En Russie le Sukhoi Su-30 Flanker-C est-il encore une valeur sûre à l’export ?

Si on excepte le Sukhoi Su-27 lui-même c’est la version la plus rentable de la famille Flanker, notamment sur les marchés internationaux. Pourtant face à la concurrence de plus en plus acharnée des constructeurs américains et européens le Sukhoi Su-30 connait un net ralentissement de ses ventes. Les trains de sanctions votés par les Alliés suite à l’agression contre la démocratie ukrainienne ainsi que la loi fédérale américaine CAATSA n’arrangent pas les choses. Aussi on est désormais clairement en droit de se demander jusqu’à quand ce chasseur réussira encore à s’exporter correctement.

Chasseur de génération 4.5 le Sukhoi Su-30 Flanker-C a été bien vendu par la Russie depuis le milieu des années 1990. En trois décennies son succès de n’est pas démenti. On en trouve sous les marquages de nationalité de treize pays différents aussi bien en Afrique, en Amérique du Sud, en Asie, ou même en Europe. L’Algérie, la Chine, l’Inde, et la Malaisie possèdent même des sous-versions qui ont été développées et produites spécialement pour elles. Il est d’ailleurs à signaler que l’avionneur Hindustan Aircraft Limited possède sa propre chaîne d’assemblage du Su-30MKI. En ce début novembre 2023 les productions russes tournent au ralenti. Certes les difficultés financières du pays y sont pour beaucoup. Elles ont grandement impacté UAC, la maison mère de Sukhoi. Pour preuve les seuls avions encore en production sont les derniers Su-30SME à destination du Myanmar.

En Inde le Sukhoi Su-30MKI a le vent en poupe. Il assure en cette fin d’année 2023 la succession du Bison, le mythique Mikoyan-Gurevich MiG-21 Fishbed au sein du N°4 Squadron de l’Indian Air Force. Un avion d’une autre époque qui depuis quelques temps s’y traînait une très sale réputation, celle de tuer ses propres pilotes. Le nombre d’accidents sur MiG-21 a poussé l’Inde à anticiper leur remplacement par des Su-30MKI plutôt que par des HAL Tejas Mk-1 comme cela était initialement prévu. Un jeu de chaises musicales avec des avions en unité rendu possible justement par la licence de production de HAL. Celle-ci permet de garder ouverte la chaîne d’assemblage de l’avion russe. Il s’agit pourtant de l’arbre qui cache la forêt : le Sukhoi Su-30 Flanker-C n’intéresse guère plus les clients étrangers, en tous cas pas les nouveaux.

Outre l’Inde donc le constructeur russe ne peut plus compter que sur ses clients les plus fidèles : l’Algérie, la Biélorussie, et le Venezuela. Si les deux derniers ne craignent rien des sanctions américaines, étant dans le collimateur de l’US Department of Defense depuis longtemps il en est différemment de l’Algérie. L’ancienne colonie française aujourd’hui puissance régionale du Maghreb aime à ménager la chèvre et le chou. Si la Russie demeure son principal fournisseur d’aéronefs militaires elles n’hésite parfois pas à en acquérir aux États-Unis ou en Europe. C’est notamment le cas des avions de transport tactique. Alger veille donc à ne pas trop froisser Washington DC.

Si actuellement aucun utilisateur du Su-30 Flanker-C n’a encore retiré du service ses exemplaires cela risque de changer dans un avenir assez proche. L’Indonésie a planifié le remplacement de ses onze Su-30MK2 sous trois à quatre ans par le Dassault Aviation Rafale F4, en même temps temps d’ailleurs que les cinq Su-27SKM. Si en Malaisie les dix-huit Su-30MKM n’ont pas encore de successeur désigné chacun sait qu’ils sont désormais sur la sellette. Les défaillances de l’avion en milieu subtropicale ont clairement joué contre lui, au moins autant que celles de l’avionneur russe à soutenir l’utilisation de ses avions. Les livraisons de pièces détachées restent le grand mal de Sukhoi. La Malaisie est actuellement «draguée» par la diplomatie américaine mais pourrait également se tourner vers l’Europe.

Or il est de notoriété que dès lors qu’un ou plusieurs clients commence à se séparer d’un modèle d’avion de combat cela implique que celui-ci n’est plus aussi compétitif qu’avant. Outre le Dassault Aviation Rafale français déjà cité le Su-30 Flanker-C doit affronter sur les marchés internationaux l’Eurofighter EF-2000 Typhoon européen et le Boeing F-15EX Eagle II américain. Deux très sérieux compétiteurs avec des arguments massues contre lui. Surtout l’achat d’un ou plusieurs de ces trois modèles garantit à un pays de ne pas subir le courroux des États-Unis. Les industriels européens sont à l’abri de la loi fédérale CAATSA, pour Countering America’s Adversaries Through Sanctions Act, pour eux mêmes et pour leurs clients.

La crainte pour United Aircraft Corporation c’est que justement ce Sukhoi Su-30 Flanker-C accumule trop de défauts. Outre les risques de sanction l’avion russe accuse désormais le poids des ans et cela se voit sur son architecture générale hérité des années 1970. Avec des Mikoyan MiG-35 Fulcrum-F et des Sukhoi Su-35 Flanker-E qui cumulent désormais échecs sur échecs à l’international le Su-30 se révèle être la roue de secours de l’industriel russe. Jusqu’à quand ? L’un des espoirs actuels réside dans l’Iran, et on parle également de l’Afrique du Sud qui connait actuellement une grave crise au sein de sa SAAF. Les autres alliés africains de la Russie, comme le Burkina Faso ou le Mali sont à des années lumières de disposer des moyens suffisants pour acquérir et mettre en œuvre de tels avions de combat.

Affaire à suivre.

Photo © ministère des Armées.


En savoir plus sur avionslegendaires.net

Subscribe to get the latest posts sent to your email.

PARTAGER
ARTICLE ÉDITÉ PAR
Image de Arnaud
Arnaud
Passionné d'aviation tant civile que militaire depuis ma plus tendre enfance, j'essaye sans arrêt de me confronter à de nouveaux défis afin d'accroitre mes connaissances dans ce domaine. Grand amateur de coups de gueules, de bonnes bouffes, et de soirées entre amis.
articles sur les mêmes thématiques
Commentaires

12 Responses

  1. « Les autres alliés africains de la Russie, comme le Burkina Faso ou le Mali sont à des années lumières de disposer des moyens suffisants pour acquérir et mettre en œuvre de tels avions de combat »
    Comment ça?? Notre très fiable Malokko a pourtant affirmé que le Mali allait acheter le SU57! Arnaud, comment osez vous affirmer le contraire!
    https://www.avionslegendaires.net/2023/11/actu/lombre-du-sukhoi-su-57-felon-plane-sur-lukraine/
    Pardon pour l’ironie, mais j’en viens à cliquer sur vos autant pour la qualité (toujours intéressante, régulièrement excellente) des articles que pour me régaler à lire les commentaires des trolls en maraude.

  2. On voit les F16 neufs ou d’occasion arriver en première ligne pour remplacer les chasseurs géants russes. Passer au Rafale ou F15 reste un engagement significatif face au prix des avions Russes.
    Et il y a le changement d’alliances qui va avec…

  3. Pourquoi vous dite pas que la RDC elle discute avec l’industrie Soukhoi pour des SU27 et des SU30?

  4. J’ai entendu dire que les usa négocié déjà avec la Russie et que si d’ici la fin de l’année il ‘ny avait pas de Persée ukrainien il serait obligez de négocier avec la Russie et laisser les territoires occupés !
    D’après un sondage américain les américains se désintéressé de la guerre en Ukraine et préfère soutenir Israél
    Je ne sait plus qui avait prédit exactement la même choses avant les élections américaine l’année prochaine ah oui moi
    Hier les commentateurs disait que poutine étaient en train de gagner cette guerre contre l’OTAN qui ne pourra plus fournir grand choses stock vide plus assez de soldats en Ukraine Poutine n’a plus qu’à attendre l’année prochaine pour négociez c’est moi qui hnvous le dit les américains parle déjà de négociation et de laisser a la Russie les territoires occupés donc voilà j’avais dit exactement la même chose il y a quelque mois. Faite confiance a mon expértise.

    1. Et sinon c’est quoi le rapport entre votre com’ et l’article ? Ah bah oui aucun comme d’habitude avec vous Xavier.

      1. C’est un vrai commentaire ce ramassis de fautes d’orthographe, d’expression douteuse, et surtout de propos prétentieux et complètement idiot ? C’est tellement gros et bas de plafond que j’en viens à me demander si c’est pas qqun qui fait exprès de faire le bête ! D’un autre côté, depuis l’opération spéciale du champion des échecs en tout genre, on lit beaucoup de commentaires simplement navrant.

  5. J’ai une question peut être bête, avant , en URSS? Sukhoi, Mig, Tupolev, Yakolev, Ilyushin était  » indépendant », maintenant comme tous ces bureaux d’études (constructeurs) sont regroupés au sein de l’UAC , existe encore vraiment une « indépendance » entre eux? Ou ne s’agit il plus que des noms commerciaux?
    Et une remarque, quand j’était jeune , du temps de la guerre froide, on entendait parler quasi exclusivement que de Mig, ce nom a pratiquement disparu….

    1. Du temps de l’URSS tous les avionneurs dépendaient du pouvoir moscovite. En gros ils étaient publics. On parlait d’OKB, c’est à dire de bureaux d’études d’état. Leur actuelle unification au sein d’UAC c’est juste une version non marxiste du centralisme soviétique. C’est tordu mais dans l’esprit c’est bien russe.

      1. Alors , Arnaud, si je te suis , il existe encore plusieurs bureaux d’études au sein de l’UAC, cela n’a pas été rationnalisé.
        Les « marques » , Mig, Tupolev etc etc … corresponde toujours au bureaux d’études ayant étudiés ces appareils….

    2. C’est vrai qu’à l’époque on ne parlait que des MiG mais cette époque est révolue, ils n’ont rien fait de nouveau depuis longtemps, comme sukhoi d’une certaine façon, au Su-57 près quand même, et le MiG 35 qui était une simple évolution du Fulcrum est clairement un échec. Les Russes aiment bien le lourd, et les Su ont plus de gueule que les MiG, et le pouvoir à très surement privilégié l’un par rapport à l’autre.

  6. Non, l’OAK en cyrillique ou UAC est beaucoup plus centralisée que du temps de l’URSS où certes tout ce décidait à Moscou mais avec des bureaux d’études indépendants les uns des autres et ayant chacun leur spécialité mais surtout des usines et des centres d’essai indépendants. D’ailleurs il y avait une émulation et souvent une détestation réciproque entre bureaux d’études. L’UAC est la création d’un mammouth sans précédent en Russie et même dans le monde.
    Depuis 2006 nous assistons à une intégration de plus en plus forte de toute l’aéronautique civile et militaire russe au sein d’une entreprise commune allant de la conception à la fabrication en passant par la sous-traitance. C’est encore plus vrai avec l’absorption d’Irkut qui produit les Soukhoi par l’UAC. En fait il n’y a plus de structure autonome en dehors de l’UAC sauf Beriev qui historiquement est dedans sans l’être vraiment et Klimov. Encore que, Klimov a Rostec comme actionnaire principal. Tout le monde sait que ça fonctionne mal mais peu importe, la structure UAC permet de détourner un maximum de pognon au profit de quelques-uns ce qui est le plus important dans un état mafieux

Sondage

25ème anniversaire, à quelle époque remonte votre première visite d'avionslegendaires ?

Voir les résultats

Chargement ... Chargement ...
Dernier appareil publié

Bell 47J Ranger

Mieux connu sous sa dénomination militaire H-13 Sioux, le Bell 47 fut l’un des premiers hélicoptères fabriqués en grande série. Au fil des ans, le

Lire la suite...