C’est un fait désormais assez connu : les hélicoptères européens se vendent très bien aux États-Unis. Et le pays pionnier dans cette réussite fut la France au travers de marchés remportés dès les années 1970. Aujourd’hui c’est le groupe européen Airbus qui jouit de ces succès et les prolonge. Retour en arrière sur une aventure technologique assez surprenante.
Tout a pourtant commencé avec un avionneur américain : le groupe (désormais disparu) Ling-Temco-Vought. Celui-ci voulut en 1968 pouvoir assembler sous licence américaine les hélicoptères français commercialisés par Sud Aviation. Pour cela une société fut fondée sous le nom de V.H.I., pour Vought Helicopters Inc., dans laquelle le constructeur français participait à hauteur de 18%. Pourtant rapidement les Français se rendirent compte que si le marché était là le nom de Vought n’était absolument pas porteur dans le domaine des voilures tournantes.
C’est pourquoi en 1974 le groupe français Aérospatiale (nouvelle raison sociale de Sud Aviation) lança une offre publique d’achat à L.T.V. afin de mettre la main sur V.H.I. et ses actifs. L’avionneur accepta mais très rapidement la procédure de rachat fut gelée par le gouvernement américain qui craignait pour l’emploi sur le site de Grand Prairie. Cette usine texane était en effet le lieu d’assemblage des hélicoptères français.
Moyennant des compromis, comme la garantie qu’aucun emploi ne serait menacé, la justice fédérale américaine accepta l’O.P.A. d’Aérospatiale.
Vought Helicopters Inc. devint Aérospatiale Helicopter Corp. Le succès fut au départ plus que mitigé.
A.H.C. vendait ça et là quelques SA.316B Alouette III, quelques SA.342 Gazelle, et parfois un ou deux SA.315 Lama. Mais les hélicoptères français peinaient à s’implanter face aux Bell 206 et Hughes 500 de factures locales. Parfois l’hélicoptériste français réussissait à vendre quelques SA.330 Puma, principalement en raison de l’absence d’un hélicoptère similaire parmi les constructeurs américains. Le biturbine franco-anglais se révélait bien plus économique sur le marché civil que le Sikorsky S-61, la version commerciale du Sea King. Mais parler de succès fulgurant pour cette époque relevait du mensonge.
En fait Aérospatiale Helicopter Corp. dut attendre l’AS.350D Astar pour connaitre une véritable évolution positive. Cette version de l’Écureuil est destinée au marché nord-américain, elle a été conçu comme telle autour d’une motorisation et d’une avionique 100% américaine. Et immédiatement les clients s’y sont retrouvés, au point que dès le milieu des années 1980 l’appareil faisait vraiment de l’ombre à ses concurrents conçus aux États-Unis.
À la fin de la même décennie l’Astar détenait 30% du marché des hélicoptères légers monoturbines aux USA.
Cette même décennie 1980 vit apparaitre une des plus grandes réussites d’Aérospatiale Helicopter Corp. : le SA.366G1. Cette version américanisée du célèbre Dauphin 2 biturbine n’était pas destiné au marché commerciale mais bien à celui des forces armées. Il fut vendu à l’US Coast Guard qui lui octroya la désignation officielle de HH-65A Dolphin. Désormais A.H.C se payait même le luxe de vendre aux militaires américains. À la même époque deux entreprises privées sous contrat avec le Pentagone faisaient voler des AS.332C Super Puma assemblés sur kits à Grand Prairie. Ces machines assuraient des missions de VertRep au profit des navires de guerre de l’US Navy.
En 1992 la division hélicoptère d’Aérospatiale disparut au profit d’Eurocopter, en fusionnant avec l’entreprise allemande Messerschmitt-Bölkow-Blohm. De ce fait Aérospatiale Helicopter Corp. n’avait plus de raison d’exister. Elle se transforma donc avec une nouvelle raison sociale : American Eurocopter. Ce constructeur marquait ainsi un peu plus son ancrage aux États-Unis. Le coup de peinture allait marcher mais surtout désormais les usines de Grand Prairie allaient également avoir en charge l’entretien de machines allemandes comme le Bö 105 ou encore le BK 117. Quelques-uns d’entre-eux étaient alors immatriculés aux États-Unis mais également au Canada.
American Eurocopter s’occupait toujours de l’assemblage local des hélicoptères de la gamme Eurocopter mais assurait également les mises à jour du HH-65 Dolphin, au travers des standards HH-65B et HH-65C mais surtout la modification vers le nouveau standard MH-65C beaucoup plus polyvalent.
En 2004 le constructeur se lança dans le programme LUH, pour Light Utility Helicopter. Visant au développement d’un nouvel hélicoptère léger pour les besoins de l’armée américaine il avançait une version américanisée de l’EC-645. Et de manière assez surprenante deux ans plus tard il gagnait la compétition et devait désormais assembler l’UH-72 Lakota. Un hélicoptère destiné à remplacer rien moins que le légendaire Bell UH-1H/V Iroquois. Excusez du peu. Ces hélicoptères sont alors assemblés dans une nouvelle usine sise à Columbus dans le Mississippi.
Dans le même temps American Eurocopter poursuivait l’implantation sur le marché civil américain des machines conçues en Allemagne et en France. Et l’Écureuil/Astar continuait à bien se vendre au point en 2010 de représenter 58% des hélicoptères légers monoturbines vendus aux États-Unis. Mais déjà un appareil apparaissait comme taillé pour le marché américain : l’EC-130.
L’année 2014 vit la mort d’American Eurocopter au profit d’Airbus Helicopters Inc, la branche nord-américaine d’Airbus Helicopters. Cette dernière était la nouvelle raison sociale d’Eurocopter. Et comme à son habitude l’entreprise de Grand Prairie persiste dans ses modernisation de MH-65 Dolphin tandis que dans le Mississippi elle propose désormais une version du Lakota dotée d’un Fenestron sous la désignation UH-72B.
Avec un peu moins de 800 employés début 2020 Airbus Helicopters Inc. peut tout de même s’enorgueillir de détenir 50% du marché civil/parapublique des hélicoptères aux États-Unis. Il faut savoir que pour beaucoup d’Américains l’AS.350 Astar et le H130 sont des machines 100% américaines. La preuve que ce constructeur a réussi son pari.
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