Le Rafale F4 en Arabie Saoudite : futur coup de génie ou dindon de la farce ?

Avant toutes choses il faut bien garder en tête un fait indiscutable : la Royal Saudi Air Force n’a jamais utilisé d’avion de combat de facture française ! Car depuis quelques jours maintenant la possibilité d’un contrat saoudien autour du chasseur omnirôle Dassault Aviation Rafale F4 revient sur le devant de la scène. Une hypothèse apparue après le refus allemand voici un an de vendre aux Saoudiens un nouveau lot d’Eurofighter EF-2000 Typhoon. Sauf qu’on ne peut s’empêcher de se demander si l’avionneur clodoaldien ne jouerait pas ici le rôle du lièvre derrière lequel cavalent les coureurs réellement en lice ?

Initialement donc les Saoudiens voulaient remplacer leurs derniers McDonnell-Douglas F-15C/D Eagle et les plus vieux de leurs Panavia Tornado IDS par un lot de cinquante-quatre Typhoon Tranche 4, la dernière évolution du chasseur européen de génération 4.5. Sur le papier c’était la meilleure des options envisageables puisque la Royal Saudi Air Force aligne actuellement soixante-douze exemplaires de ce chasseur. Quand il y a deux ans les pourparlers s’engagent entre d’un côté Ryad et de l’autres Berlin, Londres, Madrid, et Rome personne n’imagine que l’affaire puisse capoter. D’ailleurs pas grand monde n’aurait placé ne serait-ce qu’un kopeck sur le Rafale F4 dans cette histoire. Tout semblait plier. C’était compter sans la diplomatie allemande. Car si du temps d’Angela Merkel Berlin fermait volontiers les yeux sur les atteintes de l’Arabie Saoudite aux droits humains il en était désormais très différemment avec la coalition menée par Olaf Scholz. Preuve en est que droite et gauche n’ont pas la même vision des politiques extérieures. Et malgré les pressions des trois autres chancelleries européennes concernées l’Allemagne restait ferme sur la question. Elle trouva même un surprenant allié en la personne de Tokyo qui de son côté refusa catégoriquement que les Saoudiens n’embarquent à bord du programme euro-japonais GCAP. Ça commençait à réellement sentir mauvais pour Ryad sur ce coup là. D’autant qu’outre-Atlantique personne ne voulait vraiment s’en mêler Lockheed-Martin ayant tiré un trait sur sa volonté de vendre aux Saoudiens le F-35A Lightning II, surtout en raison de différents diplomatiques entre l’Arabie Saoudite et les États-Unis.

C’est donc là que Paris entre dans la partie. Avec le Dassault Aviation Rafale F4 c’est une toute autre histoire puisque là les Saoudiens n’ont à convaincre que les Français qu’ils ont changé et que désormais ils respectent à la lettre les canons européens et nord-américains en matière de droits fondamentaux. Alors certes la France se targue d’être dans le monde le «pays des Droits de l’Homme» mais chacun sait aussi que depuis Charles de Gaulle cette qualification est souvent à géométrie très variable dès lors qu’on parle de vente d’armes et notamment d’avions. Une géométrie variable qui tombe plutôt bien quand on veut remplacer des Tornado IDS. Sans être au niveau d’un George Pompidou ou d’un Valéry Giscard d’Estaing l’image d’Emmanuel Macron sur la question rassure clairement les Saoudiens. L’époque des François Mitterrand, Jacques Chirac, et autre François Hollande semble bien loin. Aux yeux de Ryad Paris est sans doute aujourd’hui plus malléable et plus accessible que Berlin. En gros la France serait prête à s’asseoir sur ses principes fondamentaux à la condition de vendre cinquante-quatre Dassault Aviation Rafale F4. Encore faut-il être sûr qu’ils soient achetés.

Car très honnêtement depuis le début de cette volte-face saoudienne en faveur de la France il y a un truc qui pue. Vous savez cette sale impression que l’on va au final nous prendre pour des cons (oui oui j’ai bien écrit con et j’ai même pas placé mes fameux astérisques) et que Ryad n’achètera jamais le Rafale F4 lui préférant toujours le Typhoon Tranche 4 ou alors une solution… américaine. On sait que depuis quelques mois maintenant les Saoudiens observent de près le nouveau chasseur de Boeing, le F-15EX Eagle II. Alors certes il y a toujours l’administration Biden à passer et clairement Anthony Blinken ne va pas être le chef de la diplomatie américaine le plus aisé à convaincre. Mais les Saoudiens savent être patients. Surtout ils misent sur un autre cheval : Donald Trump. La monarchie du Golfe n’a jamais caché qu’elle était bien plus proche idéologiquement des Républicains que des Démocrates américains. Une victoire en novembre prochain de l’actuelle vice-présidente Kamala Harris ne ferait vraiment pas ses affaires. Et donc par effet de ricochet pas celles de Boeing.

En outre la temporalité du retour de Dassault Aviation et de son Rafale F4 dans l’équation est très bien trouvée : les Jeux Olympiques de Paris 2024. L’Arabie Saoudite y participe avec une de ses plus importantes délégations dans l’histoire. Et des femmes sont mises en avant ! Or les Saoudiens utilisent depuis plusieurs années le sport et notamment l’olympisme, comme outil diplomatique. C’est ce qu’on appelle en mauvais français le soft power. Si cette méthode douce peut leur permettre d’arriver à leurs fins c’est du gagnant-gagnant. D’autant qu’en plus de la France l’Allemagne et le Japon sont très enclines à ce genre de signaux.

Une chose est certaine : si Dassault Aviation et Emmanuel Macron réussissent à placer le Rafale F4 auprès de la Royal Saudi Air Force tout le monde y verra un véritable coup de génie. Sauf bien sûr les défenseurs des droits fondamentaux. Par contre si au final Ryad en profite pour acheter le F-15EX Eagle II ou le Typhoon Tranche 4 les mêmes verront dans le constructeur français et dans le Président de la République le dindon de la farce. Les Droits de l’Homme auront cependant gagné à domicile.

Affaire à suivre.

Photo © Armée de l’Air et de l’Espace.


En savoir plus sur avionslegendaires.net

Subscribe to get the latest posts sent to your email.

PARTAGER
ARTICLE ÉDITÉ PAR
Image de Arnaud
Arnaud
Passionné d'aviation tant civile que militaire depuis ma plus tendre enfance, j'essaye sans arrêt de me confronter à de nouveaux défis afin d'accroitre mes connaissances dans ce domaine. Grand amateur de coups de gueules, de bonnes bouffes, et de soirées entre amis.
articles sur les mêmes thématiques
Commentaires

13 Responses

  1. Bonjour Arnaud.
    Je vous laisse le soin de raboter ce message dans le sens qui vous arrange le mieux, car vous avouez me laisser une marge de manœuvre dans mes commentaires. J’en suis fier mais pas au point d’abuser.
    Début du pensum :
    Le problème avec la vente d’armes, c’est que c’est des outils assez flexibles. Et cette flexibilité vient des cibles potentielles.
    – soit sa propre population soit les soit les armées ennemies.
    Et en face l’Arabie il y a l’Iran et moults proxys.
    Si il y a un truc a répéter, c’est que les rebelles Houtis sont une organisation puissante et bien armée.
    La vente de Rafales ne serait pas de trop pour tenir ses nuisances à distance.
    Après, il y a des considérations vraiment piquantes, comme la mutualité des Rafales avec la future flotte des EAU.
    Le coût annuel de maintenance des Rafales qui est maintenant bien connu.
    Et aussi un bruit persistant : le contrat avec Ryad porterai carrément sur une chaîne d’assemblage. Pour l’Arabie, c’est intégrer une chaîne à haute valeur ajoutée, pour Dassault, c’est la chance d’arracher durablement l’AS aux USA en plus de pouvoir doubler sa chaîne logistique.
    .
    Le dernier point qui mérite attention, c’est que les USA font un pivot contre la Chine. C’est un pivot transpartisant, le seul point où Républicains et Démocrates sont d’accord. C’est aussi un fait important que le lien qui liait les USA au KSA jusque dans l’infâmie n’a plus lieu d’être: les USA sont maintenant clairement du Côté d’Israël est pour le Saoudien moyen, c’est inacceptable. Ensuite les USA sont producteurs de pétrole, assez pour êtres autonomes. MBS le sait et s’est déjà dressé contre son protecteur pour étouffer la filière du gaz de schiste. Sans succès, pour l’instant.
    Aussi, les discussions entre Dassault et le KSA seraient très engagées, avec les tarifs d’un côté, et la liste des compensations de l’autre.
    Reste le cas de l’Inde qui elle aussi veut sa chaîne de production. En 2015, s’était inenvisageable.
    Maintenant, il y a des prospects et des centaines d’appareils à livrer, sans compter le futur, avec le SCAF dont les drones.
    Abondance de bien ne nuit pas dit-on. Quoiqu’il en soit, Dassault a clairement des problèmes de riches

  2. Bienvenue dans le monde des marchands d’armes où l’argent n’a pas d’odeur, où les principes moraux n’ont pas cours et où il n’y aura jamais de bisounours …

  3. Et les droits de l’homme tu les défends gros ** quand les ukronazis assassinent les soldats de notre sainte mère la Russie ? Si les saoudien sont des bonshommes ils achèteront le Sukhoi SU-57 et pas cette ****** de Rafale.

    1. Le mot « Sainte » associé au nom RuSSie me fait systématiquement gerber . Quand aux héroïques soldats ukrainiens, je souhaite vivement qu’ils exterminent le plus possibles de ces barbares sanguinaires que vous osez des soldats.
      Les avions RuSSe, SU 57 compris, plus aucun pays digne de ce nom n’en veut.

      1. On va par contre essayer de ne pas tomber dans le piège de ce troll Christian s’il vous plaît. Les « exterminations » s’il vous plaît non.

  4. Ouais .
    Macron ne vend rien !!!
    Déjà que Trappier et Dassault résolvent le problème de l’augmentation des cadences ( enfin !!) afin de rassurer les actuels clients …
    Car , à 2 Rafale /mois ça ne fait pas rêver et ça ne rassure pas la clientèle .
    Il reste plus de 230 Rafale export à livrer déjà .
    A 22 Rafale /an ,certains clients vont attendre plus de 9 ans !!
    Donc j’aimerais que le contrat Saoudien ne soit pas un Mirage ,mais qu’il se fasse en toute connaissance de cause .
    Bien à vous

  5. Bonjour Jejé contrairement à vous je pense que Dassault fait tout ce qu’il faut pour satisfaire ses clients, il faut savoir que les principaux avionneurs ( Boeing, Airbus, Dassault etc … ) sont tributaires de leurs fournisseurs qui rencontrent des problèmes sérieux pour augmenter leurs productions. La qualité et la formation des opérateurs dans les usines est aussi un défi. Même les clients sont conscients de ces difficultés et acceptent bon gré mal gré cette situation. Et pour finir, hors toute opinion politique, il est notoire en France que les présidents de la République ont toujours été d’excellents promotteurs de l’armement français.

  6. En voilà un article bien ******** que c’en est. De quel droit l’auteur prend t-il une vision aussi défaitiste? C’est bien la mentalité antifrancaise des islamogauchiste.
    Quel sale *** ce arnaud!

  7. Bonsoir Arnaud,
    je suis assez d’accord avec vous sur un point.
    Ces rumeurs sur le Rafale ne sont la que pour faire monter la pression sur les très fidèles fournisseurs anglo-américains.
    La team rafale devrait faire comme pour la compétition « libre » du marché canadien: arrêter immédiatement les frais et se retirer de cette « compétition » où nous avons aucune chance.

  8. Je n’aime pas votre blog. Je n’aime pas votre défaitisme antifrançais. Je n’aime pas votre vision de l’aéronautique. Je sais que vous ne publierez pas mon commentaire car la vérité vous fait peur.

    1. Et nous n’aimons pas vos manières de dictateur en herbe impoli et sans nuance.
      Passez donc votre chemin.
      Ici, ils nous parlent de l’aviation et pas de politique de comptoir.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Sondage

25ème anniversaire, à quelle époque remonte votre première visite d'avionslegendaires ?

Voir les résultats

Chargement ... Chargement ...
Dernier appareil publié

Bell 47J Ranger

Mieux connu sous sa dénomination militaire H-13 Sioux, le Bell 47 fut l’un des premiers hélicoptères fabriqués en grande série. Au fil des ans, le

Lire la suite...