Raytheon Technologies, un nouveau géant venu de l’autre côté de l’Atlantique.

À quelques jours de l’ouverture du salon du Bourget 2019 l’apparition de ce nouveau groupe a de quoi être passionnant. Ce dimanche 9 juin 2019 les groupes industriels américains Raytheon et United Technologies Corporation ont décidé de fusionner, donnant naissance à Raytheon Technologies. Un géant qui devrait à terme devenir numéro 3 mondial, juste derrière Boeing Company et Airbus Group. De quoi rebattre les cartes dans les domaines de l’aéronautique et de la défense.

On peut aisément considérer que Raytheon Technologies résulte de la même démarche économique et idéologique que celle qui a donné naissance en France à Safran. À l’époque il s’était agi chez nous de marier le motoriste SNECMA avec l’équipementier SAGEM afin de donner naissance à un mastodonte européen de l’aéronautique et de la défense. Le résultat est assez probant même si Safran appartient encore à un peu plus de 13% au domaine publique français.
Cependant si le mécanisme est quasiment identique la situation est très différente outre-Atlantique. Safran aujourd’hui c’est 91000 employés dans le monde tandis que Raytheon Technologies ça va être 308000 employés, là aussi répartis sur toute la planète. On ne parle pas exactement de la même échelle de valeurs.

Mais au fait que sont Raytheon et United Technologies Corporation ?
Pour le grand public et une partie des passionnés d’aviation ces deux noms ne disent pas forcément grand chose. Pourtant ce sont des compagnies essentielles au fonctionnement économique et industriel de l’aéronautique et de la défense en ce premier quart de 21ème siècle. Alors effectivement aucun des deux ne produit actuellement d’avion ou d’hélicoptère en son nom propre, même pas de drone.

Commençons par Raytheon. Ce groupe existe depuis 1922 mais dans sa forme actuel il date de 1959. Ce n’est donc pas une jeune entreprise. Raytheon s’est spécialisée au fur et à mesure de son histoire dans l’armement avec notamment son best-seller le missile air-air AIM-7 Sparrow. Cette arme équipa notamment les chasseurs McDonnell F-4C Phantom II et McDonnell-Douglas F/A-18A/B Hornet. Raytheon produisit également célèbre missile anti-aérien MIM-23 Hawk qui fut utilisé aussi bien par l’Allemagne de l’ouest, la Belgique, les États-Unis, la France, ou encore Taïwan. De nombreux exemplaires assurent encore de nos jours la fonction de DCA.
Mais la production d’armement la plus célèbre de Raytheon demeure sans aucun doute le fameux missile de croisière BGM-109 Tomahawk. L’arme utilisée notamment lors des premières heures de la guerre du Golfe en 1991 a depuis été engagé partout où l’Amérique avait besoin de frapper ses ennemis avec une redoutable précision. Le missile Tomahawk est quasiment devenue une arme diplomatique pour les États-Unis.

Alors Raytheon a bien eu une petite histoire purement aéronautique, et ce grâce au légendaire avionneur américain Beechcraft. Ce dernier tomba dans son escarcelle en 1980 et y demeura jusqu’en 2014, époque de sa revente au groupe Textron qui le possède toujours aujourd’hui. Le T-6A Texan II fut d’ailleurs un temps proposé à la vente sous la raison sociale Raytheon avant que celle de Beechcraft ne la supplante, plus vendeuse ! En fait un des rares plantages de Beechcraft sur le marché de l’aviation civile est souvent mis à l’actif de Raytheon : le Model 2000 Starship. Il s’agit d’un ambitieux mais totalement inadapté bimoteur à turbopropulseurs doté d’une aile en flèches et d’hélices propulsives. Un avion qui entra en concurrence directe avec le Piaggio P.180 Avanti italien mais sans jamais obtenir son succès.

Aujourd’hui l’une des activités défense majeures de Raytheon est le développement et la production de moyens actifs et passifs de détection. On doit à ses ingénieurs des radars comme l’AN/APG-70 qui se retrouve sur les McDonnell-Douglas F-15E Strike Eagle ou encore l’AN/MPQ-64 Sentinel utilisé depuis le sol par les unités de US Army au plus près du champ d bataille. Raytheon équipe également certains navires de guerre de l’US Navy.

Passons désormais à United Technologies Corporation. Là encore c’est un nom qui ne dit pas grand chose au plus grand nombre. Née en 1934 elle adopte sa forme actuelle en 1975. Elle est souvent appelée simplement UTC. Son activité aéronautique tourne essentiellement autour de l’équipementier Rockwell-Collins et du motoriste Pratt & Whitney.
Commençons par le premier.

Rockwell Collins est spécialisé dans l’avionique et les systèmes de communication autant pour l’aviation civile commerciale que pour l’aéronautique de défense. On retrouve parmi ses clients aussi bien Airbus que Boeing, et tant dans le domaine des avions de ligne que des avions militaires, ou encore des voilures tournantes.

La dualité Airbus-Boeing est d’ailleurs aussi au cœur de l’activité de Pratt & Whitney. Mais est-il vraiment utile de présenter le célèbre motoriste américano-canadien ? Pas forcément non. Rappelons juste que Pratt & Whitney a signé quelques-uns des moteurs à pistons les plus importants historiquement. Des avions aussi légendaires que le Boeing P-26 Peashooter, le Grumman F3F, ou encore le Lockheed PV-2 Harpoon ont volé avec des moteurs en étoile Pratt & Whitney. Et ce n’est là qu’une infime partie des avions qu’il a motorisé.
Car le nom de Pratt & Whitney est également largement lié à l’aviation civile avec les turboréacteurs d’avions comme l’Airbus A318, le Boeing 777-200ER, ou encore le Bombardier Learjet 60. L’aviation d’affaire d’ailleurs doit énormément à Pratt & Whitney grâce au génial turbopropulseur PT6 développé par la branche canadienne du motoriste. Sans lui pas de Beechcraft Super King Air 200, pas de Cessna 208 Caravan, pas de De Havilland Canada DHC-6 Twin Otter, ou encore pas de Piper PA-46-500 Malibu Meridian. Pour faire simple sans PT6 on aurait une aviation civile bien plus tristounette. Sans compter que le PT6 a été adapté au domaine des voilures tournantes et assure aujourd’hui la propulsion notamment du Bell 412 mais aussi de certains vieux Sikorsky S-58 remotorisés.

Le mariage Raytheon et United Technologies Corporation est donc l’union de deux très fortes entreprises qui donnent naissance à un géant. Son idée est de ravir la 3ème place mondiale dans le domaine aéronautique et défense à Lockheed-Martin et de venir se placer juste derrière les mastodontes Airbus Group et Boeing Company.
Ça tombe bien ils sont tous les trois clients de Raytheon Technologies !

Photo © Wikimédia commons.


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Arnaud
Passionné d'aviation tant civile que militaire depuis ma plus tendre enfance, j'essaye sans arrêt de me confronter à de nouveaux défis afin d'accroitre mes connaissances dans ce domaine. Grand amateur de coups de gueules, de bonnes bouffes, et de soirées entre amis.
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Commentaires

4 Responses

  1. Snecma et Sagem était des entreprises françaises, alors pourquoi dîtes vous que le fruit de cette alliance, Safran, est un mastodonte européen ?

    1. Question de rhétorique si vous préférez. Surtout qu’une grosse partie des capitaux de Safran sont aujourd’hui européens. Et puis si c’est français, par définition c’est européen.
      CQFD. 🙂

    2. D’accord avec Arnaud. On peut aussi ajouter qu’une filiale de Safran est 100% belge (Safran Aero Boosters à Liège) et que Safran Nacelles a des implantations en Angleterre qui fait partie de l’Europe encore au moins pour quelques temps.

  2. Patriot, Standard, kits de guidage Paveway, AMRAAM, Sidewinder, Tomahawk et j’en passe… Raytheon était déjà un géant missilier incontesté d’envergure internationale. Ajoutons à cela ses radars sol/air/mer, ses compétence dans la balistique spatiale, les avioniques Rockwell et les moteurs Pratt & Whitney, en effet on aura là un véritable cador dans le domaine. Bigre !

    Cela dit, niveau géant missilier, avec MBDA nous sommes suffisamment bien lotis pour avoir une gamme complète d’armes de qualité équivalente, made in Europe, donc en théorie nos armées peuvent s’affranchir d’une grande majorité des armements US 😀 . Ajoutons les compétences de Thalès, Safran, Zodiac, et le vieux continent n’a pas à rougir face au géant américain. Même si bien évidemment, comme vous dites Arnaud, le nouveau-né US est d’une toute autre échelle.

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