent notre avion de chasse car il est de qualité.

  6. « Le Kazakhstan serait plus sur une échéance à l’horizon 2025, un peu comme l’Ukraine. »
    Êtes-vous sûr à propos d’une commande ukrainienne ?? Certes il avait été moment évoqué que l’Ukraine commande des Rafale, mais ça c’était avant l’agression russe. Depuis le contexte a radicalement changé à cause de cette guerre. L’urgence pour l’Ukraine, c’est de recevoir les F-16 promis et aussi un petit lot de Mirage 2000. Si elle commandait des Rafale en 2025, elle ne les recevrai que vers 2028-2030, certainement trop tard pour la guerre ukraino-russe.

  7. Le Rafale, cet appareil en avance sur son temps, omnirole, aujourd’hui arrivé à maturité avec un F4 rassemblant l’essentiel des capacités d’un chasseur exceptionnel. Et qui le cotoie jour après jour sait ce qu’il a dans le ventre et sait la rupture qu’il apporte. Il est sur les rails pour devenir un avion non pas europeen mais mondial, comme l’avait prédit un homme éclairé, loin de sa terre natale et de l’Europe des errements… Aujourd’hui s’ouvre pour lui tant de possibilités que rien ne semble impossible. Et le duo Rafale F5/UCAV lui donnera encore plus une place de choix dans les airs du XXI eme siècle. Gloire au Rafale.

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