Malgré les efforts entrepris par Ankara Joe Biden n’autorise toujours pas la Turquie à réintégrer le programme Joint Strike Fighter. C’est donc comme simple cliente qu’elle pourra acquérir une petite vingtaine de Lockheed-Martin F-35A Lightning II, et non comme partenaire à part entière. En contrepartie elle devra se séparer de ses batteries de missiles sol-air S-400 de facture russe. Des équipements qui pourraient bien ainsi rejoindre l’Ukraine, et mettre en péril l’aviation… russe.
Rappelons que l’acquisition par Ankara des missiles sol-air S-400 avait poussé Donald Trump, alors Président des États-Unis, à exclure la Turquie du programme JSF. Quelques mois plus tard Joe Biden, l’ayant remplacé à la Maison Blanche, avait entériné cette décision ô combien importante. La côte de popularité du dirigeant turc Recep Tayyip Erdogan en avait alors pris un sérieux coup sur la scène internationale. S’en est suivie une série de provocations et de jeux de billards à trois bandes au cours desquelles la Turquie avait laissé sous-entendre qu’elle pourrait acheter des Sukhoi Su-35 Flanker-E ou plus récemment des Eurofighter EF-2000 Typhoon.
En fait en parallèle de la perte du Lockheed-Martin F-35A Lightning II la Turquie devait faire face à la montée en puissance de son adversaire régionale la Grèce. Ayant acquis et reçu ses premiers Dassault Aviation Rafale et ayant elle été autorisée à acheter le F-35A il fallait impérativement qu’Ankara réagisse. En plus du levier EF-2000 Typhoon Ankara consentit un pis-aller avec Lockheed-Martin. À défaut du Lightning II elle commanderait des F-16V Viper. On pensait alors que la partie était jouée et que rien ne bougerait plus sur ce dossier.
Sauf qu’en milieu de semaine la presse turque a annoncé un bien étrange arrangement entre Ankara et Washington DC : des F-35A Lightning II tout beaux tout neufs contre les actuels batteries anti-aériennes S-400 d’origine russe. Recep Tayyip Erdogan allait t-il enfin pouvoir disposer de sa soixantaine de chasseurs américains de 5e génération ? Oui et… non. Oui il aura des chasseurs furtifs mais non il n’en possèdera pas autant. Les négociations tourneraient actuellement sur un lot allant de dix-huit à vingt-deux exemplaires, pas plus ! Le Pentagone semble surtout avoir dealé avec la Turquie que les missiles sol-air soient livrés aux États-Unis bons de guerre afin d’être minutieusement auscultés avant d’être empaquetés en direction de l’Ukraine. S’ils peuvent permettre d’envoyer au tapis deux ou trois bombardiers ennemis c’est toujours ça de pris.
Aux États-Unis l’affaire prend des airs de règlement de compte (à OK Corral) politique entre démocrates et républicains. Ou comment Kamala Harris imprime déjà sa marque en ridiculisant un peu plus Donald Trump. Car cette méthode visant à faire revenir la Turquie dans le giron otanien c’est du pur Harris. Elle essaye sans cesse de faire la synthèse politique et d’avoir une vision pragmatique du monde, loin du dogmatisme trumpien ! Si ça marche cela pourrait la renforcer sur la scène internationale. Si ça rate elle n’aura pas fait pire que son actuel concurrent. C’est quasiment du gagnant-gagnant pour elle. Et Recep Tayyip Erdogan dans tout ça ? Sans cependant se refaire une virginité diplomatique il peut lui aussi ressortir vainqueur de la situation et se poser de nouveau en fournisseur de premier plan de l’Ukraine et en allié essentiel de l’Amérique en Méditerranée orientale. Sauf qu’il n’aura pas ses F-35A Lightning II avant la Grèce…
Affaire à suivre.
Photo © Lockheed-Martin
En savoir plus sur avionslegendaires.net
Subscribe to get the latest posts sent to your email.
13 Responses
C’est loin d’être finalisé tout ça… mais le scénario me plaît ! Quel extase ce serait de voir du S400 russe abattre du chasseur russe en Ukraine ! Quel pied de nez pour le régime de poutler ça donnerait !!
Je suis d’accord avec toi des S-400 qui abattraient des Su-34 ruSSes ça serait génial à voir. Le max ce serait qu’ils découpent du Tu-26 Backfire. Là oui les Turcs mériteraient leurs F-35A.
Par contre voir des F35 turcs agresser nos frères grecs m’extasirait beaucoup moins …
Oui, enfin avec cette transaction, la Turqui rentre dans le rang de l’OTAN et je ne doute pas qu’en cas de conflit les US feront un petit rejet à distance comme cela est possible le 1vec le F35.
Ce serait burlesque mais je ne vois pas Erdogan accepter car se serait définitivement se couper de la Russie alors qu’il gagne beaucoup en influence diplomatique et en argent à jouer les deux tableaux. C’est une ré-exportation d’armement russe théoriquement soumis à veto du fournisseur. La Turquie peut passer outre mais ce serait un quasi casus belli pour Moscou. On ne parle pas d’AK47 mais de S400. C’est aussi la preuve qu’à force d’être en équilibre, on peut finir par se prendre un gadin.
Bonjour à tous, je suis d’accord avec vous Ingo, je ne vois pas Erdogan fournir les S400 aux U.S.,ce serait ouvrir une boîte à pendore. Cela signifierai que n’importe quel pays pourrait « échanger » de l’armement, sans tenir compte de certaines prérogatives inclues dans ce genre de commerce. Vous voyez un pays processeur de Rafale, en refourguer quelques uns à la Chine (par exemple), pour se procurer un type d’arme non produite en occident ? Si Erdogan franchi le Rubicon, il peut dire adieu à son entente avec la RuSSie. Pas sûr que le jeu en vaille la chandelle… Cordialement
Qui vous dit que l’information de livraison supposée de F-16 A et B a la Chine par le Pakistan n’ai pas été réaliser en échange de la participation à de futures conceptions d’avions sophistiqué.
Les USA ont bien des MIG-29 et SU-27 sur la base de Nellis pour une équipe d’évaluation.
Certains de ces avions ont été reçus, on ne sait trop comment et d’autres ont été vendus par l’Ukraine, l’Allemagne lors du partage des restes de l’ex aviation de la RDA.
La France elle-même reçus des missiles antiaériens comme ceux qui aurais put toucher les avions en Libye ou en Syrie.
Je n’ai jamais dit qu’ils ne pouvaient pas le faire. Poutine ne va pas envahir la Turquie si l’affaire se conclut. Mais c’est ouvrir la boîte de Pandore et il ne faudra pas dire c’est scandaleux si les chinois ou les russes font pareil. Deux, ce serait un big bang diplomatique. Un revirement énorme. Maintenant que les turcs laissent des spécialistes américains inspecter scrupuleusement un système S400 dans un endroit discret afin de s’assurer de sa parfaite sécurité et sans aucune arrière pensée)))) ça doit pouvoir se faire. Je pense même que c’est fait depuis longtemps.
Bonjour,
Ca me parait douteux, vu la sensibilité des 2 équipements.
Les USA prendraient-ils le risque de voir des ingénieurs russes farfouiller dans des F35 tout neufs ?
Les Turcs celui de se couper de la Russie?
Qui plus est, des F35 seraient un potentiel transfert de technologie des plus intéressant pour une industrie d’armement turque en pleine croissance…
Bonne continuation
Israël et les USA ont dû attendre plus de 10 ans avant qu’un pilote syrien ne livre un MIG-21 sur une base israélienne en échange de l’exfiltration de sa famille de Syrie.
Bien avant un pilote Nord-Coréen livre un MIG-15 en Corée du Sud, l’arrivée d’un MIG-25 au Japon qui avait mis le monde militaire en émoi, l’avion n’ayant pas été détecté.
Démonté et ausculté par l’Air Force, il fut restitué à l’URSS.
Rien n’est jamais impossible, il suffit d’y mettre les moyens financiers et en homme ayant les compétences nécessaires.
La Chine a les moyens pour les compétences, j’ai encore quelques doutes vu les tâtonnements pour leurs moteurs militaires en dehors des copies du matériel Russe.
Bonne journée.
Lors de l’achat des S400 , la Turquie s’est engagée auprès de la Russie à assurer la confidentialité des données techniques des s400. Je ne pense pas que la Turquie va trahir la Russie en donnant les s400 aux États-Unis même si le but final est de les donner à l’Ukraine après auscultation.. quand vous achetez du matériel de guerre à la France aux États-Unis ou à la Russie, le pays acheteur s’engage à les conserver et à ne pas les revendre sans autorisation du constructeur ou des autorités du pays constructeur.
Ce scénario est invraisemblable ! Je ne vois pas la Turquie accepter de s’aligner et se placer sous la coupe des États-Unis dans leur conflit contre la Russie.
Mais il est vrai que la Turquie doit aussi rechercher une solution face à la supériorité maritime (frégates de Naval Group) et surtout supériorité aérienne (Rafale) de la Grèce.
Oui, mais la Grèce n’a pas d’ambitions expansionnistes. Elle a besoin du matos surtout pour affirmer sa souveraineté. Et la Turquie c’est tout le contraire, de Bakou à aux frontières de l’Europe et les « lâchages » de vagues d’immigrés jusqu’à Tripoli elle a des très grosses ambitions. Donc la laisser avec du F16blk52 n’est pas une mauvaise idée.