Le projet Megapolis révèle les désillusions autour du chasseur russe Su-57 Felon.

Megapolis, le nom fait penser à un personnage de la série Transformers. Pourtant c’est en Russie quelque chose de très sérieux : la modernisation du chasseur de 5e génération Sukhoi Su-57. Les révélations faites par le complexe militaro-industriel Rostec sont riches d’enseignements quand aux tâtonnements de l’industrie aéronautique russe en matière d’avion furtif. Et les forces aériennes russes risquent malheureusement d’être dans cette histoire le dindon de la farce.

Depuis plusieurs mois déjà des rumeurs existaient sur un programme de remise à jour du Sukhoi Su-57 Felon, alors même que celui-ci n’est pas encore opérationnel dans son pays d’origine : la Russie. Une manière implicite pour Moscou autant que pour l’avionneur de reconnaître leurs erreurs sur cet avion qui n’est donc pas le super chasseur que certains pensaient. Et les désillusions vont être nombreuses pour celles et ceux qui fondaient de grands espoirs dans ce chasseur.

En premier lieu, et alors qu’il y a deux mois le constructeur Sukhoi annonçait le contraire, le projet Megapolis confirme que le Su-57 ne sera qu’un monoplace ! L’industriel renonce donc à redessiner son avion afin d’en faire un biplace. À l’origine cette option avait été présentée afin de satisfaire une potentielle clientèle internationale. En fait c’était sans doute plus pour les besoins russes qu’étrangers que ce chantier était annoncé.
Rostec reconnait qu’un Su-57 biplace aurait permis de le faire voler de conserve avec un drone de combat S-70 Okhotnik, et même à dessein avec un essaim de ces aéronefs sans pilote. Cette option ne serait plus dans les cartons du ministère russe de la défense, en tous cas plus autour d’un binôme Su-57/S-70.

Sur le marché international le projet Megapolis indique bien des touches avec des clients étrangers mais rien de sérieux. Certains pays fortement intéressés par le Sukhoi Su-57 Felon, comme l’Algérie ou l’Égypte, n’auraient pas été considérés comme ayant les reins assez solides pour l’acquérir. Malgré tout le Su-57 demeure la Rolls Royce des avions de combat made-in Russia avec de ce fait un coût supérieur aux autres avions.
Pour autant il n’est pas impossible que le futur Su-57E bénéficie des avancées technologiques liées à Megapolis.

Car c’est vraiment là que le volet modernisation du Sukhoi Su-57 intervient. Deux axes principaux sont concernés : l’avionique et la motorisation. C’est à dire le cerveau et le cœur de l’avion. Comme souvent avec la Russie, elle parle beaucoup mais détaille très peu ! C’est là un héritage de l’URSS. On sait pourtant que sur l’avionique c’est notamment l’interface homme-machine dans le poste de pilotage ou encore l’intuitivité de celui-ci qui va être profondément remise à jour. En gros le glass-cockpit va se généraliser à bord. Une plus grande place devrait aussi faite à l’IA, l’intelligence artificielle. De là à y voir une IA copilote il n’y a qu’un pas. Que nous ne franchirons pas.
Sur la motorisation les informations sont différentes puisque contradictoires. Certes tout le monde s’accorde à dire que le réacteur Saturn AL-41F n’est sans doute pas aussi performant que l’on pensait. En outre il semble même que ce dérivé du vieux AL-31 daté de 1981, et qui équipe notamment le Sukhoi Su-27 Flanker depuis ses débuts, ne soit pas assez puissant pour le chasseur russe de 5e génération. L’ajout d’un second étage est donc désormais officiellement annoncé !

Avionique insuffisante et motorisation défaillante, cela fait beaucoup pour un avion que Moscou présentait il y a encore peu comme le nec plus ultra. D’où la modernisation en cours de développement et qui devrait voir le jour sur un prototype à l’horizon du second semestre 2025. D’ici là pourtant la production en série des premiers Sukhoi Su-57 va se poursuivre. Le premier lot de vingt-quatre avions doit être livré en temps et en heures.
Il s’agira donc d’une série de chasseurs sous-motorisés et dotés d’une avionique vieillissante. Quel sera alors la capacité réelle de ces monoplaces ? Nous le saurons sans doute à ce moment là.
Une chose est sûre les pilotes de chasse russes voleront sur un avion qui ne sera pas définitifs. En industrie on dit alors qu’ils voleront sur des machines de présérie. Vingt-quatre avions de présérie en service, ça fait beaucoup.

Bien entendu il est impossible en 2021 de ne pas faire de parallèle entre les déboires de Sukhoi avec son Su-57 et ceux de Lockheed-Martin et de son F-35 Lightning II. Dans les deux cas il semble que la technologie laisse à désirer. Dommage quand on pense que la Russie n’a eu de cesse depuis plusieurs années de présenter son chasseur furtif comme l’antithèse du Lightning II car bien pensé et opérationnel très rapidement. C’est raté !

Dans le même temps il est surprenant que ces informations ne transpirent que maintenant, alors même que le projet Megapolis est sur les rails depuis début 2020. Un peu comme si Sukhoi et les autorités russes se préparaient à (en partie) enterrer l’avion au profit du nouveau Su-75 Checkmate récemment révélé.
Une chose est sûre : le Su-57 n’a pas fini de faire couler l’encre.

Photo © Keypublishing.

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ARTICLE ÉDITÉ PAR
Arnaud
Arnaud
Passionné d'aviation tant civile que militaire depuis ma plus tendre enfance, j'essaye sans arrêt de me confronter à de nouveaux défis afin d'accroitre mes connaissances dans ce domaine. Grand amateur de coups de gueules, de bonnes bouffes, et de soirées entre amis.
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Commentaires

5 réponses

  1. Pour moi, le plus parlant dans toute l’histoire du Su-57 est l’abandon de ce dernier et les raisons dites et non-dites par l’Inde.

    1. oui et la communication très discrète sur la furtivité du SU-57.
      on est assez proche d’une série d’avions de …. pré-série

  2. La France a eu jusqu’à 100 Rafales de “pré-série” pas vraiment opérationnels, pas vraiment capables, pendant 20 ans, et l’avion ne s’est vendu à personne pendant aussi longtemps.
    Tous les programmes ont les mêmes histoires, pour des raisons variées mais souvent proches, qu’ils soient US, Europeens, Russes, Chinois, Japonais…
    Ces programmes sont complexes et les descendre ou les prendre en supériorité sur quelques déclarations aux médias interprétées comme on le veut serait surement une faute stratégique.

    1. ? Les dix premiers Rafales de la Marine étaient des préséries. Mais ceux de l’Armée de l’air étaient opérationnels dès le début .

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