Boeing implore le gouvernement américain de l’aider financièrement.

La puissante industrie aéronautique américaine serait t-elle en danger ? Les responsables de l’avionneur Boeing viennent de faire savoir qu’ils avaient un besoin urgent de 60 milliards de dollars américains afin de maintenir l’activité industrielle. Cependant 30% seulement irait au constructeur et les 70% restants à ses différents sous-traitants. D’ores et déjà Donald Trump s’est dit favorable à une telle aide publique.

En fait si Boeing va mal c’est surtout à cause de l’accumulation de plusieurs facteurs. Le scandale du 737 Max et la récente crise sanitaire mondiale du Covid19 en sont les principaux mais pas les seuls. Des aspects financiers existent aussi.

Alors certes un peu plus d’un an après le dramatique crash d’Ethiopian Airlines la situation pour le célèbre biréacteur monocouloirs n’a jamais été aussi tendu. Non seulement les avions ne volent toujours pas mais en plus ils se multiplient sur les parkings de l’avionneur comme des Gremlins mouillés. Et ces aires de stationnement pour avions ne sont pas extensibles à l’infini. Leur production pourrait bien être prochainement encore revus à la baisse.
Car désormais les annulations de commande s’enchaînent, parfois au profit d’Airbus et de sa famille A320.

L’autre facteur aggravant est bien entendu l’actuelle pandémie du tristement célèbre coronavirus Covid19. La majorité des compagnies aériennes européennes sont aujourd’hui indésirables un peu partout dans le monde, et notamment aux États-Unis. Résultat leurs avions sont cloués au sol et elles sont obligées de revoir à la baisse voire d’annuler tout bonnement leurs achats de nouveaux aéronefs. Là-dessus tous les avionneurs sont logés à la même enseigne. Y compris donc Boeing pour qui cela se fait particulièrement ressentir.

Le troisième facteur est purement financier.
Au cours des sept dernières années l’avionneur a versé plus de 64 milliards de dollars américains à ses actionnaires dont un peu moins de 11% pour la seule année dernière. C’est à dire sept milliards de dollars alors que chacun savait pertinemment que la crise du 737 Max plombait l’avionneur. Mais les (petits et gros) investisseurs s’en remplissaient tout de même les poches. Pis encore le bilan financier de Boeing pour l’exercice 2019 est déficitaire. L’avionneur ajoute de la dette aux dettes. Ses premiers créanciers sont bien sûr les banques du monde entier, mais également le fisc américain et surtout ses sous-traitants.
C’est ce qu’en science politique on appelle le capitalisme déraisonné.

Les sous-traitants de Boeing qui justement tirent la langue. Beaucoup sont au bord du cataclysme économique et ont de très rapides besoins de rentrées d’argent. Sous peine pour les plus fragiles de mettre la clef sous la porte. Tout le monde n’a pas la stabilité économique d’un CFM-International ou d’un Pratt & Whitney. Et justement sur les 60 milliards de dollars réclamés par Boeing au gouvernement fédéral américain il faut savoir que 70% reviendrait à ces mêmes sous-traitants.

Donald Trump se dit favorable à une telle aide de l’état américain, une sorte de nationalisation économique, mais sous conditions. Le taux de remboursement serait échelonné et à un faible taux, c’est déjà ça. Mais surtout la Maison-Blanche insiste pour que ces aides publiques américaines reviennent en priorité aux sous-traitants américains. Comme si Boeing pouvait se passer de travailler avec des entreprises non-américaines ? C’est l’un des principaux points de discorde entre l’avionneur et le gouvernement fédéral. L’industriel sait qu’il a besoin de ses sous-traitants asiatiques et européens, et que ceux-ci souffrent autant que les entreprises américaines.

Surtout cela ressemble un peu à l’arroseur arrosé pour ce pauvre Donald Trump. Lui qui il y a encore quelques semaines fustigeaient les aides européennes à Airbus se prépare juste avec Boeing à… en faire autant. Les subventions publiques à l’aéronautique deviendraient donc finalement non-concurrentielles ? À voir.

Pour mémoire Boeing est également le deuxième fournisseur de la défense américaine après Lockheed-Martin. Ses avions et hélicoptères sont omniprésents sous la cocarde à l’étoile. Sa mise en danger économique serait donc catastrophique pour le Pentagone, d’où la nécessité pour les Américains de l’aider.

Photo © US Navy.

 


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ARTICLE ÉDITÉ PAR
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Arnaud
Passionné d'aviation tant civile que militaire depuis ma plus tendre enfance, j'essaye sans arrêt de me confronter à de nouveaux défis afin d'accroitre mes connaissances dans ce domaine. Grand amateur de coups de gueules, de bonnes bouffes, et de soirées entre amis.
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Commentaires

10 Responses

  1. Bravo Arnaud pour ce bel article. Oui, L’Arroseur arrosé. Bien vu.
    Ça fera les pieds aux actionnaires. Même s’ils ne changent pas le yacht ou la Ferrari cette année, ils vont pas mourir.
    Je suis plus inquiet pour les salariés et les sous traitants, car cela touche aussi la France.

  2. J’habite Toulouse et quelques industriels du coin commence à avoir des sueurs froides ! Évidemment la très grosse majorité des industriels Toulousain travaillent pour Airbus, donc pour eux pas de problème. Mais les quelques autres souffrent. Et ça, c’était avant le Covid19 !

  3. Quand est-ce qu’on commence les sanctions contre le vin californien, les jeans Levis, les Harley-Davidson, le Coca-Cola, les Ford… J’espère qu’on ne se laissera pas faire et qu’on les poursuivra à l’OMC autant qu’ils l’ont fait contre nous.

    1. Ok mais pas sur le Coca-Cola (par ailleurs fabriqué en France) et pas non plus sur le vin californien. Par ailleurs avec modération ce dernier, bien entendu. 😉

  4. C’est bien qu’ils le fassent, nonobstant les comportements et la goujaterie des actionnaires, il ne serait pas bon pour l’aéronautique mondiale que Boeing disparaisse du paysage.
    Il faut empêcher la chute du géant.
    L’affaire du 737 Max et du corona virus va redistribuer les cartes dans une ampleur encore jamais vue jusqu’ici.
    Il ne faut pas se leurrer, Airbus sera aussi touché.

  5. S’il comprend enfin que tout le monde a besoin d’un coup de pouce en ce moment et qu’il abandonne les poursuites contre Airbus et annule TOUTES ses augmentations de taxe contre l’Europe un compromis pourra être trouvé.

  6. Après s’être fait marteler pendant des années un « coût du travail », lorsque celui-ci même est productif et mérite salaire (sous-traitants), on pourrait bien prochainement enfin pointer du doigt « le coût des actionnaires… » qui représente une forme d’égoïsme dont on se rend compte avec le covid 19 et la surcharge insupportable qu’il représente pour une économie mondiale interdépendante, qu’elle n’est pas un si bon sentiment que ça… (l’égoïsme)

  7. Bravo pour tous vos commentaires, plein de bon sens.
    Il faut espérer que cela fera réfléchir les adeptes de l’argent « roi ».

    Je n’ai rien contre les Américains, mais contre ce guignol de Trump, qui peut nous faire péter la planète à tout moment. Des actionnaires certes il en faut. De là à ce qu’ils soient pourris, gâtés, il y a une marge.

    Bien sur que Boeing doit rester dans la course. C’est Trump qui doit être éliminé de la présidence des U. S. A.

    ESPÉRONS que le 20 novembre prochain, on retrouve un pays qui nous fait rêver, débarrassé de ce guignol et toujours Avec Boeing.

    Regardez Neil Young en streaming chez vous, et vous comprendrez
    Beaucoup de choses à travers ses chansons. Et puis
    ça vous fera réviser votre anglais . On a le temps en ce moment.

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