Vers un Northrop Grumman B-21 Raider (beaucoup) plus polyvalent.

On le croyait jusque là limité aux seules missions stratégiques actuellement dévolues aux Rockwell B-1B Lancer et Northrop B-2A Spirit. Pourtant un an après son premier vol le Northrop Grumman B-21 Raider se dessine de plus en plus comme le futur couteau suisse de l’US Air Force. Oubliez le marché pensé pour 100 à 140 exemplaires les généraux américains pourraient prochainement annoncer que 200 bombardiers stratégiques de ce type voient à l’avenir le jour. Même le «futur» Boeing B-52J Stratofortress pourrait se voir remplacer par lui… plus vite que prévu.

Revirement de situation pour cette aile volante furtive ? Non pas vraiment, disons plutôt que le Pentagone tient compte des évolutions technologiques des aéronefs susceptibles de voler à ses côtés. En gros, et pour simplifier ce qui ne l’est pas : le Northrop Grumman B-21 Raider pourrait bien devenir prochainement beaucoup plus qu’un simple bombardier stratégique, et même beaucoup plus qu’un simple bombardier tout court. Les décideurs de la défense américaines travaillent en fait actuellement à faire de lui non pas un concurrent, car ce serait impossible, mais plutôt une alternative air-sol au programme NGAD. Il y a quelques semaines déjà nous vous annoncions que ce chasseur de 6e génération ne se présentait pas sous les meilleurs auspices. Cela se confirme de plus en plus !

En fait de «simple» bombardier stratégique dédié à délivrer l’arme atomique ou à jouer les gros bras dans des conflits limités le Northrop Grumman B-21 Raider évolue de plus en plus vers la fonction de bombardier tactique de précision. Faites l’impasse sur les tapis de bombes de la guerre du Vietnam on parle ici plutôt de capacité à frapper plusieurs cibles ennemies à l’aide de bombes à guidages laser et/ou GPS d’une masse unitaire tournant autour de la tonne. Pour cela il faudrait adapter les soutes du B-21 Raider tout comme sa capacité à illuminer et diriger ses munitions. Ça tombe bien qu’il soit actuellement en phase active d’essais en vol auprès du 419th Flight Test Squadron à Edwards AFB. Autant vous dire qu’au Plant 42 les équipes de l’avionneur et de ses sous-traitants doivent déjà faire chauffer leurs petites cellules grises.

Depuis maintenant presqu’une semaine que l’information tourne outre-Atlantique on se rend compte que donc ce bombardier furtif devra également remplacer le B-52J Stratofortress, lequel n’est pas encore entré en service. Et plusieurs voix commencent déjà à s’y faire entendre sur la pertinence à modifier les actuels B-52H au standard B-52J si c’est pour les conserver en unité à peine une dizaine d’années. Rappelons, à toutes fins utiles, que le standard B-52H est apparu en 1961, six ans seulement après l’entrée en service actif du B-52B. Sauf que le BUFF n’est pas le seul avion qui pourrait être remplacé par le B-21 Raider. De manière plus surprenante il pourrait bien reprendre certaines missions du McDonnell-Douglas F-15E Strike Eagle, et donc comme camion volant à bombes guidées.

Dès lors que le Northrop Grumman B-21 Raider s’annonce comme le bombardier américain du 21e siècle on peut aisément se demander si en plus des missions de frappes tactiques de précision on ne pourrait pas envisager pour lui d’autres évolutions futures, comme servir de base à un avion de guerre électronique active de nouvelle génération voire à un ravitailleur en vol à signature radar dégradée. Adapter un bombardier stratégique en avion-citerne vous semble délirant ? C’est oublier un peu vite les Boeing KB-50 Superfortress et Handley Page Victor.

Vous l’aurez compris on est très loin d’être au bout de nos surprises avec ce Northrop Grumman B-21 Raider. M’est d’avis que je ne suis pas près d’arrêter d’écrire sur lui… qu’en dites vous ?

Photo © US Air Force


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Arnaud
Passionné d'aviation tant civile que militaire depuis ma plus tendre enfance, j'essaye sans arrêt de me confronter à de nouveaux défis afin d'accroitre mes connaissances dans ce domaine. Grand amateur de coups de gueules, de bonnes bouffes, et de soirées entre amis.
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Commentaires

13 Responses

  1. Salutations.
    Dans ma jeunesse, j’ai lu des articles vantant les mérites du F15 Strike Eagle comme il suit: le F15 était une bonne base mais chère, et Boeing a développé cette version sur fonds propres pour faire un appareil multirôle.
    On part de la base et on va vers une alternative.
    Depuis, il y a eu le guerre du Golfe et les dividendes de la paix.
    Le Pentagone pond une fiche programme en fonction d’un besoin supposé, par exemple un appareil multirôle furtif au prix contenu.
    Puis les différents services additionnent les capacités, comme le décollage vertical.
    Puis les ingénieurs tentent le viseur de casque qui remplace le viseur tête haute et l’écran multifonction pour les différents indicateurs, et ainsi de suite.
    Dans un autre domaine, cela donne les croiseurs classe Zumwalt, qui reposent sur de l’artillerie dont les prix donnent des nausées aux décideurs US, ou le programme de frégate Constellation qui prend un an de retard tous les six mois.
    Mais le B21 Raider fait exception : il repose sur des technologies connues, qui sont optimisées plutôt que sur dévelopées, et dont les bénéfices sont maîtrisés.
    Cela rappelle le Super Hornet en son temps, qui est l’un des rares programme à être resté dans son périmètre financier.
    .
    Ce fait interpelle parce que c’est un choix philosophique profond: faire d’abord une base saine puis y greffer de nouvelles capacités (A330 MRTT) ou parier d’emblée sur le futur en greffant des technologies prometteuses… Mais peu fiables, voire dysfonctionnelles.
    .
    Aussi c’est une chance d’avoir un organisme comme la DGA qui chapeaute les différents programmes militaires nationaux et utilise ses crédits à bon escient. Je pense à l’A 400M qui a eu une genèse difficile, mais s’avère capable et réussi. Sous la pression, on finira même par en faire un avion armé.

    1. L’A400M et ses palettes largables en vol avec les missiles qui partent des palettes répondent au même cas d’usage que le B21, équipé à la hâte pour les missions anti-navire. Les USA sont un peu plus avancés sur la conversion de bombes à cet effet. Pour nous, ce serait peut-être une AASM++ qui serait la plus adaptée pour la mission. Toute cela est probablement lié au déploiement annoncé d’A400M dans le pacifique pour protéger nos îles contre les flottes hostiles. Il y a un équilibre à trouver entre portée des munitions, de la plate-forme, furtivité, emport, vitesse et coût (MCO/TCO). Le B21 semble être le point d’équilibre US. Le notre reste à déterminer. Avons-nous les mêmes besoins (ou les mêmes moyens)? Que de bonnes questions!

  2. Certains évoquent les missions de supériorité aérienne au dessus de Taïwan pour le B21, car c’est le seul qui peut les faire grâce à son allonge et à l’emport de missiles à longue portée. Je crois que la 6g prend forme sous nos yeux… Le Rafale F5 est l’autre prétendant pour le moment, mais il est possible que le programme Scaf aille dans le même sens que le B21.

    Cependant, je serais curieux de connaître la raison pour laquelle on a besoin d’un humain dans le B21.
    Si le B21 peut contrôler des drones de manière sécurisée, pourquoi ne le serait-il pas lui même. Quelles missions risquent de briser la communication? Et si elle est brisée, pourquoi les automates ne sauraient y palier? Je veux dire… Si on frappe très loin derrière la ligne de front… La cible ne va pas poser des problèmes insolubles de discrimination. Un train est gros; un pont, un bunker, une centrale électrique sont fixe. Si on est en CAS, pourquoi la ligne de communication serait brisée?

    1. Les communications, c’est un double enjeu:
      -la bande passante qui ne permet pas la folies des grandeurs
      – la souveraineté de la transmission, avec l’obligation de louer des créneaux de communication auprès du propriétaire du drone et des satellites
      .
      En plus, il y a aussi le problème du temps de latence, de la perception de la situation, et autres broutilles. Si la CIA opérait depuis le sol américain des drones armés sur le territoire Afgan ou Pakistanais, les décideurs Français faisaient opérer les même drones depuis les bases locales du Mali, Niger et autre.
      A ma connaissance on n’a pas encore assez creusé le drone qui sert de hub de communication pour d’autres drones. Ça doit faire une sacrée salade.

  3. Bonjour Arnaud, Staff et Passionnés.
    Nous ne savons pas grand-chose du Northrop Grumman B-21 Raider. Mais il semble présenter trois caractéristiques inhabituelles pour un programme militaire, quel que soit le pays.
    Respecter les délais, respecter les coûts et respecter les spécifications du projet. Si tel était le cas, nous serions confrontés à un événement exceptionnelle. Ce qui pourrait être interprété comme un miracle.
    Blague à part, le B-21 Raider possède de nombreuses fonctionnalités qui pourraient en faire un véritable multirôle. Tout d’abord une furtivité, une suite électronique sans égal au monde, une charge de guerre importante et une autonomie énorme.
    On pourrait, entre autres, l’imaginer comme un chasseur intercepteur. Equipé de dizaines de missiles à moyenne et longue portée grâce à son extraordinaire arsenal de capteurs, un seul B-21 pourrait intercepter des missiles de croisière, des drones, des bombardiers et peut-être même des missiles balistiques, traversant le Pacifique à grande distance des côtes, amies ou non amical.
    Peut-être sommes-nous sur le point d’assister à une révolution égale à celle apportée par le General Dynamics F-16 Fighting Falcon il y a cinquante ans.
    Traduit avec Google

    1. La charge de guerre importante, on peut en parler un peu sur une aile volante. Oui sur le papier les capacités d’emport offertes par cette architecture sont impressionnantes, par le volume interne disponible. Le problème en pratique, est qu’une aile volante voit ses performances aérodynamiques se dégrader très fortement avec la charge avec une explosion du coefficient de trainée, ce qui peut faire tripler la conso de kérosène (cf: https://www.researchgate.net/publication/370924474_Performance_Analysis_of_B-2_Spirit). Les 11000 km de rayon d’action théoriques seront alors bien loins…
      Et le B21 Raider semble extrêmement proche du B2 Spirit sur le plan aérodynamique…
      Sinon on peut aussi mentionner que le B2, dont l’emport militaire maximal est de l’ordre de 36 tonnes, est officiellement limité à environ 18 T pour les missions conventionnelles et à 9 T pour les missions nucléaires…
      Donc au total, la charge militaire importante (pour de l’armement classique) et l’autonomie énorme, ce sont surtout les promesses couchées sur papier glacé, Les 2 en même temps, ce n’est tout simplement pas possible en tout cas avec le B2…

      Mais peut-être que je me trompe…

  4. J’avais la même idée que Vittorio sur la possibilité ( peut-être délirante ) que le B21 devienne un aéronef de supériorité aérienne car avec les nouveaux missiles air/air capables de frapper un autre aéronef à pratiquement 1000 km de distance cela est du domaine du possible. Et si on rajoute des Loyal Wingman ça aurait vraiment de la gueule et une incroyable efficacité. Réellement les États-Unis ont des moyens qui leur donnent une longueur d’avance sur tous leurs adversaires et comme je préfère un planète dominée par le monde libre …

    1. Ok, les missiles peuvent aller très loin, mais la kill chain, ce n’est pas que des missiles. Et là, les 1000 km, ça impliquerait une détection déportée et des relais de communication (vu la courbure de la terre, sauf si on est platiste, on ne peut pas dépasser 700 km de détection pour 2 objets volant entre 0 et 20000 m) Sans compter la taille du missile… Mais bon, de toute manière, si les Russes peuvent 500 et les Chinois annoncent 400km… Il va bien falloir trouver une réponse. D’autant que le R37 fonctionne terriblement bien et que l’aim260 ou le météor portent moins loins…

  5. Merci pour cet article bien original. Un B21 nettement plus polyvalent que le B2 Spirit c’est une bonne nouvelle au temps où des tensions belliqueuses s’accentuent et éclatent.
    Ils sont un peu incorrigibles les généraux US du moment non? Ils rêvaient de 132 B2 Spirit, seulement 21 ont été construits, un ratio encore moins bon que pour les F22 d’ailleurs (180 construits pour 650 prévus). Déjà 140 B21 ce doit être un budget plus que colossal alors 200…

  6. Pour moi, trop tôt pour le dire.
    Sera-t-il produit en nombre suffisant? Quid du coût d’entretien (en temps et en argent).
    Les militaires US prendront-ils le risque d’en perdre sur le champ de bataille et que la techno tombe entre les mains de l’ennemi?

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