Face au Rafale la contre-attaque du F-15EX Eagle II en Indonésie.

On le savait : Boeing est également dans les cartons de la Tentara Nasional Indonesia Angkatan Udara. L’avionneur a eu l’autorisation du gouvernement fédérale américain de proposer à l’Indonésie la vente de trente-six chasseurs de supériorité aérienne Boeing F-15EX Eagle II. Une annonce officielle qui intervient à peine 24 heures après que cette force aérienne ait annoncé sa volonté d’aligner quarante-deux chasseurs omnirôles français Dassault Aviation Rafale F4. Forcément on est tenté de se demander jusqu’où l’Indonésie a les reins suffisamment solides pour confirmer la commande de ces deux modèles d’avions qui sont loin d’être les moins onéreux du marché.

Que le super chasseur américain de supériorité aérienne ait encore été dans la compétition malgré la commande ferme de six Rafale F4 et l’option pour trente-six machines supplémentaires ne faisait aucun doute. La TNIAU parle depuis plusieurs semaines d’une volonté clairement affichée d’aligner cent chasseurs modernes d’ici fin 2029, majoritairement des Rafale F4 et des F-15EX Eagle II. Une dualité qui laisse songeur sur les capacités financières réelles d’un pays qui n’a jamais été connu pour être leader dans ce domaine en Asie. Au contraire Djakarta a souvent été pointé du doigt pour une corruption institutionnelle très marquée.

N’attendre que 24 heures avant d’annoncer le feu vert du programme Foreign Military Sales c’est assez étonnant. Un peu comme si l’administration Biden avait agi dans la précipitation, de peur que le Rafale F4 ne fasse trop de dégâts et rompe les volontés indonésiennes d’acheter le F-15EX. Comme si les Français allaient vouloir prendre leur revanche de l’affaire des sous-marins australiens et torpiller l’Eagle II auprès des Indonésiens. C’est vraiment l’impression que ça donne !
Habituellement les procédures FMS sont bien plus sereines.

Pourtant en fait les deux avions ne matchent pas vraiment dans la même catégorie. Bien sûr Boeing présente son nouvel avion comme multi-rôle. Pour autant le contrat que le Pentagone annonce entre treize et quatorze milliards de dollars US semble clairement s’orienter vers un strict chasseur de supériorité aérienne. Les équipements d’avionique, et notamment les radars AN/APG-82(V)1 à antennes actives et le système de leurrage électronique AN/ALQ-250, sont plutôt orientés vers les missions air-air. Par contre la présence d’un lot de nacelles AN/AAQ-33 destinées au ciblage des munitions air-sol de précision laisse à supposer un rôle secondaire d’attaque et de pénétration. Le système AN/AAQ-13 confirme cette supposition.
Reste que le FMS tout comme l’état-major indonésien demeure très vagues sur les armements commandés afin d’équiper les F-15EX en question.

Ce feu vert américain pour l’exportation de trente-six Eagle II met t-il en péril le contrat de Dassault Aviation ? À priori non car l’Indonésie avait largement déminé en amont en annonçant sa volonté d’aligner les deux modèles d’avions. Pour autant le marché mondial de l’armement n’a rien d’un gentleman agreement. Malgré les plus de 200 ans d’amitié entre Paris et Washington DC si Boeing a la possibilité de casser le contrat avec Dassault Aviation le constructeur américain ne s’en privera pas. Et sans doute aussi vice-versa.
Mais est-ce vraiment l’intérêt de ces deux avionneurs ? Ce n’est pas évident. Mieux vaut sans doute une Tentara Nasional Indonesia Angkatan Udara évoluant sur chasseurs Boeing et Dassault Aviation qu’une Tentara Nasional Indonesia Angkatan Udara évoluant sur Boeing et Lockheed-Martin ou Dassault Aviation et Lockheed-Martin. Il faut absolument éviter de faire entrer le loup dans la bergerie.

Accumulant désormais échecs sur échecs avec son F/A-18E/F Super Hornet Boeing pourrait bien à l’avenir tirer son épingle du jeu grâce à ce F-15EX Eagle II.
Et franchement voir la TNIAU faire un jour voler des patrouilles mixtes Eagle II / Rafale a quelques chose d’assez kiffant.

Photo © US Department of Defense.