C’est à la fois une très bonne nouvelle pour l’industriel suédois Saab et, pour l’avionneur canadien Bombardier. Ce mercredi 18 juin 2025 lors de la troisième journée du Salon du Bourget le ministère des Armées a fait savoir qu’il allait commander fermement deux GlobalEye, avec une option pour deux avions supplémentaires. Ils devront permettre avant 2030 de remplacer les actuels Boeing E-3F SDA désormais hors d’âge malgré de fréquentes remises à niveau. C’est une très mauvaise nouvelle, une de plus, pour l’avionneur américain.
La France a donc fait le logique choix de l’Europe en optant pour le Saab GlobalEye comme futur AWACS auprès de l’Armée de l’Air et de l’Espace. Enfin une Europe un peu «élargie» puisque ce nouvel avion de détection aéroportée est construit à partir de l’avion d’affaires Bombardier Global 6500… canadien. L’opération est de ce fait excellente pour l’emploi industriel dans les deux pays et confirme la très bonne santé du pôle défense de l’avionneur nord-américain. En parlant d’Amérique du Nord le grand perdant ici s’appelle Boeing, et plus particulièrement son E-7 Wedgetail développé à partir de l’avion de ligne monocouloirs 737. L’Armée de l’Air et de l’Espace aurait normalement dû emboiter le pas à la Royal Air Force en commandant cette machine.
Elle en a décidé autrement. Pour autant l’option, un temps envisagée, de greffer le système GlobalEye sur un jet d’affaires Dassault Aviation Falcon 10X n’a visiblement pas été retenue. C’est bien compréhensible quand on se souvient que le prototype de ce futur fleuron français n’a pas encore volé. Sa certification de type civile ne devrait pas intervenir avant 2027. Les essais de conformité du GlobalEye auraient grandement ralenti le programme de remplacement des actuels Boeing E-3F SDA. Le choix de conserver le radar et les équipements de missions sur l’avion canadien d’origine ont donc été dictée par le pragmatisme autant que par le réalisme. Le radar Erieye ER permet de détecter des cibles dans les trois dimensions et tous azimuts jusqu’à une distance de 400 kilomètres de l’avion porteur.
C’est depuis près d’un an et demi qu’on savait que la France tournait autour de l’AWACS suédois. Dans le même temps la diplomatie a ici joué à fond. Car au cas où certains ne le sauraient pas l’actuel ambassadeur de France en Suède est un ancien militaire, un des plus hauts gradés même. Thierry Carlier, puisque c’est de lui dont il s’agit, était IGCEA, pour Ingénieur Général de Classe Exceptionnelle de l’Armement. Ce grade est équivalent à un général d’Armée aérienne dans l’Armée de l’Air et de l’Espace. Avant d’être le représentant officiel de la France en Suède monsieur Carlier était directeur général adjoint de la puissante Direction Générale de l’Armement. Autant dire que ce genre de dossier ne lui pose aucun souci, il a pu tranquillement négocié avec Saab.
Saab devra par contre œuvrer avec l’industriel français Sabena Technics, déjà constructeur de l’ALSR Vador, afin de francisé au maximum le GlobalEye. On ignore actuellement si le radar à antenne active Leonardo SeaSpray 7500E sera conservé ou bien remplacé par un équipement similaire estampillé Thales. Il en est de même de l’appareil électro-optique permettant le repérage passif d’objectif, et leur poursuite. Ces points particuliers doivent encore être approfondis justement par la DGA.
Enfin dernier point et non des moindres : mais pourquoi seulement quatre Saab GlobalEye non de Zeus ??? L’Armée de l’Air et de l’Espace en aurait besoin au moins du double pour permettre d’être cohérente avec les nécessités de souveraineté française et européenne et avec les obligations opérationnelles ? On a l’impression que comme pour le Dassault Aviation Archange le ministère des Armées nous la joue petit bras ! Au passage peut-être que le Musée de l’Air et de l’Espace pourra prochainement récupéré un bel AWACS quadriréacteur qui serait du plus bel effet à côté du Sarigue.
Affaire (bien évidemment) à suivre.
Photo © Saab
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9 réponses
Suite à l’annonce américaine de finalement se détourner du E-7 au profit du Hawkeye, les mauvaises nouvelles s’enchainent pour cet appareil.
Par contre cela vient il confirmer l’importance encore plus grande du MRTT pour accueillir tout le personnel nécessaire pour les opérations en vol? En espérant comme vous le dites qu’on ne se borne pas à 4 appareils au maximum
Entièrement d’accord avec vous! Il en faudrait au minimum 2 fois plus .Et puis quid du ravitaillement en vol .. C’est clairement une régression opérationnelle pour un pays comme la France en terme de projection.
Et il faut espérer que cet équipement soit bien ITAR-free… En tout cas une bonne nouvelle pour l’Europe et le Canada.
Sinon, il doit toujours être possible de rajouter une perche de ravitaillement, « impossible n’est pas français ». Yapluka.
« pourquoi seulement quatre Saab GlobalEye », malheureusement, tous simplement parce que les caisses sont vide!
C’est la solution que je préférais mais j’aurais voulu que ce radar soit monté sur le Falcon 10x, dommage, même si j’apprécie la série Bombardier Global. Si on ajoute le futur A321 MPA, le Falcon 10x n’est pas verni.
Je ne vois pas pourquoi le nombre de quatre avion déçoit, c’est nombre pour nombre avec l’actuel E3f sentry.
avec une bulle de ~400km (ce qui reste théorique avec le relief et l’altitude), il faudrait un minimum de 2 appareils rien que pour la France métropolitaine. Donc quatre si deux en vol et deux au sol.
Quid de l’outre mer? Quid de théâtre d’opération comme l’Ukraine par exemple? Que se passe t’il si un appareil tombe en panne? Le Royaume Uni en a le double, le Japon en a environ une vingtaine.
Le double ? La RAF avait six E3 Sentry, tous retirés du service depuis 2021 et remplacés par trois E7 wedgetail. Sa reste des avions extrêmement coûteux. Le radar vaut plus cher que l’avion en lui même.
Ils en avaient 7, initialement les plans étaient de les faire tenir plus longtemps pour finalement choisir de les retirer du service, avant même l’arrivée du E-7 par manque d’argent. Ils s’en mordent les doigts depuis. Ils ont commandé 3 E-7 (initialement plus mais commande annulée, toujours par manque d’argent). Il y a eu pas mal d’articles où des députés et l’armée en demandent au moins 6.
Salut Arnaud et les Passionnés,
Ce n’est pas une surprise, car la DGA s’y intéressait depuis au moins 2023, mais je n’y croyais pas vraiment…ou je ne voulais pas voir ou accepter les raisons de ce choix ! Pour ma part, l’affaire ne pouvait se conclure que par un achat du nouvel Awacs US, lequel m’est assurément plus performant et plus complet que le Saab, sauf que le monde a évolué, voir accéléré ces dernières années et surtout derniers mois …!
La guerre en Ukraine a été un accélérateur à ce niveau, car elle a agrégé plusieurs évolutions et décisions mondiales tant politiques, économiques, diplomatiques et militaires. En effet, cette guerre a mis en évidence le désengagement Us pour la défense de l’Europe, accéléré par l’arrivée du nouvel El Loco de la Maison Blanche, la trop forte dépendance politique, économique, diplomatique, et militaire des européens vis à vis de son futur ex-allié, mais aussi la vulnérabilité des aéronefs face à une défenses aérienne symétrique et dense, et en particulier ceux à haute valeur stratégique comme les ravitailleurs et les …Awacs !
Ces nouvelles données ont influé les choix des pays européens en matière de défense ces derniers mois, avec… enfin une prise de conscience et un resserrement des liens dans la perspective d’une défense commune européenne.
Aussi j’ai le sentiment que le choix de Saab par la DGA s’inscrit dans la volonté de la France de montrer aux européens que nous sommes volontaristes dans la construction de cette défense commune en privilégiant les équipements intra-communautaires et si possible Itar-free. Vous me direz que l’avion, un Bombardier Global 6500 n’a rien d’européen, mais plutôt de canadien et plus précisément de québécois. Vous aurez raison, mais partiellement, car les moteurs en autre, équipement principal (25 à 30 % de la valeur de l’avion), sont européens, soit deux Rolls-Royce Pearl 15, un moteur récent très performant, fabriqué en Allemagne, dans l’usine de Dahlewitz, près de Berlin. Il faut néanmoins considérer que le Globaleye est un système complet de détection et de commandement conçu par Saab , associant un vecteur aéroporté canadien propulsé par deux moteurs européens, disposant de deux radars européens (Saab pour la surveillance aérienne et Léonardo pour la surveillance maritime), complété de stations terrestres elles aussi européennes.
C’est aussi la concrétisation du nouveau partenariat stratégique franco-suédois signé en Janvier 2024, avec entre autre des coopérations et contrats militaires, comme la commande signée au Salon du Bourget pour l’acquisition par la Suède de missiles Akeron MP (ex-MPP – Missile Moyenne Portée) de MBDA.
Je n’oublie pas non plus le futur marché des quatre frégates suédoises, pour lequel la France vient de proposer la FDI de Naval Group, la même qui va équiper cette année la Marine Nationale et bientôt la marine grecque. Ce contrat revêt une importance vitale pour la pérennité du chantier lorientais, seul site de construction de navires de surface de NG, tout comme le marché des cinq ou six frégates norvégiennes, même si ces contrats prévoient des constructions partiellement localisées. Il est donc évident que le choix français du Globaleye n’est pas anodin dans la perspective de ces potentiels contrats scandinaves, d’autant plus que la Finlande et les pays baltes s’intéressent aussi de près aux Bâtiments de Guerre des Mines conçus par Naval Group pour le compte de la Belgique, les Pays Bas, et dorénavant la France.
Cette région du Nord de l’Europe est une zone conflictuelle avec la Russie, d’où l’importance pour le France d’être présent sous toutes les formes, politiques, diplomatiques, économiques, et militaires.
J’avance aussi le fait que si l’aspect financier, tant au niveau du prix du système et de son coût d’exploitation, que par rapport aux contraintes du déficit public français abyssal, est évident dans ce choix suédois, l’évolution très rapide de la technologie invite les décideurs à se ménager des portes de sortie de programme pour s’adapter et coller à l’évolution de la menace. De fait, ce choix du Saab, même s’il peut paraître minimaliste en terme de capacités opérationnelles par rapport au E-7 Wedgetail, est aussi dimensionné pour permettre éventuellement d’intégrer à l’avenir des systèmes de satellites et de drones THA (Très Haute Altitude) capable de compléter ou suppléer plus efficacement les Awacs.
Qu’est-ce qui est le plus important ou acceptable pour la France ? Etre au top en terme de capacité opérationnelle de surveillance, de contrôle et de commandement aériens, sachant que la France disposera déjà d’un matériel de très haute valeur technologique avec le Saab, et de la présence éventuelle des futurs E-7 de l’Otan, voir Us, ou vendre du matériel militaire à haute valeur ajoutée à des pays européens dans le cadre d’une construction d’une défense commune autonome et autosuffisante, ce qui implique d’acheter aussi européens pour donner l’exemple ?
Je vous laisse le soin d’y répondre….
Nb : « ll faut semer pour récolter…. »
Aéronautiquement,